‏ Deuteronomy 32

LV. (Ib 32, 5.) Pécher devant Dieu ou pécher contre Dieu sont deux choses différentes.

— « Ses enfants, devenus méprisables, ont péché, mais non devant lui. » Quelques interprètes ont rendu le texte grec : teknamometa comme ici enfants méprisables ; d’autres ont traduit : enfants couverts de souillures ; d’autres encore enfants corrompus. Il n’y a donc pas à ce propos de question grave, ou plutôt il, n’y a pas même matière à discussion. Mais si Moïse en disant « Ils ont péché non devant Dieu » prend le mot péché en son sens général, de telle sorte que celui qui le commet, se fait tort à lui-même, et non à Dieu ; une question intéressante se présente, il s’agit de savoir quelle interprétation il faut donner à ces textes du Psalmiste : « J’ai péché devant vous seul a » de Jérémie : « Nous avons péché devant vous, ô Seigneur, unique attente d’Israël b ; » et encore du livre, des Psaumes « Guérissez mon âme, car j’ai péché devant vous c. » Pécher devant Dieu signifie-t-il la même chose que pécher contre Dieu ? Car le grand-prêtre Héli s’est servi de ces expressions : « Si quelqu’un vient à pécher contre Dieu, qui priera pour lui d ? » Je dirai donc en passant la solution qui se présente maintenant à mon esprit. D’autres, plus éclairés, trouveront peut-être une explication meilleure ; peut-être, avec l’aide de Dieu, la trouverons-nous nous-mêmes à un autre moment. Pécher contre Dieu, c’est pécher dans ce qui tient au culte de Dieu. Car le texte précité ne signifie rien autre chose : tel était réellement le péché des enfants d’Héli, à qui s’adressaient les paroles précédentes. Il faut en dire autant des péchés commis contre les hommes choisis de Dieu : voici en effet les paroles que Dieu, suivant l’Écriture, dit à Abimélech au sujet de Sara : « C’est pourquoi je t’ai préservé de pécher contre moi. e » Mais pécher devant le Seigneur, ou plutôt avoir péché devant le Seigneur, à moins qu’on ne trouve dans l’Écriture quelque passage opposé à ce sens, s’applique très bien, ce me semble, à ceux qui font maintenant pénitence de leur péché, pour glorifier Dieu en obtenant son pardon. David, voulant en effet justifier ce qu’il a dit : « J’ai péché devant vous, et j’ai fait le mal en votre présence f » ajoute : « afin que vous soyez reconnu juste dans vos paroles et irrépréhensible dans le jugement qu’on portera sur vous. » Il s’agit ici ou de Dieu, quand il dit : « Jugez entre moi et ma vigne g » ou de Notre-Seigneur Jésus-Christ, qui seul a pu dire en toute vérité : « Le prince de ce monde va venir, et il n’a rien en moi (c’est-à-dire point de péché qui mérite la mort ;) mais afin que le monde connaisse que j’aime le Père, et que je fais ce que le Père m’a ordonné, levez-vous, sortons d’ici h :» comme s’il disait : Quoique le prince du monde veuille que la mort soit le prix des fautes les plus légères, il n’a point de pouvoir sur moi ; mais levez-vous, sortons d’ici, c’est-à-dire, allons au-devant des souffrances : car en souffrant, j’accomplis la volonté de mon Père, je ne subis point la peine de mon péché. Quand Jérémie dit au Seigneur : « Nous avons péché devant vous, unique attente d’Israël i » c’est en esprit de pénitence et avec l’espoir du salut et du pardon, qu’il lui adresse cette prière. Ces autres paroles : « Guérissez mon âme, car j’ai « péché devant vous j », ont également pour objet de glorifier Dieu par le pardon qu’il accorde : grande est en effet sa miséricorde envers ceux qui confessent leurs fautes et reviennent à Celui « qui ne veut pas la mort du pécheur, mais son retour et sa vie k. » C’est pourquoi David, non seulement au livre des Psaumes, mais encore au moment où Dieu le reprenait par sof1 prophète, fit au Seigneur cette réponse inspirée par l’espoir du pardon : « J’ai péché devant le Seigneur l. » C’est un blessé en présence du médecin, qui se livre entièrement à lui, et se tient prêt à lui obéir. Mais Moïse, dans son cantique, prophétisait sur la conduite de certains pécheurs qui, après avoir outragé Dieu par des péchés considérables, ne voudraient pas en faire pénitence ni revenir à Dieu pour en être guéris : infortunés qui sont aussi dépeints dans cet autre passage : « Ils ne sont que chair, qu’un souffle qui passe et qui ne revient plus m. – Ils ont péché, non devant lui » peut signifier encore qu’ils se sont pas à eux-mêmes, et non à Dieu, par leur péché.

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