Job 6
CHAPITRE VI. – Paroles de Job ; sa justification.
3. « Il te semble donc que mes paroles sont mauvaises. » Job n’a point parlé pour se plaindre des coups de l’adversité ; il n’a fait qu’exprimer sa douleur, moins la sienne propre que celle que lui fait éprouver le sort du genre humain tout entier. 4. « Les flèches du Seigneur se sont fixées sur moi. » C’est la parole de Dieu qui transperce l’âme en lui faisant confesser ses fautes. « Leur fureur s’est abreuvée de mon sang ; » car elles enlèvent le péché. « Dès que je veux parler, elles m’aiguillonnent. » Elles m’imposent ce que je dois dire. 5. « Eh quoi ! N’est-ce pas quand il a faim que l’onagre pousse de vaines clameurs ? » S’il souffre de la faim, c’est qu’il a voulu être libre. « Le bœuf mugira-t-il, quand il aura devant lui sa nourriture ? » Le travail du bœuf préparé à l’âne sa nourriture. Ainsi fut-elle préparée aux Gentils par les Prophètes et les Apôtres, qui étaient Juifs. Ces paroles expriment donc le désir de manger ; c’est-à-dire d’être secouru, et non l’impatience de souffrir. 6. « Le pain peut-il sans sel être mangé ? » Comme si on lui disait : Pourquoi donc parles-tu ainsi en figures ? Il répond que ces choses exprimées au propre seraient sans saveur. « Quelle douceur y a-t-il dans les discours insensés ? » Il appelle insensés les discours des hommes ; la parole de Dieu est le vrai pain, mais le pain céleste. « Voilà pourquoi mon esprit ne peut se taire. » De même que sans le sel on ne peut goûter le pain, ainsi je me dois tout entier à la parole de Dieu, selon ce qui est écrit : « Comment entendront-ils, si personne ne les prêche a ? » 7. « Je le vois, ma nourriture est devenue fétide comme l’odeur du lion. » Mes paroles sont fétides comme le lion : ou parce que dans leur orgueil ils se sont prévalus de leurs pensées, ou parce que s’attachant aux plaisirs charnels, ils ont répandu l’odeur du lion, eux qui se glorifient en leurs discours. 8. « S’il plaît au Seigneur que ma demande arrive. » Il appelle demande la chose même qu’il sollicite. « Et qu’il réponde à mes espérances. » L’épreuve est bonne pour celui qui a l’espérance d’être consolé après la tribulation, Le mot espérance est ici bien choisi, car après avoir obtenu ce qu’il attend, l’homme n’a plus besoin d’être éprouvé. 10. « Que la cité dont je franchissais les murailles soit pour moi un sépulcre. » Il veut que la cité impie de Babylone soit pour lui un sépulcre, non pour qu’elle le couvre de ses ruines, mais afin qu’elle sache qu’elle ne renferme que des morts, elle où il se vantait de trouver son appui et sa défense. « Je serai sans pitié ; car je n’ai point dit le mensonge ; mes paroles sont les paroles saintes de mon Dieu. » Il a seulement dit ce que le Seigneur lui a inspiré ; savoir que l’humanité en général a besoin de se, cours pour le louer. 11. « Quelle est ma force pour tout supporter ? » Voilà la blessure. « Combien de temps encore « mon âme doit-elle souffrir ? » Aux approches de la mort les hommes sont pressés de se convertir et de faire à Dieu l’aveu de leurs péchés les plus honteux ; et cette considération l’a forcé à se reconnaître coupable. 12. « Ai-je la force des pierres ? » Il désigne les endurcis, que les traits de la parole divine ne peuvent pénétrer, que rien ne touche et ne détermine à confesser leurs péchés. 13. « Ai-je refusé de me confier en lui dans ma prospérité ? » quand, à l’image de Dieu, j’étais immortel. « Et il m’a retiré son appui. » Je suis devenu mortel en voulant me confier en moi.« Dieu m’a visité et m’a dédaigné ; » selon ce, qui est écrit : « Qu’est-ce que le fils de l’homme ; « pour que vous le visitiez b ? » 16. « Mes proches ont refusé de me voir. » J’ai fait horreur aux anges. « Comme le torrent qui s’écoule. » J’ai été comme inondé par la miséricorde ; tout s’est desséché, et il n’y a plus de source pour me désaltérer. « Ils sont passés devant moi comme les flots. » Les consolations étaient donc pour lui comme un breuvage. « Ceux qui me craignaient sont venus fondre sur moi. » Le démon avec ses anges. « C’en est fait de moi, je suis exilé de ma propre maison ; » il veut parler de la demeure éternelle ou de sa propre conscience : c’est pourquoi il était assis devant sa porte. 19. « Voyez les chemins de Théman, les sentiers de Saba. » Il désigne ici ceux qui n’aiment que les biens de ce monde, sur lesquels il assure ne pas s’appuyer lui-même, ou mieux l’humanité qu’il représente. 20. « Et vous aussi, vous vous êtes impitoyablement élevés contre moi », pensant que l’homme est heureux s’il regorge des biens de ce monde. Ils l’insultaient en effet plutôt qu’ils ne compatissaient à ses maux. 21. « Mais voyez mes blessures et craignez ; » comprenez ce qu’elles signifient et craignez les châtiments à venir. 22. « Eh quoi ? que vous ai-je demandé et qu’ai-je besoin de votre force ? » car il souffre en la présence de Celui qui peut le guérir. 24. « Instruisez-moi, et je garde le silence. » Ils devaient être attentifs à ses enseignements, puisqu’ils ne pouvaient l’instruire. 25. « Mais je le vois, les paroles de l’homme véridique ont été en petit nombre sur vos lèvres. » Il appelle l’homme véridique celui qui par sa conversion est devenu un vrai modèle de pénitence, et dont ses amis imitaient peu le langage. 26. « Je n’implore point votre secours. » L’homme véritable n’implore que le secours de Dieu, et cet homme véridique aussi est celui qui avoue ses péchés : de là cette parole : « Celui qui pratique la vérité vient à la lumière c. – Je ne supporterai plus désormais les excès de votre langage ; » c’est la parole de Dieu qu’il veut seule accepter, c’est-elle qui doit le guider 27. « Et cependant vous vous attaquez à l’orphelin » voilà votre rôle : vous voulez m’injurier sans comprendre.ceque tout ceci signifie. Ils n’auraient pas dû insulter Job qui était en leur présence ; aussi dit-il : « Et cependant. » 28. « Maintenant, que vous me voyez, laissez-moi en repos ; » puisque vous ne pouvez m’instruire. 29.« Et recherchez désormais la justice. » Il leur avait d’abord semblé que le bon droit les faisait parler 30. « Car l’iniquité n’est point sur mes lèvres, et mon cœur n’a-t-il point médité la sagesse ? » Il n’a point accusé Dieu, dit-il, mais il a fait parler un homme qui s’accusait lui-même, comme déjà il nous l’a fait comprendre dans ses autres paroles. C’est ainsi qu’il a médité la sagesse.
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