‏ Matthew 13:57

CHAPITRE XLII. JÉSUS DANS SA PATRIE.

89. On lit ensuite dans saint Matthieu : « Après que Jésus eut achevé ces paraboles, il partit de là, et, venant en son pays, il les instruisait dans leurs synagogues », et le reste, jusqu’à cet endroit : « Or il ne fit que peu de miracles parmi eux à cause de leur incrédulité a. » Le texte n’oblige pas de regarder ce fait comme ayant eu lieu immédiatement après les paraboles qui précèdent. D’ailleurs saint Marc en relate un autre et le même que saint Luc, à la suite de ces paraboles, et sa transition même porte à croire qu’aux paraboles a succédé d’une manière immédiate non pas ce qui vient dans le récit de saint Matthieu, mais ce que disent saint Marc et saint Luc, de la barque sur laquelle dormait Jésus et du miracle de l’expulsion des démons au pays des Géraséniens b ; deux faits que saint Matthieu a exposés plus haut quand le souvenir lui en est revenu c. Voyons donc si pour ce que dit le Seigneur, et pour ce qui fut dit dans sa patrie, saint Matthieu est d’accord avec saint Marc et saint Luc. Car pour saint Jean, c’est dans des circonstances bien différentes d qu’il place des traits analogues à ceux que rappellent ici les trois autres évangélistes.

90. Or, le récit de saint Marc est ici presque absolument le même que celui de saint Matthieu. Toute la différence, c’est que Jésus y est appelé charpentier et fils de Marie par ses compatriotes e; tandis que selon saint Matthieu on l’appelait le fils du charpentier. Mais cela ne doit pas nous surprendre. Il put à la fois être appelé charpentier et le fils du charpentier ; puisque s’ils le croyaient charpentier, c’est qu’ils le regardaient comme le fils d’un charpentier. Mais saint Luc expose le même fait avec beaucoup plus de détails ; et nous le trouvons dans son récit un peu après ce qui regarde le baptême et la tentation du Seigneur ; et sans aucun doute il relate d’avance ce qui arriva plus tard, à la suite de beaucoup d’autres choses. Ceci nous donne lieu de faire une remarque très-importante pour cette grande question de l’accord des Évangélistes, que nous avons entrepris de résoudre avec l’aide de Dieu : C’est que ce n’est pas pour avoir ignoré ni les faits ni leur enchaînement naturel qu’ils en ont omis quelques-uns ou qu’ils ont suivi de préférence l’ordre de leurs souvenirs. Cette remarque est justifiée avec éclat par le texte de saint Luc ; car sans avoir fait nulle mention des miracles de Jésus à Capharnaüm, il rapporte, ce que nous examinons maintenant, comment les compatriotes du Sauveur admiraient sa vertu merveilleuse et méprisaient la bassesse de sa naissance. D’après lui en effet Jésus leur parlait ainsi : « Vous me direz, sans doute : Médecin, guéris-toi toi-même ; ces grandes choses faites à Capharnaüm et dont le bruit est arrivé jusqu’à nous, fais-les ici encore, dans ta patrie », et cependant le même saint Luc n’a jusque-là rien raconté des prodiges opérés à Capharnaüm. Comme le passage n’est pas long, mais très-facile à comprendre. Et d’ailleurs très-nécessaire, nous le mettons tout entier sous les yeux du lecteur avec la transition qui l’amène. Après avoir parlé du baptême et de la tentation du Sauveur, l’évangéliste poursuit ainsi : « Or toute tentation achevée, le diable s’éloigna de lui pour un temps. Alors Jésus par la vertu de l’Esprit revint en Galilée, et sa renommée se répandit dans tout le pays. Il enseignait dans leurs synagogues, et tout le monde lui donnait de grandes louanges. Étant venu ensuite à Nazareth, où il avait été élevé, il entra selon sa coutume dans la synagogue le jour du sabbat et il se leva pour lire. Ou lui présenta le livre des prophéties d’Isaïe, et l’ayant ouvert il trouva l’endroit où il était écrit : L’Esprit du Seigneur est sur moi ; c’est pourquoi il m’a consacré par son onction et m’a envoyé évangéliser les pauvres, annoncer aux captifs leur délivrance, aux aveugles qu’ils vont recouvrer la vue, mettre en liberté ceux qui sont accablés sous les fers, publier l’année des miséricordes du Seigneur et le jour de la rétribution. Ayant replié le livre, il le rendit au ministre et s’assit. « Et tous dans la synagogue avaient les yeux arrêtés sur lui. Or il commença à leur dire : « Ce que vous entendez aujourd’hui de vos oreilles est l’accomplissement de ces paroles de l’Écriture. Et tous lui rendaient témoignage, et dans l’étonnement où ils étaient des paroles pleines de grâce qui sortaient de sa bouche, « ils disaient : N’est-ce pas là le fils de Joseph ? Alors il leur dit : Vous m’appliquerez sans doute ce proverbe : Médecin, guéris-toi toi-même ; et vous me direz : Les grandes choses faites à Capharnaüm et dont le bruit est arrivé jusqu’à nous, fais-les ici encore, dans ta patrie f. » Nous laissons ce qui termine cette partie du récit de l’évangéliste. N’est-il pas évident qu’il a sciemment anticipé ce fait dans son récit ? Car il connaissait certainement les merveilles opérées à Capharnaüm, puisqu’il en parle ; puisque d’ailleurs il sait qu’il ne les a pas rapportées. Il est encore si près du baptême de Jésus qu’un pareil oubli n’est pas vraisemblable ; car depuis ce baptême il n’a presque rien dit encore.

Copyright information for FreAug