dQuest LVII.
Leviticus 21
LXXVIII. (Ib 21, 7.) Sur le mariage des prêtres. – « Ils ne prendront point de femme déshonorée et souillée, ni de femme renvoyée par son mari ; parce qu’il est consacré au Seigneur son Dieu. » Le premier membre de la phrase porte : «ils ne prendront point », et le second « parce qu’il est consacré» : c’est que la loi s’applique et au grand nombre des prêtres qui exerçaient leurs fonctions dans le même temps, et à chacun d’eux, comme l’indiquent ces mots : « parce qu’il est saint ; » ce tour de phrase est familier à l’Écriture. Plus loin, en effet, elle ne parle que du grand-prêtre, qui entrait dans le Saint des Saints. Et cependant elle termine par des paroles qui regardent les prêtres en général. « Et tu le sanctifieras ; il présentera les oblations du Seigneur votre Dieu ; il est saint, parce que moi le Seigneur, qui les sanctifie, je suis saint moi-même a. » En effet, quoique nous lisions :« il présentera lui-même les oblations du Seigneur votre Dieu », cette fonction n’était pas dévolue au seul grand-prêtre, mais encore aux prêtres du second rang. La défense comprise dans ces paroles : « Ils ne prendront point de « femme déshonorée et souillée, ni de femme « renvoyée par son mari », s’applique donc aussi aux prêtres du deuxième ordre : il est dit plus loin que le grand-prêtre ne pouvait également épouser qu’une vierge. LXXIX. (Ib 21, 10.) Sur le nom du grand-prêtre et l’onction de son sacerdoce. – « Le grand-prêtre entre ses frères », c’est-à-dire, celui qui est grand parmi ses frères, celui à qui seul appartient la dignité de grand-prêtre ; « sur la tête du quel a été répandue l’huile de l’onction, oleochristo. » C’est le nom que l’Écriture donne à cette huile. LXXX. (Ib 21, 10.) Sur les vêtements du grand-prêtre. – « Et dont les mains ont été consacrées pour revêtir les vêtements. » Il ne peut être question ici que des vêtements sacerdotaux, décrits précédemment avec un soin si minutieux. LXXXI. (Ib, 21, 10-11.) Sur la défense faite au grand prêtre de prendre part au deuil de son père et de sa mère. – « Il n’ôtera point la mitre de dessus sa tête, et ne déchirera point ses vêtements, et n’approchera point de toute âme morte. » On voit ici la réitération de la défense adressée au prêtre de prendre part à des funérailles, en ôtant la mitre qui couvrait sa tête et en déchirant ses vêtements. Déchirer ses vêtements, était en effet, une pratique de deuil usitée chez les anciens, comme on le voit par ce qui est rapporté de Job, lorsqu’on lui annonce que ses enfants venaient d’être écrasés b. Ôter la mitre de dessus sa tête pouvait passer pour une marque de deuil, parce que c’était se dépouiller d’une parure. Mais quel est le sens de ce passage : « Il n’approchera d’aucune âme morte ? » Comment un corps mort peut-il s’appeler une âme morte ? Question d’une solution vraiment difficile ; et cependant cette manière de parler, inouïe parmi nous, est d’un usage fréquent dans l’Écriture. Séparé de l’âme, le corps prend donc le nom de celle qui le dirigeait autrefois, parce qu’il doit lui être rendu au, jour de la résurrection ; de même que l’édifice qu’on nomme église, conserve ce nom, lors même que l’Église, c’est-à-dire l’assemblée formée d’hommes, est sortie de son enceinte. Mais comme le corps ne prend jamais le nom de l’âme, tant que l’homme est en vie, n’est-ce point chose étonnante qu’il prenne ce nom, quand il est séparé d’elle par la mort ? Si nous entendons cette mort de l’âme dans le sens de sa séparation d’avec le corps, en sorte que l’on dise l’âme morte, non que sa nature ait péri, mais parce qu’elle est morte au corps dont elle n’use plus, bien qu’elle vive dans ce qu’elle a d’essentiel ; de la même manière que l’Apôtre dit que nous sommes morts au péché c, non que notre nature ait péri, mais parce que nous n’usons plus du péché : comment comprendre cette défense faite au prêtre d’approcher d’une âme morte, puisqu’on peut bien approcher d’un corps mort, mais non d’une âme qui en est séparée ? L’Écriture nommerait-elle âme cette vie du temps qui a cessé évidemment dans un cadavre, dont s’est échappée une âme immortelle ? Ce n’est pas que cette vie fût l’âme elle-même ; mais, devant sa subsistance due à la présence de l’âme, elle lui aurait emprunté son nom : c’est ainsi, comme nous l’avons déjà dit d en parlant du sang, qu’il faut entendre ce passage : « L’âme de toute chair c’est son sang e. » Or, dans un cadavre le ; sang lui-même est mort ; car il ne quitte pas le corps en même temps que l’âme. L’Écriture défend donc formellement au grand-Prêtre de prendre part à la sépulture, même de son père et de sa mère, mais cette défense, elle ne l’étend pas au prêtre de second ordre. Car elle ajoute : « Il ne deviendra pas impur en approchant de son père et de sa mère. » Et voici l’ordre logique des mots : « Il ne deviendra pas impur en approchant de son père, ni en approchant de sa mère. » LXXXII. (Ib 21, 12.) Défense faite au grand-prêtre de quitter le tabernacle pour assister à des obsèques. Pouvait-il se marier ? – « Il ne sortira point non plus des lieux saints : » dans le temps, cela ne laisse aucun doute, où se célébraient les funérailles des siens ; durant les sept jours où il se sanctifiait, il lui était également défendu de sortir du sanctuaire f ; mais il n’était pas tenu d’y rester toujours. C’est assurément une grande question de savoir s’il n’était pas interdit aux grands-prêtres de se marier et d’avoir des enfants : car, aux termes de la Loi, l’homme qui avait usé du mariage était impur jusqu’au soir, lors même qu’il avait lavé son corps dans l’eau g; et d’autre part, le grand-prêtre était obligé, pour entretenir l’encens perpétuel, de pénétrer deux fois chaque jour au-delà du voile jusqu’à l’autel des parfums, et l’accès du sanctuaire était défendu à quiconque était impur h : comment l’accomplissement quotidien de ce devoir était-il possible au grand-prêtre, s’il donnait le jour à des enfants ? Quelqu’un veut-il savoir qui le remplaçait, en cas de maladie ? on peut répondre que la grâce divine le préservait de ce danger mais, en ce qui concerne la procréation des enfants, qui se contenterait d’une réponse analogue ▼▼ft 2 Rétract. ch. 55. n. 9
? Il s’ensuit qu’il gardait la continence, ou qu’il suspendait à certains jours l’oblation de l’encens ; ou si cette offrande, que lui seul pouvait faire, ne souffrait aucune interruption, qu’il ne contractait pas d’impureté en usant du mariage, grâce à sa haute sainteté. Mais s’il faut lui appliquer la défense faite plus loin à tous les enfants d’Aaron, de s’approcher jamais des choses saintes avec quelque impureté, il ne reste plus de refuge que dans cette hypothèse qu’à certains jours il ne se faisait point d’oblation de l’encens par les mains du grand-Prêtre. LXXXIII. (Ib 21, 11.) Sur la succession du grand-Prêtre. – Il est interdit au grand-prêtre de prendre part aux funérailles de son père, Mais, demandera-t-on peut-être, comment pouvait-il, avant la mort de son père, jouir déjà du souverain sacerdoce, puisque la loi ne lui en donne que la succession ? Ce qui rendait nécessaire, même avant la sépulture du grand-prêtre, la transmission de son sacerdoce en d’autres mains, c’était le besoin d’entretenir l’encens perpétuel, charge imposée au grand-prêtre pour chaque jour ▼▼Id.
. Cependant il reste à savoir s’il devait endurer quelques jours de souffrances avant de mourir ; à moins qu’on ne tranche la question, en disant que les grands-Prêtres mouraient ordinairement tout d’un coup, sans avoir subi de maladie, suivant ce qui arriva, dit l’Écriture, à Aaron lui-même k. LXXXIV. (Ib 21, 15.) Les Sacrements visibles ne sont d’aucune utilité sans la grâce invisible qui sanctifie : mais non réciproquement. – Il est remarquable que Dieu, parlant du prêtre, dit fréquemment : « Je suis le Seigneur, qui le sanctifie », et qu’il donne aussi cet ordre à Moïse « Tu le sanctifieras l. » Comment donc et Moïse et le Seigneur sanctifient-ils ? Car Moïse ne tient pas la place de Dieu ; il prête son ministère à des sacrements sensibles ; mais la grâce du Seigneur opère invisiblement par l’opération du Saint-Esprit, en qui se trouve le trésor des sacrements visibles. Sans la sanctification produite invisiblement par la grâce, de quelle utilité seraient les sacrements qui tombent sous nos sens Aurait-on raison de demander si cette invisible sanctification n’est également d’aucune utilité, sans les sacrements visibles, qui sanctifient l’homme extérieurement ? Cette demande serait absurde. Car il serait plutôt permis de dire que la grâce n’existe pas en dehors des sacrements, que d’affirmer qu’elle existe en eux et qu’elle ne sert de rien, puisque toute l’utilité des Sacrements se tire de la grâce. Mais il faut voir encore en quel sens on a le droit de dire que la grâce ne peut exister sans les sacrements. Le baptême visible ne fut point profitable à Simon le magicien, parce que la sanctification invisible ne lui fut point accordée m ; mais ceux à qui la grâce invisible profita parce qu’elle leur fut donnée, avaient aussi reçu le baptême, et par conséquent des sacrements sensibles. Au contraire, quoique Moïse fût chargé de sanctifier visiblement les prêtres, nous ne voyons pas qu’il ait été sanctifié lui-même par l’huile sainte ou par les sacrifices : qui oserait cependant nier que cet homme, si éminent en grâce, eût été : sanctifié d’une manière invisible ? On peut en dire autant de Jean-Baptiste : car il apparut donnant le baptême avant de le recevoir n : Nous ne pouvons dès lors mettre en doute sa sainteté : et cependant nous ne voyons pas qu’elle lui ait, été conférée visiblement, avant qu’il administrât le baptême. La même chose peut se dire encore du larron en croix, ▼▼2 Rétract 55. n. 9.
à qui le Seigneur fit entendre ces paroles ; « Tu seras aujourd’hui avec moi dans le paradis p. » Car il ne put jouir d’une félicité si grande, avant d’avoir été sanctifié intérieurement. Il suit delà que la sanctification invisible a pu être accordée à quelques-uns et leur être profitable, sans les secours des sacrements visibles : ceux-ci d’ailleurs ont changé avec les temps, car autres étaient ceux d’alors, autres ceux d’aujourd’hui ; tandis que la sanctification visible, opérée par des Sacrements visibles, peut exister sans la sanctification intérieure, et alors ne peut être profitable. Il ne s’ensuit pas néanmoins que l’on doive faire peu de cas des sacrements visibles : car celui qui les méprise, ne peut-être aucunement sanctifié d’une manière invisible. C’est pour cela que Cornélius et ses compagnons, quoique sanctifiés déjà intérieurement par l’effusion du Saint-Esprit, n’en reçurent pas moins le baptême q : la sanctification visible ne parut point superflue, quoiqu’elle eût été précédée de la sanctification intérieure.
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