John 13:10
LE LAVEMENT DES PIEDS.
S’étant levé de table et ceint d’un linge, le Sauveur s’approcha de Pierre pour lui laver les pieds ; à cette vue, Pierre s’écria : Non, Seigneur ! – Alors, tu n’auras point de part avec moi.— Lavez-moi donc aussi la tête et les mains.— Celui qui est pur n’a besoin que de se laver les pieds.— En effet, si pures que soient notre conscience et nos intentions, nous touchons au monde, au moins par nos pieds, c’est-à-dire, nos affections, et il est impossible que ce contact ne nous communique pas quelque souillure. 1. Lorsque le Seigneur lavait les pieds des disciples, « il vint à Simon Pierre, et Pierre lui dit : Seigneur, vous me lavez les pieds ? » En effet, qui n’eût été effrayé de voir le Fils de Dieu lui laver les pieds ? Aussi quelle témérité, pour un serviteur, de résister à son maître, pour un homme, de résister à son Dieu ! Néanmoins, Pierre aima mieux prendre ce parti que de souffrir que son Seigneur et son Dieu lui lavât les pieds. Nous ne devons pas croire que seul entre les, autres il ait éprouvé cette répugnance et résisté, tandis que les autres avant lui auraient laissé faire le Sauveur sans lui opposer aucune résistance. Il serait plus facile, sans doute, d’entendre en ce sens les paroles de notre Évangile ; car après ces mots : « Jésus commença à laver les pieds de ses disciples et à les essuyer avec le linge dont il était ceint », il est dit : « Il vint donc à Simon Pierre », comme si Jésus avait déjà lavé les pieds à quelques-uns de ses disciples, et n’était venu qu’ensuite au premier d’entre eux. Tout le monde sait, en effet, que le premier des Apôtres était le bienheureux Pierre. Mais il faut bien se garder d’entendre ainsi ce que dit Jean. Ce n’est pas après les autres que Jésus est venu à Pierre ; mais c’est par lui qu’il commença. Quand il commença à laver les pieds des disciples, il vint à celui par lequel il commença, c’est-à-dire à Pierre, effrayé alors comme tout autre l’aurait été à sa place, Pierre lui dit : « Seigneur, vous me lavez les pieds ? » Qui êtes-vous et qui suis-je ? Il faut nous contenter d’imaginer ces choses sans nous hasarder à les dire. Car si nos pensées s’élevaient à la hauteur d’un pareil sujet, notre langue ne pourrait peut-être l’exprimer. 2. Mais « Jésus lui répondit et lui dit : Ce que je fais, tu ne le sais pas maintenant ; mais tu le sauras plus tard ». Et cependant, effrayé de la grandeur de ce que voulait faire son Maître, Pierre ne voulait pas le souffrir ; ignorant pourquoi il le faisait, il ne pouvait souffrir de voir Jésus-Christ s’abaisser et se mettre à ses pieds. « De l’éternité », lui dit-il, « vous ne me laverez les pieds ». Que veut dire : « de l’éternité ? » Jamais je ne le supporterai, jamais je ne le souffrirai, jamais je ne le permettrai ; car ce qui ne se fait jamais ne se fait pas de l’éternité. Alors, pour réduire ce malade qui résiste et lui montrer le péril où il s’expose, le Sauveur lui dit : « Si je ne te lave », lui dit-il, « tu n’auras point de part avec moi ». Il lui dit : « Si je ne te lave », et pourtant il ne s’agissait que des pieds ; c’est ainsi qu’on dit à un homme : Tu m’écrases, quoique le pied seul ait été foulé. Alors Pierre, troublé et par l’amour et par la crainte, mais craignant encore plus de se voir enlever Jésus-Christ que de le voir s’abaisser à ses pieds, lui dit : « Seigneur, non seulement les pieds, mais aussi les mains et la tête ». Après une telle menace, non seulement je ne refuse pas de vous donner à laver mes membres les plus bas, mais j’abaisse devant vous les plus élevés pour que vous les purifiiez. Il n’y a aucune partie de mon corps que je ne vous laisse laver, plutôt que de m’exposer à n’avoir point de part avec vous. 3. « Jésus lui dit : Celui qui est lavé, n’a besoin que de se laver les pieds, et il est pur tout entier ». Ici peut-être quelqu’un va s’émouvoir et s’écrier : Mais s’il est pur tout entier, à quoi bon lui laver les pieds ? Le Seigneur, assurément, savait ce qu’il voulait dire, quoique notre faiblesse ne puisse en pénétrer le secret. Cependant, autant que me le permettra ce qu’il a plu au Seigneur de m’apprendre de sa loi, selon mes forces, et selon mes facultés, j’essaierai, avec le secours de Dieu, de répondre à cette profonde question. D’abord ces deux expressions ne se contredisent pas, je vous le montrerai aisément. En effet, quelle règle serait blessée, si l’on disait : Il est pur tout entier, hors les pieds ? il serait sans doute plus conforme à l’élégance de dire : Il est pur tout entier, si ce n’est les pieds : l’un vaut l’autre. Le Seigneur dit donc : Il n’a besoin que de se laver les pieds ; « car il est pur a tout entier ». Tout entier, excepté les pieds, ou bien, si ce n’est les pieds, qu’il a besoin de laver. 4. Mais qu’est-ce que tout cela ? À quoi bon toutes ces recherches ? Qu’est-ce que cela ? Le Seigneur parle, la Vérité nous dit que celui-là même qui est pur a besoin de laver ses pieds. À votre avis, quel sens attacher à ces paroles ? Le voici : bien que l’homme soit lavé tout entier dans le baptême, et ici nous n’exceptons pas même ses pieds, et nous parlons de sa personne tout entière ; cependant, quand ensuite il vit au milieu des affaires humaines, il est obligé de marcher sur la terre. Alors les affections terrestres sans lesquelles il est impossible de vivre en cette vie mortelle sont comme les pieds par lesquels les choses humaines entrent en contact avec nous, et elles nous touchent ; de telle sorte que si nous disons n’avoir pas de péché, nous nous trompons nous-mêmes, et la vérité n’est point en nous a. Chaque jour celui qui intercède pour nous nous lave les pieds b ; et chaque jour nous avouons que nous avons besoin de nous laver les pieds, c’est-à-dire de redresser même nos démarches spirituelles, puisque dans l’oraison dominicale nous disons : « Pardonnez-nous nos offenses, comme nous aussi nous pardonnons à ceux qui nous ont offensés c ». En effet si, comme il est écrit, « nous confessons nos péchés », assurément celui qui a lavé les pieds de ses disciples « est fidèle et juste, il nous pardonnera nos péchés et nous purifiera de toutes nos iniquités d ». C’est-à-dire, il lavera jusqu’aux pieds avec lesquels nous avançons dans le chemin de la vie. 5. Ainsi l’Église que Jésus-Christ a purifiée dans le baptême de l’eau par sa parole est sans tache et sans ride e, non seulement dans ceux qui sortent de cette vie immédiatement après le baptême, et ne touchent point la terre qui pourrait souiller leurs pieds ; mais encore dans ceux à qui Dieu a fait la grâce de ne sortir de cette vie qu’après avoir lavé leurs pieds. Quoiqu’elle soit pure aussi dans ceux de ses membres qui demeurent ici-bas, puisqu’ils vivent dans la justice, ils ont cependant besoin de laver leurs pieds, parce qu’ils ne sont pas absolument sans péché. C’est pourquoi elle dit dans le Cantique des cantiques : « J’ai lavé mes pieds, comment les souiller encore f ? » C’est ce qu’elle dit lorsqu’elle est forcée de venir à Jésus-Christ et de fouler la terre pour arriver jusqu’à lui. Mais voici une autre difficulté. Jésus-Christ n’est-il point en haut ? n’est-il pas monté au ciel, et ne s’est-il pas assis à la droite du Père ? L’Apôtre ne nous crie-t-il pas : « Si donc vous êtes ressuscités avec Jésus-Christ, recherchez les choses du ciel où Jésus-Christ est assis à la droite de Dieu, cherchez ce qui est en haut, non ce qui est sur la terre g. ? » Comment donc, pour aller à Jésus-Christ, sommes-nous forcés de fouler la terre, puisqu’au contraire nous devons élever nos cœurs en haut, afin de pouvoir être avec lui ? Vous voyez, mes frères, que le peu de temps qui nous reste aujourd’hui ne me permet pas de traiter cette question. Si, par hasard, vous ne voyez guère combien elle a besoin d’être discutée à fond, moi, je ne le vois que trop ; je vous demande donc de vouloir bien la remettre à une autre fois, plutôt que de la traiter superficiellement ou trop rapidement ; pour être prolongée, votre attente ne sera pas trompée ; car le Seigneur qui me rend votre débiteur m’aidera à acquitter ma dette.CINQUANTE-SEPTIÈME TRAITÉ.
COMMENT L’ÉGLISE CRAINT DE SE SALIR LES PIEDS EN ALLANT À JÉSUS.
LA POUSSIÈRE DU MONDE.
L’Église craint pour ses prédicateurs, car ils peuvent se laisser entraîner à l’orgueil dans le ministère de la parole ; elle craint que ceux qui les écoutent ne voient leur charité s’affaiblir et s’éteindre au contact du monde ; c’est pourquoi elle voudrait que les premiers prédicateurs de l’Évangile, si purs et si saints, pussent revenir en ce monde pour la conduire, exempte de souillures, à Jésus-Christ. 1. Je n’ai pas oublié ma dette, voici le moment de m’acquitter. Daigne Celui qui m’a fait la grâce d’être votre débiteur, me donner de quoi payer ; car c’est le Seigneur qui m’a donné pour vous l’amour dont parle l’Apôtre : « Ne redevez rien à personne, sinon l’amour qu’on se doit les uns aux autres h ». Qu’il me donne donc les paroles dont je vois que je suis redevable envers mes bien-aimés. J’ai remis à aujourd’hui à vous expliquer de mon mieux comment on va à Jésus-Christ, même en marchant sur la terre, quoique l’Apôtre nous ordonne de rechercher ce qui est en haut et non ce qui est sur la terre i. Jésus-Christ, en effet, est, dans le ciel, assis à la droite du Père ; mais il est aussi ici, et c’est pour cela qu’au moment où Saul exerçait ses persécutions sur la terre, il lui dit : « Pourquoi me persécutes-tu j ? » Nous avons été amenés à cette question par l’examen de ce fait, que Notre-Seigneur lava les pieds à ses disciples, lorsque déjà ses disciples étaient purs et n’avaient besoin que de laver leurs pieds : il nous a semblé, alors, qu’il fallait en conclure que par le baptême l’homme est lavé tout entier ; mais que pendant tout le cours de cette vie terrestre, ses affections étant comme des pieds avec lesquels il foule la terre, cette vie lui fait contracter des souillures qui l’obligent à dire : « Pardonnez-nous nos offenses k ». Ainsi est-il purifié par Celui qui a lavé les pieds à ses disciples l, et qui ne cesse d’intercéder pour nous m. Alors se présentèrent à nous ces paroles du Cantique des cantiques, qu’emprunte l’Église quand elle s’écrie : « J’ai lavé mes pieds, comment les souiller encore ? » Tel est son langage lorsqu’elle veut aller au-devant de son Bien Aimé, le plus beau des enfants des hommes n, et lui ouvrir au moment où il vient vers elle frapper à sa porte et demande qu’on lui ouvre. De là est née cette question que nous n’avons pas voulu traiter l’autre jour, parce que le temps nous manquait pour le faire, et que nous avons remise à aujourd’hui : Comment l’Église peut-elle craindre en marchant vers Jésus-Christ, de souiller ses pieds qui ont été lavés par le baptême de Jésus-Christ ? 2. Voici, en effet, ce que dit l’Église : « Je dors et mon cœur veille : la voix de mon frère frappe à ma porte ». Jésus lui dit alors : « Ouvre-moi, ma sœur, ma chère parente, ma colombe, ma parfaite ; car ma tête est pleine de rosée et mes cheveux, des eaux de la nuit ». Et l’Église répond : « J’ai quitté ma tunique, comment la reprendre ? J’ai lavé mes pieds, comment les salir encore o ? » Sacrement admirable ! ineffable mystère ! elle craint donc de salir ses pieds en venant à Celui qui a lavé les pieds de ses disciples ? Oui, elle le craint, parce qu’il lui faut marcher sur la terre pour venir à Celui qui est encore sur la terre, puisqu’il n’abandonne pas ceux des siens qui sont ici. N’a-t-il pas dit lui-même : « Voilà que je suis avec vous jusqu’à la consommation des siècles p ? » N’a-t-il pas dit encore. « Vous verrez les cieux ouverts et les anges de Dieu monter et descendre vers le Fils de l’homme q ? » S’ils montent vers lui, c’est assurément parce qu’il est en haut ; mais comment descendent-ils vers lui, s’il n’est pas également ici-bas ? L’Église dit donc : « J’ai lavé mes pieds, comment les salir encore ? » Elle le dit en la personne de ceux qui, purifiés de toute souillure, peuvent dire : « Je désire être dégagé des liens du corps et me trouver avec Jésus-Christ ; mais il est plus utile pour vous que je demeure encore en cette vie r ». Elle le dit dans la personne de ceux qui prêchent Jésus-Christ et lui ouvrent la porte du cœur des hommes, afin qu’il y habite par la foi s. Elle le dit en eux lorsqu’ils délibèrent pour savoir s’ils se chargeront d’un ministère si grand qu’ils ne se croient pas capables de s’en acquitter sans commettre beaucoup de fautes ; ils craignent, en effet, qu’en prêchant aux autres, ils ne deviennent eux-mêmes réprouvés t. Il est bien plus sûr d’avoir à écouter la vérité, que d’avoir à la prêcher. Quand on ne fait que l’écouter, on garde l’humilité ; mais quand on la prêche, il est bien difficile que dans le cœur même du meilleur des hommes, il ne se glisse, pas quelque vaine complaisance capable de salir les pieds de son âme. 3. Aussi, comme dit l’apôtre Jacques : « Que tout homme soit prompt à écouter, mais lent à prendre la parole u ». Un autre homme de Dieu dit aussi : « Vous ferez retentir à mon oreille la joie et l’allégresse, et mes os brisés tressailliront v ». Voilà bien ce que j’ai dit : quand on n’a qu’à écouter la vérité, on garde l’humilité. Un autre dit encore : « L’ami de l’époux se tient debout et l’écoute, et il est rempli de joie à cause de la voix de l’Époux w ». Écoutons donc avec empressement la vérité qui nous parle intérieurement sans aucun bruit de parole. Elle se fait aussi entendre extérieurement par les lectures, les conférences, les prédications, les discussions, les préceptes, les consolations, les exhortations, même par les cantiques et les psaumes. Mais que ceux qui remplissent ces différents ministères craignent bien de salir leurs pieds, ce qui leur arrivera s’ils cherchent à plaire aux hommes et à s’attirer leurs louanges. Au reste, celui qui les entend avec plaisir et piété, n’a pas lieu de s’enorgueillir des travaux d’autrui, et ses os n’étant pas enflés d’orgueil, mais au contraire plongés dans l’humiliation, il éprouve une grande joie d’entendre la voix du Seigneur qui est la vérité. C’est pourquoi ceux qui savent écouter avec plaisir et en toute humilité, et qui mènent une vie tranquille dans cette étude si douce et si salutaire, l’Église se réjouit en eux et dit : « Je dors et mon cœur veille ». Que veut dire : « Je dors et mon cœur veille », sinon : Je suis en repos pour mieux écouter ? mon repos n’est point employé à nourrir ma paresse, mais à recevoir les leçons de la sagesse. « Je dors et mon cœur veille ». Je suis en repos et je reconnais que vous êtes le Seigneur x, parce que « la sagesse viendra au docteur de la loi au temps du repos, et celui qui s’agite peu acquerra la sagesse y ». « Je dors et mon cœur veille ». Je me tiens en repos du côté des affaires humaines, et mon âme s’applique à l’amour des choses divines. 4. Mais pendant que l’Église se réjouit et se complaît dans ceux de ses enfants qui jouissent humblement et doucement de ce repos, elle entend heurter à la porte Celui qui dit : « Ce que je vous dis dans les ténèbres, dites-le dans la lumière, et ce qui vous a été dit à l’oreille, prêchez-le sur les toits z ». Sa voix se fait donc entendre à la porte, et il dit« Ouvre-moi, ma sueur, ma chère parente, ma colombe, ma parfaite ; car ma tête est pleine de rosée et mes cheveux des eaux de la nuit ». Comme s’il disait : Tu te livres au repos, et pour moi la porte est fermée ; tu t’appliques au repos d’un petit nombre, et la charité d’un grand nombre s’éteint dans l’iniquité qui abonde aa ; car la nuit, c’est l’iniquité. La rosée et les gouttes d’eau, ce sont les chrétiens qui se refroidissent et qui tombent, et qui font refroidir la tête de Jésus-Christ, c’est-à-dire qui font que Dieu n’est plus aimé. Car la tête de Jésus-Christ, c’est Dieu ab. Ils sont placés dans les cheveux, c’est-à-dire admis par tolérance à la participation extérieure des sacrements ; mais ils ne pénètrent pas jusqu’à l’intérieur et à l’esprit. Jésus frappe donc pour tirer les saints qui reposent en leurs loisirs, et il s’écrie : « Ouvre-moi », toi qui es devenue « ma sœur » par mon sang, « ma proche parente » par mon approche, « ma colombe » par la plénitude de mon esprit, « ma parfaite » par ma parole que tu as apprise en entier dans ton repos, ouvre-moi donc, prêche-moi. Comment entrerai-je vers ceux qui m’ont fermé leur porte, si personne ne m’ouvre ? et comment entendront-ils, si personne ne prêche ac ? 5. De là vient que ceux mêmes qui aiment le repos des saintes études, et refusent de s’exposer aux contre-temps de la vie active, parce qu’ils se sentent peu propres à s’acquitter sans reproche des devoirs qu’elle impose ; de là vient que ceux-là voudraient voir, si c’était possible, les saints Apôtres et les premiers prédicateurs de la vérité revenir de l’autre monde, pour s’opposer au torrent d’iniquité qui éteint l’ardeur de la charité ; mais dans la personne de ceux qui sont sortis de cette vie et se sont dépouillés du vêtement de leur corps, l’Église (car ils ne sont pas sortis de son sein), l’Église répond : « J’ai quitté ma tunique, comment la revêtir de nouveau ? » Oui, ils la reprendront cette tunique, et dans ceux qui en sont dépouillés l’Église sera de nouveau revêtue de chair ; mais ce ne sera pas dans cette vie où il faudrait réchauffer ceux qui sont froids : ce sera seulement quand les morts ressusciteront. Souffrante et gênée par suite du manque de prédicateurs, l’Église se rappelle ceux de ses membres qui étaient si purs dans leur doctrine, si saints dans leurs mœurs, mais qui maintenant sont sortis de ce inonde ; elle gémit et dit : « J’ai quitté ma tunique, comment m’en revêtir de nouveau ? » Ceux de mes membres qui savaient si bien ouvrir à Jésus-Christ, en prêchant l’Évangile, comment pourraient-ils maintenant reprendre les corps dont ils ont été dépouillés ? 6. Elle tourne ensuite ses regards vers ceux qui, tant bien que mal, peuvent prêcher, convertir et gouverner les peuples, et ainsi ouvrir à Jésus-Christ, mais qui craignent de pécher dans un ministère si difficile ; et elle leur dit : « J’ai lavé mes pieds, comment les salir encore ? » Celui, en effet, qui ne pèche point en parole, est un homme parfait. Où est l’homme parfait ? Où est celui qui ne pèche point au milieu d’un pareil torrent d’iniquité, dans un refroidissement si général de la charité ? « J’ai lavé mes pieds, comment les salir encore ? » Je lis et je vois : « Mes frères, ne faites pas comme plusieurs, ne cherchez pas à devenir maîtres, parce que vous vous exposez à un jugement plus sévère ; tous, en effet, nous faisons beaucoup de fautes ad ». J’ai lavé mes pieds, comment les salir encore ? » Mais je me lève et j’ouvre. Jésus, lavez-les ; « pardonnez-nous nos offenses », parce que notre charité n’est pas éteinte ; car « nous aussi nous « pardonnons à ceux qui nous ont offensés ae. Quand nous vous Écoutons, nos os humiliés tressaillent de joie avec vous jusqu’au ciel af ; mais quand nous vous prêchons, nous foulons la terre, pour aller vous ouvrir ; c’est pourquoi si l’on nous blâme nous tombons dans le trouble ; les louanges nous enflent d’orgueil. Lavez donc nos pieds qui, auparavant, étaient purs, mais qui se sont salis quand nous avons marché sur la terre pour aller vous ouvrir. Que ces paroles vous suffisent pour aujourd’hui, mes bien chers frères. Si nous avons péché en ne disant pas les choses comme il fallait les dire ; ou bien, si nous avons pris plaisir plus qu’il ne fallait à vos louanges, obtenez-nous de Dieu par vos prières qui lui sont si agréables, qu’il daigne laver les pieds de notre âme.CINQUANTE-HUITIÈME TRAITÉ.
DEPUIS LE PASSAGE OU NOTRE-SEIGNEUR DIT : « ET VOUS, VOUS ÊTES PURS, MAIS NON PAS TOUS », JUSQU’À CET AUTRE : « JE VOUS AI DONNÉ L’EXEMPLE, AFIN QUE, COMME J’AI FAIT POUR VOUS, VOUS FASSIEZ VOUS AUSSI ». (Chap 13, 10-15.)
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