‏ Matthew 19:6

CHAPITRE LXII. EST-IL PERMIS DE RENVOYER SA FEMME ?

120. Saint Matthieu continue ainsi : « Il arriva, lorsque Jésus eut achevé ces discours, qu’il partit de Galilée et vint aux confins de la Judée, au-delà du Jourdain ; et de grandes troupes le suivirent, et il les guérit. Et les Pharisiens s’approchèrent de lui pour le tenter disant. Est-il permis à un homme de renvoyer sa femme pour quelque cause que ce soit ? » et le reste, jusqu’à ces mots : « Que celui qui peut comprendre comprenne a. » Saint Marc rappelle les mêmes faits dans le même ordre b. Voici comment il faut examiner ce passage, pour n’y voir aucune contradiction. D’après saint Marc, de Seigneur demande aux Pharisiens ce que Moïse leur a ordonné, et ceux-ci lui répondent que l’acte de répudiation leur a été permis : dans saint Matthieu le Seigneur cite d’abord les paroles de la Loi, pour montrer que Dieu à uni l’homme et la femme et que pour cette raison nul ne peut les séparer, puis les autres lui adressent cette question : « Pourquoi donc Moïse a-t-il commandé de lui donner un acte de répudiation et de la renvoyer ? » Alors il ajoute : « C’est à cause de la dureté de vos cœurs que Moïse vous a permis de renvoyer vos femmes, mais au commencement il n’en fut pas ainsi. » Saint Marc n’a point omis cette réponse du Seigneur, mais elle vient seulement après qu’on a répondu à sa question sur l’acte de divorce.

121. Dans quel ordre, pour l’intelligence du récit, faut-il disposer ces différentes expressions ? N’ont-ils interrogé le Seigneur, qu’après qu’il eut condamné la séparation en s’appuyant sur le témoignage de la Loi ? est-ce alors qu’ils l’ont questionné sur l’acte de répudiation qu’avait permis Moïse, après avoir écrit toutefois que Dieu avait uni l’homme et la femme c ? Ou bien ont ils eux-mêmes parlé de cet acte quand le Seigneur leur demanda ce qu’avait commandé Moïse ? Ceci importe peu à la vérité ici établie. En effet, le Seigneur ne voulait point leur expliquer pourquoi Moïse avait accordé ce droit, avant qu’ils ne lui en eussent eux-mêmes parlé, et cette intention, saint Marc la fait connaître par la question qu’il lui fait poser : pour eux leur droit était de s’appuyer sur l’autorité de Moïse qui avait ordonné l’acte de répudiation, afin de surprendre Jésus lorsqu’il condamnerait la séparation des époux : voilà ce qu’ils se proposent quand ils s’approchent de lui pour le tenter. Cette intention est si nettement exprimée en saint Matthieu, qu’il ne dit rien de la question qui leur est faite, mais ils provoquent eux-mêmes une explication sur la permission donnée par Moïse afin de pouvoir accuser le Seigneur lorsqu’il condamnera la séparation des époux. Puisque les expressions, dans chaque évangéliste, rendent exactement la pensée des interlocuteurs, et elles ne doivent tendre qu’à ce but, il est de nulle importance que l’ordre dans les différents récits ne soit point le même, puisque ni l’un ni l’autre ne s’écarte de la vérité.

122. Ou peut aussi expliquer ce passage de la manière suivante : après avoir été questionné sur le renvoi de la femme, comme saint Marc le raconte, le Seigneur de son côté leur demande ce qu’a ordonné Moïse. Quand ils ont répondu que Moïse a permis de donner l’acte de répudiation et de la renvoyer, alors il s’appuie sur la Loi donnée par Moïse pour expliquer comment Dieu institua le mariage de l’homme et de la femme ; il dit alors ce qui est écrit en saint Matthieu : « N’avez-vous pas lu que celui qui fit l’homme au commencement les fit mâle et femelle ? », etc. À ces mots ils insistent de nouveau sur ce qu’ils ont répondu à sa première question : « Pourquoi donc, disent-ils, Moïse a-t-il ordonné de lui donner l’acte de répudiation et de la renvoyer ? » Jésus alors en découvre la cause dans la dureté de leur cœur. Saint Marc, pour abréger, exprime d’abord cette idée comme si elle eût été donnée immédiatement après leur première réponse, que saint Matthieu a divisée ; et il ne jugeait point que la vérité dût souffrir, quelle que fût la place qu’occuperait cette raison, puisque les paroles qui la provoquaient étaient répétées et que d’ailleurs le Sauveur l’avait exprimée en termes formels.
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