Genesis 50
4. Par cette recommandation il leur procure une consolation incomparable. Car ils pensaient que le juste ne leur aurait pas prescrit ce soin, s’il n’avait été certain de leur futur retour et de la cessation de leur servitude en Égypte. Il fixe ensuite le lieu. Dans la caverne qui est dans le champ d’Ephron Héthéen. Et ayant dit ces paroles, il cessa de donner des ordres à ses fils. Et Jacob ayant levé ses pieds au-dessus du lit, mourut et se réunit à son peuple. Considérez comme la fin du juste est elle-même admirable. En effet, après avoir donné ses instructions à ses enfants, il élève ses pieds au-dessus du lit : on dirait que cela lui cause de la joie. Ainsi, après avoir fait toutes ses recommandations, il élève ses pieds, c’est-à-dire, les étend, les allonge : puis il meurt, et se réunit à son peuple. Et Joseph se jetant sur la face de son père, pleura sur lui et le baisa. Voyez-vous cette tendresse filiale ? Voyez-vous cette ardente affection ? Quand l’âme a quitté le corps, Se jetant sur la face de son père il le baisa et pleura sur lui. Après cela Joseph se hâte d’accomplir les prescriptions paternelles.Il ordonna aux embaumeurs d’embaumer son pire. (Id. 2) Et il pleura durant les quarante jours que dura l’embaumement, et l’Égypte soixante-dix jours durant. (Id 13) Et quand toutes les cérémonies furent terminées, alors il fit connaître à Pharaon et à ses gens les volontés de son père, et dit : Mon père m’a fait jurer, disant : Le sépulcre, que je me suis creusé dans la terre de Chanaan est le lieu où tu m’enseveliras. Maintenant donc, je partirai avec mon père, je l’ensevelirai, et je reviendrai. (Id. 5) Il convient que ses ordres soient exécutés par moi. Quand j’aurai fait selon sa volonté, je reviendrai. Là-dessus Pharaon permit. Et Joseph partit pour ensevelir son père, et avec lui partirent tous les serviteurs de Pharaon. (Id. 7) Et ils quittaient leur famille, leurs bœufs et leurs brebis. (Id. 8) Et avec lui partirent des chars et des cavaliers, et ce fut une invasion très-considérable. (Id. 9) Voyez quel empressement montrent les Égyptiens, afin d’honorer Joseph : ils l’accompagnent en si, grand nombre que c’est une véritable invasion : Et parvenus à un certain endroit, ils se frappèrent longuement et violemment en signe de douleur. Et il donna à son père un deuil de sept jours. (Id 11) Et les habitants de Chanaan virent cela et dirent : Les Égyptiens sont en grand deuil. De là le nom Deuil d’Égypte, donné à ce lieu, qui est au-delà du Jourdain. Mais toi, mon cher auditeur, en écoutant ce récit, garde-toi de n’y accorder qu’une attention distraite : songe à l’époque où ces choses se passaient, et décharge Joseph de toute imputation. Les portes de l’enfer n’étaient pas encore brisées, les chaînes de la mort n’étaient pas déliées, la mort n’était point réputée un sommeil : voilà pourquoi, craignant la mort, on agissait de la sorte. Aujourd’hui, par la grâce de Dieu, la mort étant devenue un sommeil, le trépas un assoupissement, la résurrection une certitude, nous nous réjouissons, nous tressaillons d’allégresse comme au passage d’une vie dans une autre. Et que dis-je, d’une vie dans une autre ? D’une vie inférieure à une vie meilleure, d’une vie fugitive à une vie éternelle, d’une vie terrestre à une vie céleste. Enfin, tout étant accompli, Joseph retourna en Égypte, avec ses frères et ceux qui l’avaient accompagné. Considérez ici la pusillanimité des frères de Joseph, et la crainte qui agitait leur âme. Les frères de Joseph, voyant que leur père était mort, dirent : Puisse Joseph ne pas nous garder rancune, ne pas nous rendre ce qu’il nous doit, tous les maux que nous lui avons faits ! (Id 15) L’effroi tourmente leur cœur : déchirés de remords, ils ne savent que faire. Voyant donc que leur père n’était plus ; et redoutant de la part de Joseph une juste vengeance, ils se présentèrent devant lui, et dirent : Ton père nous a fait jurer avant de mourir, disant : Dites et Joseph : Pardonne-leur leur injustice et leur faute. (Id 16) Remarquez de nouveau comment ils s’accusent eux-mêmes. Observez combien est accablant le témoignage de la conscience. Vous avez beau faire : vous savez que vous avez commis l’injustice, le péché, que vous vous êtes rendus coupables de mauvaises actions. Et maintenant accueille l’iniquité des serviteurs du Dieu de ton père. Vous avez vu comment, c’est sans y être forcés qu’ils s’accusent et disent : Ton père a dit : Pardonne-leur le mal qu’ils t’ont fait, et accueille l’iniquité des serviteurs du Dieu de ton père. Mais cet homme admirable, excellent, est si éloigné de garder aucun souvenir des traitements qu’il a subis, que ces paroles l’émeuvent : Et Joseph pleura, tandis qu’ils lui parlaient. Et ils vinrent lui dire : Nous sommes tes serviteurs. (Id 18) Voyez ce que c’est que la vertu, à quel point elle est forte et irrésistible, et quelle est la faiblesse du vice. En effet, voici que cet homme tant éprouvé est devenu souverain, et que ceux qui avaient traité leur frère de la sorte, demandent à être les serviteurs de celui qu’ils ont vendu comme esclave. 5. Mais soyez attentifs à la patience de Joseph vis-à-vis de ses frères ; voyez comment il n’omet rien pour les consoler, leur persuader qu’ils n’ont eu aucun tort envers lui. Ne craignez rien : J’appartiens à Dieu. (Id 19) Vous avez eu de mauvais desseins contre moi, mais Dieu a changé ce mal en bien, afin de faire advenir ce qui se réalise aujourd’hui, qu’un peuple nombreux soit nourri. (Id 20) N’ayez pas peur, sortez d’inquiétude : J’appartiens à Dieu, et j’imite mon Maître : je m’efforce d’obliger ceux qui m’ont causé des maux extrêmes : Car j’appartiens à Dieu. Puis, voulant montrer quelle bienveillance Dieu lui accorde, il ajoute : Votre conduite envers moi était dictée par de mauvais desseins, mais Dieu a changé pour moi ce mal en bien. De là ces mots de Paul : Ceux qui aiment Dieu voient tout conspirer à leur bien. (Rom 8,28) Tout, qu’est-ce à dire ? C’est-à-dire même les contrariétés, les sujets apparents d’affliction, il change tout cela en bien : c’est ce qui arriva pour cet homme incomparable. La conduite de ses frères fut le principal motif de son élévation, grâce à la puissance, à la sagesse de Dieu qui changea en prospérités toutes ses infortunes. Afin qu’un peuple nombreux soit nourri. Ce n’est pas nous seulement qu’il a eus en vue dans ce changement, c’est encore la subsistance de tout ce peuple. Et il leur dit : Ne craignez rien : je vous nourrirai, vous et vos familles. Et il les exhorta, et il parla à leur cœur. (21) Que craignez-vous désormais ? Je pourvoirai à votre subsistance et à celle de tous les vôtres. Et il les exhorta, et il parla à leur cœur. Il ne se borne pas à les exhorter, il y met tant de zèle qu’il dissipe tout leur chagrin. Et Joseph habita en Égypte, lui et ses frères, et toute la maison de son père. (Id 22) Et Joseph villes enfants d’Ephraïm jusqu’à la troisième génération. (Id 23) Et Joseph parla à ses frères, disant : Je meurs. Dieu vous visitera, et vous emporterez avec vous mes os hors de ce pays. (Id 24) Ainsi, comme son père, il recommande qu’on emporte ses restes. Et voyez comment afin de les rassurer encore, de les affermir dans l’espérance du retour, après leur avoir prédit d’abord qu’ils retourneront au pays, il dit ici : Vous emporterez avec voies. En partant vous emporterez avec vous mes os. Il n’agissait pas ainsi par caprice ni sans motif, mais pour deux raisons : d’un côté, parce qu’il craignait que les Égyptiens, gardant le souvenir de ses nombreux bienfaits, et fidèles à leur usage de diviniser des hommes, ne commissent l’impiété pour honorer le corps d’un juste ; d’autre part, afin que les siens fussent bien assurés qu’ils retourneraient de toute manière au pays. En effet, si cela n’eût été certain, il ne leur eût pas ordonné de ramener ses ossements. – Spectacle étrange et nouveau ! Celui qui nourrissait en Égypte tout Israël, c’était celui-là même qui donnait le signal du retour, qui introduisait ce peuple dans la terre promise. Et Joseph mourut âgé de cent dix ans. (Id 25) A quoi bon nous dire son âge ? Afin de nous instruire du temps durant lequel il gouverna l’Égypte. Il était arrivé dans ce pays à l’âge de dix-sept ans ; à trente ans il parut devant Pharaon, et expliqua les songes. Durant les quatre-vingts années qui suivirent, il fut le maître absolu de l’Égypte. Vous voyez s’il fut largement dédommagé, magnifiquement récompensé de ses peines. Pendant treize années il lutta contre les tentations, esclave, calomnié, en butte aux souffrances de la captivité. Et lorsqu’il eut tout supporté avec courage et avec des actions de grâces, il fut généreusement rétribué même en ce monde. – Réfléchissez en effet qu’en échange de quelques années de servitude et de captivité, il gouverna un royaume quatre-vingts années durant. – Mais que la foi dirigeait toutes ses actions, que c’est elle encore qui lui inspira ses dernières volontés au sujet du transport de ses os, c’est Paul qui nous l’apprend, en disant ; C’est par la foi que Joseph mourant parla du départ des enfants d’Israël. (Heb 11,22) Et il ne s’en tient pas là ; afin de nous révéler le motif pour lequel il recommande que ses os fussent transportés, il ajoute : Et qu’il fit des dispositions touchant ses os. Peut-être ai-je parlé trop longtemps ; excusez-moi. Parvenu à la fin du livre, nous avons voulu le terminer aujourd’hui en même temps que notre discours, et ajouter à cela notre exhortation habituelle de garder souvenir de nos paroles, de chercher à imiter la vertu de ces justes, leur patience à l’égard de leurs oppresseurs, leur longanimité vis-à-vis de leurs persécuteurs, leur chasteté à toute épreuve. C’est par là, en effet, que notre juste s’est concilié toutes les faveurs d’en haut. Par conséquent, si nous voulons nous assurer le même appui, n’estimons rien tant que la vertu. De cette manière, nous nous concilierons la grâce de l’Esprit, nous passerons dans le calme la vie présente, et nous serons admis au partage du bonheur futur, auquel puissions-nous tous parvenir, par la grâce et la bonté de Notre-Seigneur Jésus-Christ, avec qui, gloire, puissance, honneur, au Père et au Saint-Esprit, maintenant et toujours, et dans les siècles des siècles ! Ainsi soit-il.
Copyright information for
FreChry