Exodus 33:2
CXLIX. (Ib 33, 1.) La colère de Dieu apaisée par l’amour de Moïse envers son peuple. – « Va, sors d’ici, toi et tort peuple, que tu as tiré de la terre d’Égypte. » Ces paroles : « toi et ton peuple que tu as tiré » paraissent empreintes de colère ; sans quoi Dieu aurait dit : toi et mon peuple, que j’ai tiré d’Égypte ; mais quand ils ont demandé une idole, voici ce qu’ils ont dit : « Moïse, cet homme qui nous a tiré de la terre d’Égypte, nous ne savons ce qu’il lui est arrivé a » leur faute a été d’attribuer à un homme leur délivrance. Elle leur est rappelée dans ces paroles : « Toi et ton peuple, que tu as tiré de la terre d’Égypte b » ce fut pour eux un crime, mais Moïse fut innocent. Car Moïse voulait qu’ils, missent leur espérance en Dieu, et non en lui-même et qu’ils se reconnussent redevables à la miséricorde du Seigneur de leur délivrance de la servitude : cependant tel est, par une grâce spéciale, le crédit de ce fidèle serviteur auprès de Dieu, que Dieu lui dit : « Laisse-moi, et dans ma colère je les briserai. » Laisse-moi, faut-il voir dans ces mots un commandement ou une sorte de prière ? Impossible, ce semble, d’admettre ni l’un ni l’autre. Car, si Dieu commande, alors le serviteur désobéit à son ordre ; et si l’on suppose que Dieu lui demande une grâce, une telle supposition est indigne de Dieu, puisqu’il pouvait, malgré.sonserviteur, exercer sa vengeance sur eux. Voici donc le sens qui se présente naturellement : Dieu a voulu nous marquer dans ces paroles l’avantage immense qui revint au peuple d’être tant aimé de cet homme, objet lui-même de tant d’amour de la part du Seigneur, et nous apprendre par là que quand nos péchés nous rendent indignes de son amour, nous pouvons nous relever auprès de lui, grâce aux mérites de ceux qu’il aime. Que veulent dire, en effet, ces paroles du Tout-Puissant à un homme:« Laisse-moi, et je les briserai », sinon : Je les briserais s’ils n’étaient aimés de toi ? – Laisse-moi signifie donc : Ne les aime plus, et je les briserai car ton amour est un obstacle. Il aurait fallu s’incliner devant cette parole du Seigneur : Ne les aime plus, si elle eût exprimé un ordre, au lieu d’être une simple indication de la cause qui retenait le bras de Dieu. Quoique Moïse emploie sa médiation, Dieu cependant ne laisse pas d’infliger un châtiment à son peuple. Car, pour inspirer à Moïse un tel amour, je ne sais comment Dieu les aimait lui-même plus secrètement, tout en leur adressant extérieurement des paroles menaçantes. CL. (Ib 33, 1-3.) Dieu par miséricorde s’éloigne de son peuple et il envoie un Ange. – « Va, dit le Seigneur à Moïse, toi et ton peuple, que tu as tiré de la terre d’Égypte, va dans la terre que j’ai promise avec serment à Abraham, à Isaac et à Jacob, en disant : Je la donnerai à votre race. » Il parle encore à Moïse, et tout-à-coup, se servant d’une forme de langage que les Grecs appellent apostrophe, il s’adresse directement au peuple en ces termes:« J’enverrai en même temps mon Ange devant toi et il chassera le Chananéen, l’Amorrhéen, le Chettéen, le Phéréséen, le Gergéséen, l’Evéen et le Jébuséen, et il t’introduira dans un pays ou coulent le lait et le miel. Car je ne monterai pas avec toi, parce que tu es un peuple à la tête dure, de peur que je ne t’extermine dans le chemin. » Profond mystère qui ravit et qui étonne ! Ne dirait-on pas que l’Ange, épargnant ce peuple dont la tête est dure, surpasse Dieu en miséricorde, puisque Dieu ne ferait pas grâce, s’il était au milieu d’eux ? Et cependant c’est Dieu qui, absent en quelque sorte du milieu de son peuple, quoiqu’il ne puisse en réalité être absent nulle part, déclare qu’il accomplira, par le ministère de son Ange, les serments qu’il a faits à leurs pères : il semble montrer par là que s’il agit de la sorte, ce n’est pas qu’ils soient dignes de ses bienfaits, mais parce qu’il en a fait la promesse à leurs ancêtres qui étaient des saints. Que signifie donc cette parole : que Dieu ne sera pas avec eux, parce qu’ils ont la tête dure, sinon que l’humilité et la piété ont seules droit à sa miséricorde et à sa bonté ? Quand Dieu est avec les hommes dont la tête est dure, il est pour punir et pour exercer ses vengeances ; quand il n’est pas de la sorte avec les méchants, c’est donc dans des vues de miséricorde : ce qui justifie ces paroles : « Détournez votre visage de mes péchés c. » En effet, si Dieu envisage le péché, il renverse le coupable : « Comme la cire fond devant le feu, ainsi les pécheurs périssent devant Dieu d. »
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