‏ Judges 8

XLI. (Ib 8, 26, 27.) L’éphod que fit faire Gédéon était-il un vêtement? – On demande ce que c’est que l’éphod, ou l’éphod. Si, comme le disent la plupart des interprètes, c’est un vêtement sacerdotal ou plutôt un vêtement que l’on met par-dessus les autres, appelé en grec : επεδυμα, manteau ou επομις, mantelet, et en latin : super humerale, vêtement qui recouvre les épaules, on peut se demander avec raison comment Gédéon a employé une si grande quantité d’or à la confection de ce vêtement. En effet, il est écrit : « Les pendants d’oreilles que Gédéon avait demandés se trouvèrent peser mille sept cents sicles d’or, sans compter les bracelets, les colliers, les vêtements de pourpre que portaient les rois de Madian, sans compter les colliers qui entouraient le cou des chameaux eux-mêmes ; et Gédéon en fit un éphod et le dressa dans sa cité à Ephra, et là tout Israël tomba dans la fornication de l’idolâtrie à cause de cet éphod, et il fut pour Gédéon et sa maison un objet de scandale. » Comment une telle quantité d’or put-elle être employée à ce vêtement ? Nous lisons que la mère de Samuel fit à son fils, en le présentant au Seigneur pour être élevé dans son temple, un éphod le lin, car c’est ainsi que plusieurs interprètent ces paroles : Ephud-bard a : cela montre avec évidence que l’éphod est une sorte de vêtement. Ces expressions : « Il le dressa dans sa cité » n’auraient-elles point pour but d’indiquer qu’il fut tout en or ? L’Écriture dit en effet non qu’il le mit, mais qu’il le dressa parce qu’il était solide et ferme, pouvant être dressé et se tenir debout.

2. L’empressement des Israélites autour de l’Ephud de Gédéon était une sorte d’idolâtrie. – Gédéon ayant donc fait illicitement cet éphod, « tout Israël tomba dans la fornication de l’idolâtrie à cause de cela », c’est-à-dire en courant à cet éphod contrairement à la Loi de Dieu. Ici une, question naturelle se présente : Comment l’Écriture accuse-t-elle d’idolâtrie le culte et le concours du peuple autour de cet éphod, puisque ce n’était pas là une idole, un simulacre de fausse divinité, mais un des objets sacrés du tabernacle, un vêtement sacerdotal ? C’est qu’en dehors du tabernacle renfermant tous ces objets que Dieu avait commandés, il était défendu d’en faire aucun autre semblable. C’est pourquoi l’Écriture poursuit en ces termes : « Et cet éphod devint pour Gédéon et sa maison un sujet de scandale » c’est-à-dire, d’offense et d’éloignement du Seigneur. C’était comme une espèce d’idolâtrie d’adorer, à la place de Dieu, hors du tabernacle, un ouvrage de main d’homme quelconque, quand ceux que Dieu avait fait exécuter dans l’intérieur de son tabernacle servaient à son culte, bien loin qu’aucun d’eux reçût le culte soit comme Dieu, soit comme image de Dieu.

3. Gédéon ne fit pas seulement un éphod, mais aussi tous les autres objets qui servaient au culte divin. – Par l’éphod ou l’éphud, si l’on prend la partie pour le tout, on peut encore entendre tout ce que Gédéon érigea dans la ville à la ressemblance du tabernacle, comme pour rendre un culte à Dieu : l’éphod en effet, comme l’Écriture le rappelle souvent, est la marque insigne de la dignité sacerdotale Le péché de Gédéon serait donc d’avoir érigé hors du tabernacle une espèce de nouveau tabernacle où l’on vint adorer Dieu. Il n’aurait point construit d’or massif un éphod, pour qu’on l’adorât, mais avec l’or faisant partie du butin, il aurait fabriqué tous les ornements et les ouvrages du sanctuaire, lesquels seraient désignés par l’éphod, à cause de l’insigne prééminence de ce vêtement sacerdotal, comme je l’ai expliqué. L’éphod, si c’est l’ornement qui couvre les épaules sur les vêtements sacerdotaux, n’était point fait d’or exclusivement, bien que l’or y fût employé. Dieu avait ordonné qu’il fût composé d’or, d’hyacinthe, de pourpre, d’écarlate et de fin lin. Mais comme les Septante, après avoir énuméré les dépouilles remportées par Gédéon, ajoutent : « Et Gédéon en fit un éphod » ils paraissent vouloir faire entendre que tout a été employé à cet objet. On peut voir ici, cependant, une figure de langage désignant la partie pour le tout. Ces paroles : « Il en fit un éphod » signifieraient : il fit de cela un éphod, ou bien, avec les dépouilles il fit un éphod, non en employant tout à cet usage, mais en prenant tout ce qui était nécessaire. On lit, en effet, dans la version faite sur l’hébreu ; « avec cela Gédéon fit un éphod ; » ou, comme écrivent les Septante, un éphod, changeant ainsi le mot qu’on dit être employé en hébreu. Tous les prêtres ne portaient point cet éphod tissu d’or, d’hyacinthe, de pourpre, d’écarlate et de fin lin ; mais le grand-prêtre seulement. Aussi, l’éphod que Samuel reçut de sa mère, et dont nous avons parlé, n’était-il point ce riche ornement ; car Samuel n’était pas souverain Pontife, c’était un enfant qui était offert pour être élevé dans le temple. Cet éphod de Samuel est appelé éphudbar, ou plutôt, à ce que disent ceux qui connaissent la langue hébraïque, éphud-bat, ce qui signifie un éphod de lin. – Je pense que l’éphod fabriqué par Gédéon fut ce vêtement somptueux, principal ornement du Grand-Prêtre, et que, sous sa dénomination, se trouvent compris tous les autres ouvrages sacrés qu’il fit construire hors du tabernacle du Seigneur, dans sa propre ville. Tel fut le péché qui devint un sujet de scandale pour Gédéon et sa famille, et causa la perte d’un si grand nombre de ses fils, comme l’Écriture le raconte ensuite b.

XLII. (Ib 8, 27, 28.) Est-ce après le péché de Gédéon que le peuple jouit de quarante années de paix ? – Une question qui ne doit pas être omise, c’est de savoir comment pendant les jours de Gédéon la terre a été en repos quarante ans, puisque après la victoire qui affranchit la nation, Gédéon fit avec l’or des dépouilles une idole que tout Israël adora, et qui devint pour lui-même et toute sa maison une cause de ruine. Comment après une telle prévarication, dont Gédéon et le peuple se rendirent coupables, la terre tutelle en repos pendant quarante ans ? L’Écriture nous montre constamment qu’au lieu d’obtenir la paix, le peuple l’a perdue quand il est devenu infidèle au Seigneur son Dieu, et qu’au lieu d’être mis à l’abri des incursions de ses ennemis, il a passé sous leur joug. Mais il y a ici, suivant l’usage de l’Écriture, un récit anticipé : l’histoire de l’éphod confectionné par Gédéon, contrairement à la Loi de Dieu, avec l’or provenant des ennemis vaincus et désarmés, est une histoire rapportée à l’avance, l’Écriture voulant joindre dans le même récit ce qui regarde l’origine de cet or et l’emploi que l’on en fit. Ce fut plus tard, vers latin des jours de Gédéon, que ce péché fut commis, quand vinrent les maux dont l’Écriture fait la narration après avoir mentionné les années de paix dont la terre jouit au temps de Gédéon. En rappelant ces années de paix, l’Écriture fait un résumé, c’est-à-dire qu’elle reprend la suite des événements qu’elle avait interrompue en intercalant le récit du scandale arrivé plus tard.

XLIII. (Ib 8, 33.) Après la mort de Gédéon le peuple tombe dans l’idolâtrie. – « Et il arriva, après la mort de Gédéon, que les enfants d’Israël s’égarèrent et tombèrent dans la fornication à la suite des Baalim, et ils prirent Baalbérith pour leur Testament, afin qu’il fût leur Dieu. » Baalim et, Baalbérith sont des idoles. La prévarication du peuple, son idolâtrie fut plus énorme après la mort de Gédéon, qu’elle n’avait été de son vivant à l’occasion de l’éphod ; car l’éphod, bien que la confection en eût été illicite, était un des objets sacrés du tabernacle, tandis que cette dernière fornication de l’idolâtrie ne put pas même s’autoriser du prétexte qu’on suivait la religion de ses pères. Si l’éphod fut fait, non à la fin de la vie de Gédéon, mais auparavant, Dieu usa de patience, et permit que la paix ne fût point ôtée à la terre, parce que bien que l’on eût transgressé son précepte, on ne s’était pas entièrement éloigné de lui, en exécutant un ouvrage semblable à celui que lui-même avait prescrit en son honneur dans son tabernacle. Mais le Seigneur ne voulut pas laisser impunies ces dernières iniquités plus graves, cette manifeste idolâtrie de son peuple.

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