Matthew 27:51-54
CHAPITRE XIX. LE VOILE DÉCHIRÉ.
56. « Et voici, dit saint Matthieu, que le voile du temple se déchira en deux parties, de haut en bas a. » Saint Marc dit de même : « Et le voile du temple se déchira en deux, depuis le haut jusqu’en bas b. » Saint Luc dit aussi Et le voile du temple se déchira dans le milieu c ; » mais cet évangéliste ne suit pas le même ordre que les autres. En effet, voulant ajouter le miracle au miracle, après avoir dit que le soleil s’obscurcit, il ajoute aussitôt : « Et le voile du temple se rompit par le milieu. » Il anticipe ainsi sur ce qui se passa au moment de la mort du Sauveur et dont il fait une récapitulation générale, embrassant tout à la fois et le breuvage de vinaigre, et le grand cri et la mort elle-même, toutes choses qui arrivèrent avant le déchirement du voile du temple, après la diffusion des ténèbres. En effet, saint Matthieu après avoir dit : « Jésus jetant de nouveau un grand cri rendit l’esprit », ajoute aussitôt : « Et voici que le voile du temple se rompit ; » c’était affirmer assez clairement que le voile ne se brisa que quand Jésus eut rendu l’esprit. S’il n’eût pas dit : « Et voici ; » s’il se fût contenté de dire : Et le voile du temple se rompit », on ne saurait si le texte de saint Matthieu et de saint Marc ne sont pas une simple récapitulation, tandis que saint Luc aurait suivi l’ordre naturel, ou vice versa ; mais ces expressions dissipent tous les doutes.CHAPITRE XX. DE L’ÉTONNEMENT DU CENTURION.
57. Saint Matthieu continue : « Et la terre trembla, des rochers se fendirent, des sépulcres s’ouvrirent, et les corps de plusieurs saints qui y étaient endormis ressuscitèrent ; et étant sortis de leurs tombeaux ils vinrent à la ville sainte après sa résurrection et se firent voir de plusieurs. » Quoique saint Matthieu soit le seul qui nous rapporte ces circonstances, nous n’avons pas à craindre qu’il soit en contradiction avec les autres évangélistes. Il ajoute : « Quant au Centurion et ceux qui gardaient Jésus avec lui, à la vue du tremblement de terre et de tout ce qui se passait ils éprouvèrent une grande crainte et s’écrièrent : Il était vraiment le Fils de Dieu d. » Saint Marc s’exprime ainsi : « Le Centurion, qui se tenait en face, voyant que Jésus était mort en jetant un aussi grand cri, se dit : Vraiment cet homme était le Fils de Dieu e. » Saint Luc : « Le Centurion voyant ce qui s’était passé, glorifia Dieu en disant : Vraiment cet homme était un juste f. » D’après saint Matthieu la cause de l’admiration du Centurion et de ceux qui l’accompagnaient ce fut le tremblement, de terre ; d’après saint Luc, ce fut d’entendre Jésus pousser un grand cri en expirant, ce qui montrait que le moment de sa mort était en son plein pouvoir. Or, je dis qu’il n’y a en tout cela aucune ombre de contradiction ; en effet, saint Matthieu ne mentionne pas seulement le tremblement de terre, il ajoute : « Et ce qui s’était passé. » Or rien ne pouvait mieux confirmer le récit de saint Luc, puisque si, d’après ce dernier, le Centurion admira la mort du Sauveur, c’est que cette mort devait compter parmi les merveilles qui s’étaient passées. Saint Matthieu ne détaille pas tous ces prodiges, admirés par le centurion et par les soldats ; mais les narrateurs n’étaient-ils pas libres de signaler à leur gré tel miracle plutôt que tel autre ? Quelle contradiction peut-il y avoir si l’un nous parle de tel prodige et l’autre de tel autre, puisque ce sont tous ces prodiges qui ont soulevé l’admiration ? Selon saint Matthieu le centurion dit : « Vraiment il était le Fils de Dieu ; » selon saint Marc, il se serait écrié : « Cet homme était vraiment le Fils a de Dieu. » Mais il est facile de remarquer qu’il n’y a pas plus de contradiction ici que nous n’en avons trouvé dans beaucoup de passages examinés précédemment et que peut se rappeler le lecteur ; que ces paroles expriment la même pensée et qu’elle ne change pas, quoiqu’un des évangélistes dise cet homme, tandis que l’autre ne le dit pas. Mais n’y a-t-il pas une opposition véritable entre ces deux évangélistes et saint Luc qui prête au Centurion les paroles suivantes : « Celui-ci était juste », sans lui faire dire qu’il était le Fils de Dieu ? Et d’abord rien n’empêche de croire que le Centurion a réellement dit du Sauveur qu’il était juste et aussi Fils de Dieu, quoique chaque évangéliste ait omis de citer ces paroles tout entières. Ou bien on peut répondre aussi que saint Luc a voulu donner la raison qui a fait dire au Centurion que Jésus était Fils de Dieu. Peut-être en effet qu’il ne le croyait pas égal à son Père et qu’il ne voyait en lui qu’une filiation spirituelle et morale à cause de sa sainteté même, comme on dit de beaucoup de justes qu’ils sont les enfants de Dieu. D’un autre côté, saint Luc par cette expression générale : « Le Centurion voyant ce qui s’était passé », résume tous les prodiges qui venaient de s’accomplir à l’heure même. Si donc il n’en spécifie qu’un, c’est qu’il les regarde tous comme ne formant qu’un seul et même tout. Saint Matthieu adjoint au Centurion les soldats qui l’accompagnaient, tandis que les autres gardent le silence sur ce point ; mais nous avons déjà dit, que sans impliquer aucune contradiction, l’un peut dire ce que l’autre tait. Enfin saint Matthieu dit des assistants qu’ils furent saisis d’une grande crainte, tandis que saint Luc dit du Centurion qu’il glorifia Dieu ; mais il est facile de comprendre que c’est par sa crainte elle-même, qu’il glorifia Dieu.
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