Hebrews 2
HOMÉLIE III.
MAIS APRÈS AVOIR INTRODUIT SON PREMIER-NÉ SUR LA TERRE, IL DIT : QUE TOUS LES ANGES DE DIEU L’ADORENT ET L’Écriture DIT DES ANGES : DIEU SE SERT DES ESPRITS POUR EN FAIRE SES ANGES, ET DES FLAMMES ARDENTES POUR EN FAIRE SES MINISTRES. MAIS IL DIT AU FILS. VOTRE TRÔNE, O DIEU, SERA UN TRÔNE ÉTERNEL. (I, 6, 7, JUSQU’A II, 4)
Analyse.
- 1. Dieu ne parle pas à son Fils comme à ses anges. – Paul réfute les juifs, Paul de Samosate, les ariens, Marcellus, Sabellius et Marcion.
- 2. Gloire du Christ. – Ministère des anges.
- 3. Il faut s’attacher à la parole du Christ.
- 4. Importance de la parole du Christ. – Témoignages rendus à cette parole.
- 5. Dieu dispense les grâces avec sagesse.
- 6. La charité est le plus précieux de tous les dons.
1. Notre-Seigneur Jésus-Christ appelle son avènement dans la chair : une sortie. C’est ainsi qu’il dit : « Le semeur est ; sorti pour semer », et ailleurs « Je suis sorti de mon Père et me voici ». (Mat 13,3 ; et Jn 16,28) Il s’exprime de même en plusieurs passages. Paul au contraire donne le nom d’introduction à cet avènement dans la chair « Après avoir introduit son premier-né sur la terre ». L’incarnation, chez lui, prend le nom d’introduction. Pourquoi ces expressions différentes pour désigner une môme chose, et d’où vient ce langage ? On voit clairement ce qu’il signifie. Le Christ appelle son avènement dans la chair une sortie, et il a raison, car nous étions en dehors de Dieu. Voyez les palais des rois. Les prisonniers et ceux qui ont offensé le roi se tiennent en dehors. Celui qui veut les réconcilier avec le prince, ne les introduit pas tout d’abord ; il s’entretient avec eux hors de la maison royale et ce n’est que lorsqu’il les a rendus dignes de paraître devant le roi qu’il les introduit. C’est ce qu’a fait le Christ. Il est sorti pour venir à nous, c’est-à-dire, a pris notre chair, il nous a parlé de la part du roi, et il ne nous a introduit devant lui qu’après nous avoir purifiés de nos péchés et nous avoir réconciliés avec le Souverain suprême. Voilà pourquoi il appelle son incarnation une sortie. Paul au contraire l’appelle une « entrée », en se servant d’une figure empruntée à la situation de l’homme qui hérite, et qui entre dans son héritage. Ces mots « après avoir introduit son premier-né sur la terre », signifient évidemment « après l’avoir mis en possession de la terre ». Car il est entré en possession de cette terre aussitôt qu’il a été reconnu Fils de Dieu. Ce n’est pas du Verbe divin, c’est du Christ selon la chair qu’il parle ainsi, et avec raison. Car s’il était dans le monde, selon la parole de Jean et si le monde a été fait par lui, comment pourrait-il y être introduit autrement que dans la chair ? « Et que tous les anges de Dieu l’adorent ». Paul a quelque chose dé grand et d’élevé à dire ; il prépare donc son discours et dispose « ses auditeurs à l’accueillir, en faisant introduire le Fils par le Père. Voyez plutôt : il a dit plus haut que Dieu nous a parlé par son Fils et non par les prophètes ; il a montré que le Fils est supérieur aux anges, et cela d’abord par le nom qu’il porte, puis par cette circonstance que le Père introduit le Fils. Autre preuve de cette supériorité : l’adoration. L’adoration fait éclater toute la supériorité du Christ sur l’ange : c’est celle du maître sur le serviteur. Ce que ferait un introducteur en présentant un grand personnage dans la maison d’un roi, et en ordonnant à tous ceux qui s’y trouveraient de se prosterner devant le nouveau venu, Paul le fait ici eu parlant de l’introduction selon la chair du Fils dans le monde et en disant : « Que tous les anges de Dieu l’adorent ». Quoi ! Les anges seuls, et non les autres puissances ! Loin de lui ce langage ! Écoutez ce qui suit. « Et des anges il est dit. Dieu se sert des esprits pour en faire ses anges, et des flammes ardentes pour en faire ses ministres ». Quant au Fils, il lui dit : « Votre trône sera un trône éternel ». Quelle différence entre ces deux sortes de langage ! Les anges sont créés ; le Fils est incréé. Pourquoi dit-il aux anges : Celui qui « fait » des esprits ses anges ; et ne s’est-il pas servi de ce mot, en parlant du Fils ? Il pouvait cependant exprimer la différence qui les sépare, en ces termes. Il est dit des anges : Celui qui « fait » des esprits ses anges ; et du Fils : « Le Seigneur m’a créé », et ailleurs Dieu l’a fait Seigneur même et Christ ». Mais ces mots n’ont jamais été appliqués ni au Christ, Fils de Dieu Notre-Seigneur, ni à Dieu le Verbe ; ils ne l’ont été qu’au Dieu incarné. Quand Paul veut montrer la vraie différence qui existe entre Dieu et ses ministres, sa parole embrasse non seulement les anges, mais toute la hiérarchie des ministres célestes. Voyez-vous avec. quelle netteté il sépare les créatures du créateur, les serviteurs du maître, l’héritier, le Fils légitime des esclaves ? Au Fils il dit : « Votre trône, ô Dieu, est un trône éternel ». Voilà un des emblèmes de la royauté ! La verge de votre royauté est la verge de la justice. Voilà encore un emblème royal ! Puis en parlant de Dieu fait homme : « Vous avez aimé la justice et détesté l’injustice », dit-il, « voilà pourquoi vous êtes l’oint du Seigneur votre Dieu ». Pourquoi ces mots : « Votre Dieu ? » c’est que son langage d’abord si élevé, s’abaisse quand il descend à l’incarnation. Ici ce sont les juifs, c’est Peul de Samosate, ce sont les ariens, c’est Marcellus, Sabellius et Marcion que Paul attaque à la fois, et voici comment il frappe les juifs, en démontrant que le Christ est Dieu et homme tout ensemble. Quant aux autres ; c’est-à-dire quant aux disciples de Paul de Samosate, il leur montre qu’il s’agit ici de l’éternelle substance et de l’être incréé. À ces mots il a. « fait », il oppose ceux-ci : « Votre trône, ô Dieu, subsiste dans les siècles des siècles ». Aux Ariens il dit que le Christ n’est pas un esclave, et il en serait un, s’il n’était qu’une créature. A Marcellus et aux autres il répond que le Père et le Fils sont deux personnes hypostatiquement distinctes ; aux disciples de Marcion, que l’oint du Seigneur dans le Christ, ce n’est pas le Dieu, c’est l’homme. Puis il dit : « D’une manière plus excellente que vos participants ». Or ces participants, quels sont-ils, sinon les hommes ? Cela veut dire que le Christ a reçu l’Esprit de Dieu sans mesure. 2. Voyez-vous comme il joint toujours, dans son langage, la nature incréée et l’incarnation ? Quoi de plus clair ? Voyez-vous la différence qu’il y a entre « créé » et « engendré ? » Autrement il n’aurait pas séparé ces deux manières d’être. Autrement, en regard de ce mot : « Il a fait », il n’aurait pas placé, pour les opposer à lui, ces paroles : « Quant au Fils, il lui a dit : Votre trône, à vous qui êtes le Dieu de l’univers, sera éternel ». Il n’aurait pas ; pour marquer sa prééminence, appelé le Christ du nom de Fils, si ce n’était pas là une marque de distinction. Où serait en effet la différence, où serait la prééminence, si « être créé » était la même chose qu’être engendré ? Puis voici ce mot « le Dieu », 0 Theos, avec l’article. Puis il dit encore : « Seigneur, vous avez fondé la terre dès le commencement du, monde, et les cieux sont l’ouvrage de vos mains. Ils périront, mais vous demeurerez ; tous vieilliront comme un vêtement, et vous les changerez comme un manteau et ils seront changés, mais vous, vous êtes toujours le même ; et vos années ne finiront pas ». Et pour que ces mots : « Lorsqu’il a introduit son premier-né dans le monde », ne vous fassent pas croire qu’il y a eu un, don accordé au Fils dans la suite des temps ; il a corrigé plus haut cette expression et il la corrige encore d’un seul mot : « Dans le principe », c’est-à-dire, non pas maintenant, mais dès l’origine du monde. C’est encore un coup mortel qu’il porte à Paul de Samosate ainsi qu’à Arius, lorsqu’il applique au Fils les paroles qui s’appliquent au Père. Il fait entendre en outre, comme en passant, quelque chose de plus grand encore. C’est à la transfiguration du monde qu’il fait allusion, en disant : « Ils vieilliront, comme un manteau, tu les rouleras comme un vêtement, et ils seront changés ». C’est comme dans l’épître aux Romains où il dit qu’il transformera le monde. La facilité avec laquelle cette transformation s’opérera est indiquée par le mot : « Tu rouleras ». Il changera le monde qui sera entre ses mains, comme un vêtement que l’on roule. Si, quand il s’agit de la partie la meilleure et la plus importante de la création, il la transforme avec cette facilité, a-t-il besoin, pour une œuvre moindre, d’une main étrangère ? Jusqu’à quand conserverez-vous ce front d’airain ? N’est-ce pas une grande consolation de savoir que le monde ne sera pas toujours le même, et qu’il subira une transformation, un changement complet, tandis que Dieu lui-même jouit d’une existence éternelle et d’une vie sans fin ? « Vos années », dit-il, « ne s’évanouiront pas. Et quel est l’ange à qui Dieu ait jamais dit : Asseyez-vous à ma droite, jusqu’à ce que j’aie réduit vos ennemis à vous servir de marchepied ? » Voilà en outre un encouragement pour ses auditeurs. Leurs ennemis auront le dessous ; car leurs ennemis sont les mêmes que ceux du Christ. Un nouveau signe de la royauté, du partage de la dignité divine, un nouveau signe d’honneur et non de faiblesse, c’est cette colère du Père excitée par les offenses qui s’adressent au Fils. Quelle preuve d’amour et de filiation légitime : c’est bien l’attachement d’un père pour son fils véritable. Celui qui s’irrite ainsi en prenant ses intérêts, comment lui serait-il étranger ? « Jusqu’à ce que j’aie réduit vos ennemis ». Cela revient à ce qui est dit dans le psaume deuxième : « Celui qui habite dans les cieux se rira d’eux, et le Seigneur les raillera amèrement. C’est alors qu’il leur parlera dans sa colère et que, dans son courroux, il les confondra ». Et ailleurs : « Ceux qui n’ont pas accepté mon règne, conduisez-les devant moi et mettez-les à « mort ». (Luc 19,27) Ce sont bien là des paroles : écoutez en effet ce qu’il dit ailleurs : « Que de fois n’ai-je pas voulu rassembler autour de moi tes enfants ! et vous ne l’avez pas voulu. Votre maison sera donc laissée à l’abandon ». (Luc 13,34) Et encore : « Le royaume vous sera enlevé, pour être donné à une nation qui le fera fructifier ». Et dans un autre endroit : « Celui qui tombera sur cette pierre, s’y brisera, et celui sur à qui elle tombera sera broyé ». (Mat 21,43, 44) D’ailleurs, celui qui là-haut doit les juger, a prononcé ici-bas contre eux un arrêt beaucoup plus sévère, pour les punir de leur cruauté envers lui. C’est donc uniquement pour faire honneur au Fils qu’ont été dites ces paroles : « Jusqu’à ce que j’aie réduit vos ennemis à vous servir de marchepied ». « Ne sont-ils pas tous ces esprits qui le servent, envoyés pour exercer leur ministère en faveur de ceux qui doivent être les héritiers du salut ? » Quoi d’étonnant, dit-il, s’ils sont les ministres du Fils, puisqu’ils doivent s’employer aussi à notre salut, en qualité de ministres ? Voyez comme il relève leurs esprits, et comme il nous montre l’excès d’honneur que Dieu nous fait, en ordonnant à ses anges de s’employer pour nous. C’est comme s’il disait : En quoi consiste le ministère des anges ? À servir Dieu pour notre salut. C’est donc une œuvre angélique, de tout faire pour le salut de ses frères ; c’est plus encore, l’œuvre du Christ. Mais le Christ : travaille en maître à notre salut, et les anges y travaillent, comme serviteurs. Et nous, tout esclaves que nous sommes, nous avons les anges pour compagnons d’esclavages. Pourquoi donc, nous dit-il, lever sur les anges des yeux étonnés ? Ce sont les esclaves du Fils de Dieu, et bien souvent c’est pour nous qu’ils sont envoyés, et c’est pour notre salut qu’ils exercent leur ministère ; ce sont donc nos compagnons d’esclavage. Songez à cette faible différence qu’il met entre les créatures. Et pourtant elle est grande la distance qui sépare l’ange de l’homme. Mais il les rabaisse jusqu’à nous. C’est à peu près comme s’il disait : C’est pour nous qu’ils travaillent, c’est pour nous qu’ils courent de tous côtés ; on pourrait presque dire qu’ils sont nos serviteurs. Être envoyés partout, dans notre intérêt, voilà leur ministère ! 3. A l’appui de cette vérité, les exemples abondent dans l’Ancien Testament ; ils abondent dans le Nouveau Testament. Quand les anges annoncent aux bergers la bonne nouvelle, quand ils l’annoncent à Marie, à Joseph, quand ils viennent s’asseoir auprès du monument, quand ils sont envoyés pour dire aux disciples : « Galiléens, pourquoi restez-vous là les yeux levés vers le ciel ? » (Act 1,11) Quand ils délivrent Pierre de sa prison, quand ils parlent à Philippe est-ce que ce n’est pas pour nous qu’ils travaillent ? Quel honneur n’est-ce pas pour nous de voir le Seigneur se servir de ses anges pour les envoyer aux hommes, comme à des amis, lorsqu’un ange apparaît à Corneille, lorsqu’un ange fait sortir de prison tous les apôtres, en leur disant : a Allez et faites entendre au peuple, dans le temple, la parole de vie ». Pourquoi en dire davantage ? Paul lui-même ne voit-il pas apparaître un ange ? Voyez-vous comme les anges nous servent à cause de Dieu, et cela dans les choses de la plus haute importance ? Aussi saint Paul dit-il : « Tout vous appartient : à vous la vie, à vous la mort, à vous le « monde, à vous le présent, à vous l’avenir ». Le Fils aussi a été envoyé, il est vrai, mais non comme serviteur, non comme ministre, mais comme Fils unique du Père ; et son Père et lui n’ont qu’une même volonté. Ou plutôt il n’a pas été envoyé ; car il n’est point passé d’un lieu dans un autre ; mais il s’est incarné. Les anges au contraire changent de lieux, ils abandonnent le séjour où ils sont, pour aller dans celui où ils n’étaient pas. Et c’est pourquoi il leur dit, afin de les encourager : Que craignez-vous ? Les anges vous servent. Après avoir parlé du Fils, de son incarnation, de sa puissance comme créateur, de sa royauté, de son rang égal à celui du Père, de son autorité qui s’étend non seulement sur les hommes, mais sur les puissances d’en haut, il exhorte ceux à qui il écrit, en usant de précautions oratoires, en nous présentant sous forme de conclusion le devoir de recueillir avec attention ce que nous avons entendu, et il dit : « Nous devons donc à proportion nous attacher avec plus de soin aux choses que nous avons entendues ». Il veut dire qu’il faut s’y attacher avec plus d’attention encore qu’à la loi ; mais il a passé le mot de « loi » sous silence. Toujours est-il que son langage est clair, quoiqu’il exprime une conclusion au lieu d’une exhortation et d’un conseil. La forme qu’il emploie était du reste la meilleure. « Car », dit-il, « si la parole sortie de la bouche des anges est demeurée stable, si toute transgression, toute désobéissance à cette parole a reçu son juste salaire, « comment nous autres échapperons-nous au châtiment, si nous négligeons un tel moyen de salut, la parole que le Seigneur a d’abord laissé tomber de sa bouche et qui nous a été confirmée par ceux qui l’ont entendue ? » Pourquoi donc devons-nous nous attacher davantage à ce que nous avons entendu ? Est-ce que les deux doctrines ne viennent pas de Dieu ? Est-ce une attention plus grande que jamais, ou une grande attention qu’il faut ici ? Il n’y a pas là de comparaison, à Dieu ne plaise ! Mais comme l’Ancien Testament devait à sa longue existence une grande autorité, tandis que l’autre était dédaigné comme nouveau, il montre surabondamment qu’il faut être surtout attentif au Nouveau Testament. Comment fait-il pour cela ? Ce qu’il dit revient à ceci Les deux doctrines viennent de Dieu ; mais non de la même manière. Cette vérité, il nous la démontre plus tard. Pour le moment il ne fait qu’y toucher superficiellement et il nous prépare à l’entendre ; mais plus tard, il devient plus clair et il dit : « Si la première loi eût été sans défaut », puis encore : « Ce qui est ancien et vieux est bien près de périr » et beaucoup d’autres choses semblables. Mais il n’ose encore rien dire de tel en commençant son épître ; il s’empare d’abord à l’avance de son auditeur et le captive, à force de préparations. Pourquoi donc devons-nous nous attacher davantage à ce que nous avons entendu ? Il nous le dit : « C’est pour que nous ne passions pas comme l’onde » ; c’est-à-dire, pour que nous ne périssions pas, pour que nous ne tombions pas. Et il nous montre ici le danger de la chute, quand elle arrive par notre négligence, en nous mettant sous les yeux cette eau qui coule et qui remonterait difficilement à sa source. Il emprunte son expression au livre des Proverbes : « Mon fils », y est-il dit, « ne passez pas comme l’onde ». Il nous montre combien il est facile de glisser et combien il est dangereux de tomber, c’est-à-dire combien la désobéissance est périlleuse. En raisonnant ainsi, il nous montre la grandeur du châtiment. Ce châtiment il le livre à nos recherches sans tirer de conclusion expresse. C’est un moyen de faire accepter sa parole que de ne pas toujours porter soi-même un jugement et de laisser à l’auditeur le soin de prononcer : c’est là un moyen de se concilier sa bienveillance. C’est ce que fait dans l’Ancien Testament le Prophète Nathan ; c’est ce que fait le Christ dans l’Évangile selon saint Matthieu, en ces termes : « Que fera-t-il aux cultivateurs de cette vigne ? » Il force ainsi les auditeurs à prononcer eux-mêmes. Voilà le triomphe de la parole ! Puis, après avoir dit : « Si la parole des anges a été confirmée », il n’ajoute pas : A plus forte raison celle du Christ le sera. Il omet cette conclusion et se contente de dire : « Comment éviterons-nous le châtiment, si nous négligeons un tel moyen de salut ? » Et suivez la comparaison dans ses détails. Là, c’est la « parole des anges » ; ici c’est ce qui est annoncé par le Seigneur. Là c’est « la parole » ; ici c’est le « salut ». Et, pour qu’on ne vienne pas lui dire : Ces paroles, ô Paul, sont-elles bien celles du Christ ? il prévient l’objection et montre qu’il est digne de foi. Il le prouve, en disant qu’il a entendu lui-même ce qu’il rapporte ; il le prouve, en s’appuyant sur Dieu lui-même dont il est l’écho et qui parle non seulement avec sa voix retentissante qui traverse les airs, comme du temps de Moïse, mais en se manifestant par les prodiges et par les événements. 4. Mais que veulent dire ces mots : « Si la parole transmise par les anges a été confirmée ? » Dans l’épître aux Galates aussi, il dit : « Donné par le ministère des anges et par l’entremise du médiateur », et ailleurs : « Vous avez reçu la loi par l’intermédiaire des anges et vous ne l’avez pas gardée ». (Gal 3,19 ; et Act 7,53) Et partout il est dit que c’est par le moyen des anges qu’elle est donnée. Il y en a qui disent qu’il est fait ici allusion à Moïse ; mais cette assertion n’est pas fondée, car il est ici question de plusieurs anges, et ces anges sont ceux qui habitent le ciel. Que dire ? Serait-il ici purement et simplement question du décalogue ? Là c’était Moïse qui parlait et Dieu qui répondait. Veut-on dire que les anges étaient là par l’ordre de Dieu ? Serait-il question de tout ce qui se dit, de tout ce qui se passe dans l’Ancien Testament, comme si les anges y avaient pris part ? Mais pourquoi lisons-nous ailleurs que la loi a été donnée par Moïse, tandis qu’ici elle est donnée par les anges ? Car il est dit : Et Dieu est descendu dans une nuée. « Si la parole transmise par les anges s’est enfermée ». Que veut dire « confirmée ? » Fidèlement vérifiée, parce que tout ce qui a été dit est arrivé en son temps. Cela pourrait signifier encore que la puissance de cette parole s’est révélée, et que les menaces de Dieu ont eu leur plein et entier effet. Peut-être encore « parole » a-t-il ici le sens de commandements. Car, en dehors de la loi, un grand nombre d’ordres émanés de Dieu ont été transmis par les anges, à l’époque du deuil par exemple, au temps des Juges et de Samson. Voilà pourquoi c’est le mot « parole » et non le mot « loi » qui est ici employé. Mais, selon moi, Paul entend peut-être ici ce qui s’est fait par le ministère des anges. Partant, que devons-nous dire ? Il y avait alors des anges commis à la garde de la nation tout entière qui était avertie par leurs trompettes retentissantes ; à eux de susciter les flammes et d’évoquer les ténèbres. « Toute » transgression, « toute » désobéissance recevait « sa juste récompense ». Il ne dit pas telle ou telle transgression, mais « toute » transgression. Ici nulle injustice ne restait impunie et « juste « récompense » veut dire ici châtiment. Mais pourquoi dit-il récompense ? C’est une habitude de Paul de ne pas faire grand cas des paroles, et d’employer en mauvaise part celles qui se prennent d’ordinaire en bonne part et réciproquement. Ainsi il dit ailleurs : « Asservissant toute intelligence à la parole du Christ ». Ailleurs encore il a substitué le mot de récompense à celui de châtiment, et dans le passage suivant, le châtiment devient une rétribution. « S’il est juste », dit-il, « aux yeux de Dieu qu’il rétribue ceux qui vous affligent en les affligeant, et vous qui êtes affligés, en vous donnant la paix ! » (2Th 1,6-7) C’est-à-dire, la justice n’a pas perdu ses droits, mais Dieu l’a maintenue et il a frappé les pécheurs, lors même que toutes les fautes n’avaient pas paru au grand jour, bien que les lois établies n’eussent pas été enfreintes. « Comment donc, nous autres échapperons-nous, si nous négligeons un tel moyen de salut ? » Il montre par là que la loi n’était pas un grand moyen de salut. Il a raison de dire « un tel moyen ». Ce n’est pas des guerres, dit-il, qu’il nous sauvera ; ce n’est passa terre, ce ne sont pas les biens terrestres qu’il nous donnera ; mais c’est la délivrance de – la mort, c’est l’anéantissement du démon, c’est le royaume des cieux, c’est la vie éternelle qu’il nous apporte. Voilà tout ce qui est renfermé dans ce mot : « Un tel salut ». Et pour montrer qu’il est digne de foi, il ajoute : « Qui ayant été premièrement annoncé par le Seigneur même » ; c’est-à-dire que c’est la source de ce salut qui nous l’annonce. Ce n’est pas un homme qui est venu l’annoncer à la terre, ce n’est pas une puissance créée, mais c’est le Fils unique de Dieu lui-même : « La nouvelle nous a été confirmée par ceux qui l’ont entendue ». Que veut dire : « A été confirmée ? » Cela veut-il dire rendue croyable ou répandue ? Nous avons un gage de sa vérité, dit-il : c’est que la bonne nouvelle ne s’est pas évanouie, n’a pas eu de fin, elle règne et triomphe, grâce à là vertu divine, à laquelle nous la devons. Que signifient ces mots : « Par ceux qui l’ont entendue ? Ils veulent dire que ceux qui l’ont recueillie de la bouche du Seigneur nous l’ont confirmée. Voilà qui est grave et bien digne de foi. C’est ce que dit saint Lc. au commencement de son Évangile : « Ainsi que nous l’ont transmise, dès l’origine, des témoins oculaires et des ministres de la parole divine ». (Luc 1,2) Comment donc s’est-elle confirmée ? Mais, pourrait-on dire ; si elle a été inventée par ceux-là même qui l’ont entendue ? C’est pour prévenir une pareille : objection, c’est, pour montrer que l’homme n’est là pour rien, que saint Paul a ajouté : « Dieu même leur a rendu témoignage ». Dieu ne leur aurait pas rendu témoignage, s’ils l’avaient inventée. Or à leur témoignage est venu se joindre celui de Dieu, qui se manifeste non par ses paroles, non par sa voix qui serait pourtant un témoignage irrécusable, mais par des signés miraculeux, par des prodiges, par les différents, effets de sa puissance. Il a raison de dire, « parles différents effets de sa puissance », pour désigner le grand nombre des grâces. Rien de pareil en effet n’a eu lieu dans les premiers temps ; il n’y a eu, ni autant de signes, ni des signes si différents ; ce qui revient à dire que nous n’avons pas cru les témoins témérairement et à la, légère, et que notre foi s’est appuyée sur dés signes et sur des prodiges. Ce ne sont donc pas les hommes, c’est Dieu lui-même que nous avons cru. « Et par la distribution des grâces du Saint-Esprit qu’il a réparties comme il lui a plu ». Les magiciens aussi font des prodiges, et les juifs disaient que, c’était au nom de Belzébuth que le Christ chassait les démons. Mais leurs prodiges ne ressemblent point à ceux que Dieu opère. Voilà pourquoi il est dit ici : « Par les a différents effets de sa puissance ». Car les prodiges des Magiciens n’annoncent point la force et la puissance. Tout – cela n’est que faiblesse, chimères, imaginations et futilités. Voilà pourquoi il est dit ici : « Par la distribution des grâces du Saint-Esprit, qu’il a réparties comme il a voulu ». 5. Ici Paul me semble encore faire allusion à une autre circonstance. Probablement, dans l’assemblée à laquelle il s’adresse, il n’y avait pas beaucoup de gens qui fussent pourvus des grâces divines ; ces dons étaient devenus plus rares, parce que les hommes étaient devenus plus négligents. Voilà pourquoi, afin de les consoler et pour ras pas les laisser tomber dans le découragement, il a attribué toutes ces grâces à la volonté divine. Il sait, dit-il, quel est l’avantage de chacun, et c’est là-dessus qu’il se fonde pour distribuer ses grâces : C’est ce qu’il dit encore dans l’épître aux Corinthiens. « Le Seigneur a donné à chacun la place qu’il a voulue ». Et ailleurs : « Les dons du Saint-Esprit qui se manifestent au-dehors ont été donnés à chacun pour l’utilité de l’Église ». (1Co 12,18, 7) Il montre par là que les grâces sont réparties, suivant la volonté du Père. Souvent, à cause de leur vie impure et de leur paresse, bien des gens n’ont eu aucune part aux grâces du Seigneur. Ils ont été quelquefois assez mal partagés, malgré leur existence honorable et pure, Pourquoi cela ? c’est pour qu’ils ne lèvent point une tête orgueilleuse, c’est pour qu’ils ne s’enflent point,-pour qu’ils ne tombent point dans la négligence ou dans la présomption. Car si, même sans la grâce, la conscience que l’on a de la pureté de sa vie, suffit pour donner de l’orgueil, il en est ainsi à plus, forte raison, quand le don des grâces vient s’y joindre. C’est pourquoi ce don est le privilège des humbles et des simples, et surtout dés simples. « Avec joie », dit-il, « et simplicité de cœur ». (Act 2,46) Voilà surtout comme il s’y prend pour les exhorter et pour stimuler leur lenteur. Celui qui est humble en effet, celui qui n’a pas de lui-même une haute idée, redouble de zèle ; quand il reçoit le don dés grâces ; il croit avoir reçu plus qu’il ne méritait ; il se regarde comme indigne 'd’un pareil don. Mais l’homme qui a conscience de son mérite, accepte ce don comme s’il lui était dû ; et s’enorgueillit. Dieu a donc consulté l’intérêt de l’Église pour dispenser ces grâces. Aussi, voyons-nous, dans l’Église, le don de l’enseignement accordé à celui-ci, tandis que celui-là ne peut pas même ouvrir la bouche. Il ne faut pas se chagriner pour cela. « Car les dons de l’Esprit, qui se manifestent au-dehors, ont été donnés à chacun, pour l’avantage de l’Église ». Si un maître de maison sait à quoi il peut employer chacun de ses serviteurs, à plus forte raison il doit en être ainsi dé Dieu qui connaît l’esprit des hommes, et qui sait tout avant qu’ils ne soient nés. Une seule chose doit nous affliger, c’est le péché. Ne dites pas. Pourquoi n’ai-je pas de fortune ? si j’en avais, j’en ferais part aux pauvres. Peut-être, si vous en aviez, seriez-vous plus ambitieux. Vous parlez ainsi maintenant, mais, si vous étiez mis à l’épreuve, vous seriez un autre homme. Sommes-nous rassasiés, il nous semble que nous sommes à l’épreuve du jeûne, et – bientôt après nous raisonnons autrement. Quand nous ne sommes pas enclins à l’ivrognerie, nous croyons pouvoir surmonter la passion du vin ; cette passion s’empare-t-elle de nous, nos idées changent. Ne, dites pas : Pourquoi n’ai-je pas reçu le don d’enseigner ? Si je l’avais, j’aurais édifié bien du monde. Si vous l’aviez eu, on vous en aurait peut-être fait un crime ; l’envie et la paresse vous auraient peut-être forcé à enfouir votre talent. Vous êtes maintenant à l’abri de leurs attaques, et si vous ne donnez pas votre mesure de froment, on ne vous fera pas de reproche. Si vous n’étiez pas dans la situation où vous êtes, vous auriez mille comptes à rendre. D’ailleurs, vous n’êtes pas absolument dépourvu des grâces, du Seigneur. Montrez, dans votre humble situation, ce que vous sériez dans une position plus élevée. Si, « quand vous avez un petit dépôt à conserver », est-il dit, « vous ne vous montrez pas fidèle, que sera-ce quand vous serez dépositaire « d’un trésor ? » (Luc 16,11) Faites comme la veuve. Elle n’avait que deux oboles et elle a donné tout ce qu’elle possédait. Sont-ce les richesses que vous recherchez ? Montrez que de faibles sommes n’excitent pas votre convoitise, pour que je vous en confie de plus grandes. Si vous n’êtes pas au-dessus de quelques deniers, vous serez encore bien plus faible devant une masse d’or. Dans vos discours, montrez que vous savez adresser à propos une exhortation ou un conseil. Manquez-vous d’éloquence ? manquez-vous d’abondance ? vous pouvez faire cependant ce que fait le commun des hommes. Vous avez un enfant, un voisin, un ami, an frère, des proches ; si vous ne pouvez parler en public et développer un sujet devant une grande assemblée, vous avez des auditeurs auxquels vous pouvez donner un bon conseil en z particulier. Il n’y a besoin pour cela ni d’éloquence ni de longs développements. Montrez devant un auditoire restreint que, si vous aviez reçu le don de la parole, vous sauriez le cultiver. Si, quand votre couvre est peu de chose, vous ne déployez aucun zèle, comment vous confierais-je une couvre importante ? Ce que je vous dis là, chacun est en état de le faire. Écoutez plutôt saint Paul s’adressant aux laïques : « Édifiez-vous », dit-il, « les uns les autres, comme vous le faites » ; et ailleurs : « Consolez-vous les uns les autres, dans vos entretiens ». (1Th 5,11 et 4, 17) Valez-vous mieux que Moïse ? Écoutez-le et voyez comme il se décourage : « Est-ce que je puis les porter », dit-il, « pour que vous me disiez : Porte-les, comme une nourrice porte son nourrisson ? » (Nom 11,12) Que fait Dieu alors ? Il lui retire son esprit pour le donner aux autres, montrant par là que lorsqu’il leur servait de soutien, ce n’était point par lui-même, mais parla grâce du Saint-Esprit. Si vous aviez les dons de la grâce, souvent vous vous élèveriez, souvent vous seriez abattu ; vous ne vous connaissez pas vous-même, comme Dieu vous tonnait. Ne disons pas : A quoi bon ceci ? Pourquoi cela ? Quand c’est Dieu qui ordonne toutes choses, n’allons pas lui demander des comptes ; car 'ce serait le comble de l’impiété et de la folie. Nous sommes des esclaves, et il y a entre notre maître et nous, esclaves que nous, sommes, un intervalle immense ; nous ne voyons même pas à nos pieds. N’allons donc pas scruter les desseins de Dieu ; conservons précieusement ses moindres dons, ses dons les plus infirmes et nous serons considérés. Mais que dis-je ? Parmi les dons du Seigneur il n’y en a pas un qui n’ait son prix. Vous vous plaignez de n’avoir pas le don d’enseigner. Dites-moi, je vous prie, lequel préférez-vous du don d’enseignement ou du don de guérison ? Le don de guérison assurément. Et le don de guérir les maladies, n’est-il pas, selon vous, inférieur au pouvoir de rendre la vue aux aveugles, inférieur au don de résurrection ? Et maintenant dites-moi. Ressusciter un mort avec sa parole, n’est-ce pas moins encore que de le ressusciter avec son ombre par le simple contact d’un morceau de linge ? Qu’aimez-vous mieux, dites-moi : ressusciter les morts avec votre ombre, par le « simple contact » d’un morceau de linge, ou avoir le don d’enseigner ? Assurément, répondrez-vous, je préfère avoir le don de ressusciter les morts. 6. Si donc je parviens à vous démontrer que ce dernier don est bien inférieur à l’autre, et qu’en négligeant d’acquérir ce don le plus grand de tous, vous méritez d’être privé de tous les autres, que direz-vous ? Et le don auquel je fais allusion, ce n’est pas à un ou deux hommes, c’est à toit, le monde qu’il est permis de l’acquérir. Vous voilà tous ébahis, je le vois, vous voilà frappés de stupeur ! Quoi ! vous pourriez acquérir un don encore plus grand que le pouvoir de rendre la vie aux morts et la vue aux aveugles ! Vous pourriez faire ce qui s’est fait au temps des apôtres ! Voilà qui vous parait peut-être incroyable ! quel est ce don enfin ? C’est la charité. Mais croyez-moi bien. Car ce n’est pas moi qui parle ; c’est le Christ par la bouche de saint Paul. Que dit-il ? « Entre tous les dons, empressez-vous de choisir les meilleurs, et je vais vous montrer une voie qui est encore au-dessus de tout ». (1Co 12,31) Qu’est-ce à dire : « Encore au-dessus de tout ? » Voici le sens de ces paroles. Les Corinthiens, à cette époque, se faisaient gloire de posséder les dons de la grâce, et ceux qui avaient le don des langues qui est le dernier de tous, étaient gonflés d’orgueil, et se mettaient au-dessus de tout le monde. Paul dit donc : Vous voulez absolument posséder, les dons de la grâce. Eh bien ! je vais vous montrer une voie pour y parvenir, et cette voie n’est pas seulement supérieure aux autres ; elle est au-dessus de tout. Puis il ajoute : « Quand je parlerais le langage des anges, si je n’ai point, la charité, je ne suis rien. Et quand j’aurais cette foi vive qui transporte les montagnes, si je n’ai pas la charité, je ne suis rien ». (1Co 13,1-2) Voilà ce qui s’appelle un don précieux ! Soyez donc jaloux de l’acquérir. Cela vaut mieux que de ressusciter les morts ! Ce don est de beaucoup au-dessus de tous les dons. Écoutez plutôt ce que dit le Christ à ses disciples, en s’entretenant avec eux : « À quoi tout le monde reconnaîtra-t-il que vous êtes mes disciples ? à votre charité les uns pour les autres ». (Jn 13,35) Ce signe particulier qui les fait reconnaître, il le montre ici. Ce ne sont pas les miracles, et qu’est-ce donc ? C’est la charité qu’ils ont les uns pour les autres. Et ailleurs il dit à son Père : « On reconnaîtra que vous m’avez envoyé à ce signe : ils ne seront qu’un ». (Jn 17,21) Et lui-même dit à ses disciples:« Voici un nouveau précepte que je vous donne, aimez-vous les uns les autres ». (Jn 13,34) Il y a donc plus de mérite et de gloire à cela qu’à ressusciter les morts, et c’est justice. Car tous ces dons que nous avons mentionnés, sont des présents de la grâce divine ; celui-ci est le fruit du zèle ; d’est l’apanage du vrai chrétien ; c’est le sceau du disciple de Jésus-Christ, de ce disciple que l’on crucifie et qui n’a rien de commun lavée la terre. Sans la charité, le martyre même est inutile. Voulez-vous le savoir ? Remarquez bien ceci. Saint Paul divise les vertus en trois classes principales : celle des signes miraculeux, celle de la science, celle qui consiste dans une vie droite. Eh, bien ! ces vertus, selon lui, ne sont rien, sans la charité. Comment cela ? je vais vous le dire : « Quand j’aurais distribué tout mon bien pour nourrir les pauvres, si je n’ai point la charité, cela ne me sert de rien ». (1Co 13,3) Il est possible en effet, que celui qui distribue ainsi son bien, ne soit point charitable et ne soit qu’un prodigue. C’est ce qui a été suffisamment développé dans le passage où nous avons parlé de la charité, et nous y renvoyons le lecteur ! Soyons donc jaloux, je le répète, d’acquérir la charité, aimons-nous les uns les autres, et cette voie, à elle seule, nous fera parvenir à la vertu. Tout nous sera facile. Plus de sueurs ; tout nous réussira et nous ferons tout avec zèle. Oui, répète-t-il, aimons-nous les uns les autres. Cet homme a deux ou trois amis ; cet autre en a quatre. Mais ce n’est pas là ce qui s’appelle aimer pour Dieu ; c’est aimer pour être aimé. L’amour qui a Dieu pour cause, ne dérive pas d’un semblable principe. L’homme qui aime pour Dieu regardera tous les hommes comme ses frères. Ceux qui partagent sa croyance, il les aimera comme des frères germains ; quant aux hérétiques, aux Grecs et aux Juifs qui sont ses frères selon la nature, mais qui sont des membres corrompus et inutiles, il en aura pitié, et se consumera dans les larmes, en déplorant leur sort. Le moyen de ressembler à Dieu, c’est d’aimer tout le monde et même ses ennemis ; ce n’est pas de faire des miracles. Car Dieu lui-même, si nous, l’admirons quand il fait des miracles, nous l’admirons bien davantage encore, quand il manifesté sa bonté et sa patienté. Si donc ces vertus sont tellement admirables dans la nature divine, à plus forte raison sont-elles admirables chez l’homme. Montrons-nous donc jaloux d’acquérir la charité, et nous égalerons saint Pierre, saint Paul, et ces hommes qui ont opéré des milliers de résurrections. Oui : nous les égalerons, quand même nous n’aurions pas le pouvoir de guérir une simple fièvre. Mais, sans la charité, quand même nous ferions plus de miracles que les apôtres, quand nous affronterions mille dangers, pour faire triompher la foi, tout, cela sera en pure perte. Et ici ce n’est pas moi qui parle ; cette doctrine est celle du nourrisson de la charité, et c’est à lui que nous devons obéir. C’est ainsi que nous obtiendrons les biens qui nous sont promis. Ces biens, puissions-nous tous les acquérir, par la grâce et la bonté de Notre-Seigneur Jésus-Christ. A lui, au Père et au Saint-Esprit, gloire, puissance et honneur, maintenant et toujours, et dans tous les siècles des siècles. Ainsi soit-il. HOMÉLIE IV.
CAR DIEU N’A POINT SOUMIS AUX ANGES LE MONDE FUTUR DONT NOUS PARLONS. OR QUELQU’UN A DIT DANS UN ENDROIT DE L’Écriture : QU’EST-CE QUE L’HOMME POUR MÉRITER VOTRE SOUVENIR ? ET QU’EST-CE QUE LE FILS DE L’HOMME POUR]ÊTRE HONORÉ DE VOTRE VISITE ? VOUS L’AVEZ RENDU, POUR UN TEMPS, INFÉRIEUR AUX ANGES. (II, 5, JUSQU’A 15) Analyse.
- 1. Pourquoi Dieu n’a-t-il pas voulu nous faire connaître d’avance le jour de notre mort ?
- 2. Le royaume de Dieu. – La gloire du Fils de l’homme. – Les fruits de la croix.
- 3. L’incarnation et la passion du Christ plus grandes que la création.
- 4. Le Christ a terrassé la mort et le démon. – Celui qui ne craint pas la mort est libre et grand.
- 5. Il ne faut pas, dans les funérailles, faire étalage de sa douleur. – Il ne faut pas payer des pleureuses à gages.
- 6. II faut se soumettre à l’Église. – II faut savoir supporter les réprimandes.
1. Je voudrais savoir positivement si quelques-uns d’entre vous écoutent comme il faut nos paroles, et si nous ne jetons pas la semence le long de la route. Votre attention nous donnerait plus d’ardeur à poursuivre cet enseignement. Quand personne ne devrait nous écouter, nous parlerons sans doute, parce que Nous craignons le Sauveur. Car il est dit : Rendez-nous témoignage devant ce peuple et, s’il ne vous écoute pas, vous n’en serez pas responsable. Mais si j’étais sûr de votre attention, ce n’est pas la crainte qui me ferait parler, mais ce serait avec plaisir que je remplirais ce devoir. Maintenant, en effet, quand votre inattention serait pour moi sans péril, puisque je fais mon devoir, je me livre à un travail ingrat. A quoi bon,.en effet, quand même on ne me reprocherait rien, poursuivre une œuvre qui ne profite à personne ? Mais si nous devons trouver en vous des auditeurs attentifs, nous serons encore plus heureux d’obtenir votre attention que d’éviter le châtiment. Comment donc saurai-je que vous m’écoutez ? j’observerai ceux d’entre vous qui ne sont pas, très-attentifs, je les prendrai à part, je les interrogerai, et si je vois qu’ils ont retenu quelques-unes de mes paroles (je ne dis pas toutes, ce qui n’est pas très-facile, mais seulement quelques-unes), alors évidemment je serai sûr du reste de mon auditoire. J’aurais dû vous prendre à l’improviste, sans vous prévenir. Mais nous serons heureux, si l’épreuve, telle qu’elle est, nous réussit. Car, même de cette manière, je puis encore vous surprendre. Je vous interrogerai, je vous en ai avertis, mais quand vous interrogerai-je ? Là-dessus je ne m’explique pas. Peut-être sera-ce aujourd’hui, peut-être demain ; peut-être sera-ce dans vingt jours, dans quarante jours, plus ou moins. C’est ainsi que Dieu ne nous a pas révélé d’avance le jour de notre mort. Sera-ce aujourd’hui ?sera-ce demain ? sera-ce dans une année entière ? sera-ce dans plusieurs années ? Là-dessus il nous a laissés dans l’incertitude, afin que, n’étant pas fixés sur ce point, nous restions toujours vertueux. Qu’on ne vienne pas me dire : Il y a quatre ou cinq semaines et plus que j’ai entendu ces paroles, et je ne puis les retenir. Celui qui m’écoute, je veux qu’il retienne fidèlement, mes paroles, qu’elles restent gravées dans sa mémoire et qu’elles n’en sortent pas. Je ne veux pas qu’il les accueille avec dédain. Je veux que vous reteniez mes discours, non pour que vous me les répétiez, mais pour qu’ils vous profitent. Voilà le but que je suis jaloux d’atteindre. Après ce préambule nécessaire, je dois poursuivre la tâche que j’ai commencée. De quoi s’agit-il aujourd’hui ? « Dieu », dit-il, « n’a point soumis aux anges le monde futur dont nous parlons ». Est-ce, qu’il parle d’un autre monde que le nôtre ? Cela ne peut être. C’est bien de celui-ci qu’il parle. Aussi ajoute-t-il : dont nous parlons, pour que l’esprit de ses auditeurs ne s’égare pas et n’aille pas en chercher un autre. Mais pourquoi dit-il : Ce monde « futur ? », par là même raison qu’il dit ailleurs : « Qui est la figure de celui qui doit venir ». (Rom 5, 14) C’est d’Adam et du Christ qu’il parle dans son épître aux Romains, où il appelle, en ayant égard aux temps, le Christ fait homme, un Adam « futur », car il n’était pas encore venu. De même, dans ce passage, après avoir dit : « Lorsqu’il eut introduit son premier-né dans le monde » pour qu’on n’aille pas croire qu’il s’agit d’un monde autre que celui où nous sommes, il montre que c’est bien celui-là qu’il désigne en divers endroits, et notamment ici par cette expression : le monde « futur » ; car ce monde devait avoir un commencement ; tandis que le Fils de Dieu a toujours existé. Donc ce monde qui allait commencer, il ne l’a pas soumis aux anges, mais au Christ. Que cela ait été dit au Fils, c’est chose certaine, et l’on ne saurait avancer que cela ait été dit aux anges. Puis il apporte un nouveau témoignage de cette vérité, en disant : « Or quelqu’un a dit dans un endroit de l’Écriture ». Et pourquoi donc ne pas nommer ici le témoin ? Pourquoi cacher le nom du Prophète ? Nous répondrons que c’est sa méthode et qu’il l’emploie ailleurs, quand il à recours à tel ou tel témoignage. C’est ainsi qu’il dit : « Quand il eut – envoyé son premier-né sur la terre, il parle ainsi : Que tous les anges de Dieu l’adorent ». Et ailleurs : « Je serai son père. Et il dit aux anges : Celui qui se sert des esprits pour en faire ses anges. Et il a dit au Fils : Seigneur, vous avez créé la terre dès le commencement du monde ». C’est toujours la même méthode qu’il suit, en disant : « Or quelqu’un a dit dans un passage de l’Écriture ». Quand il ne nomme pas, quand il passe sous silence le nom de son témoin, quand il lance ainsi dans la foule une citation, comme si elle était connue de tous, il s’adresse aux Hébreux comme à des hommes versés dans les saintes. Écritures : « Qu’est-ce que l’homme, pour que vous vous souveniez de lui ? – Qu’est-ce que le fils de l’homme, pour que vous laissiez tomber sur lui vos regards ? Vous l’avez rabaissé un peu au-dessous des anges ; puis vous l’avez couronné d’honneur et dé gloire : Vous lui avez donné l’empire sur les œuvres de vos mains, et vous avez mis l’univers sous ses pieds. ». 2. Ces paroles peuvent s’appliquer au commun des hommes ; mais elles s’appliquent plus particulièrement, je crois, au Christ incarné. Car ces mots : « Vous avez mis l’univers sous ses pieds » ; lui conviennent mieux qu’à nous. Le Fils de Dieu nous a visités, nous qui ne sommes rien, il s’est revêtu dé notre humanité, et s’est élevé au-dessus de tous. « Car, en disant qu’il lui a assujetti toutes choses, Dieu n’a rien laissé qui ne lui soit assujetti ; et cependant nous ne voyons pas encore que tout lui soit assujetti ». Voici le sens de ces paroles. Il avait dit : « Jusqu’à ce que j’aie réduit vos ennemis à vous servir de marchepied », et probablement les Hébreux étaient encore dans, l’affliction. Alors il leur adresse quelques paroles pour amener un témoignage qui vient confirmer le premier. Pour qu’ils ne pussent pas s’écrier : Comment se fait-il qu’il ait réduit ses ennemis à lui servir de marchepied, puisque nous sommes eh proie à tant de maux ? Il avait déjà, dans le texte, précédent, réfuté implicitement cette objection. Ce mot « jusqu’à ce que », en effet, annonçait une délivrance amenée par le temps, et non immédiate. Il revient maintenant encore sur ce point. Parce que tout ne lui est pas encore assujetti, ne croyez pas, dit-il, que les choses resteront dans : cet état ; car tout doit lui être assujetti : tel est le sens de la prophétie. « En disant qu’il lui a assujetti toutes choses, il n’a rien laissé qui ne lui soit assujetti ». Comment donc tout ne lui est-il pas assujetti ? C’est que tout doit l’être un jour. Si donc tout doit être assujetti au Christ et ne l’est pas encore, n’allez pas vous affliger et vous troubler pour cela. Si tout était fini, si tout était soumis et que vous fussiez toujours en proie aux mêmes tourments, vous auriez raison de vous affliger. Mais tout n’est pas encore assujetti, nous le voyons : Le souverain n’a pas, encore pleinement établi son autorité. Pourquoi dont vous troubler, parce que vous souffrez ? « La bonne nouvelle » ne triomphe pas encore partout ; les temps ne sont pas encore accomplis. Autre consolation : Celui qui doit tout assujettir est mort lui-même, et a souffert mille tourments. « Mais nous voyons que Jésus a été rendu, pour un peu de temps, inférieur aux anges, à cause de la mort qu’il a soufferte ». Puis viennent ces belles paroles. « Couronné d’honneur et de gloire ». Voyez-vous comme tout cela s’applique à Jésus ? Cette expression « pour un peu de temps » doit s’appliquer à celui qui né reste que trois jours aux enfers, bien plutôt qu’à nous, créatures éminemment périssables. De même les mots de « gloire et d’honneur » lui conviennent bien mieux qu’à nous. Ensuite il leur rappelle la croix, dans un double but, afin de leur montrer la sollicitude de Jésus pour l’humanité, afin aussi de les exhorter à tout supporter avec courage, à l’exemple du maître. Si celui que les anges adorent, leur dit-il par là, a consenti pour vous a devenir pendant quelque temps inférieur aux anges, à plus forte raison vous qui êtes inférieurs aux anges, devez-vous tout supporter pour l’amour de lui. Alors il leur montre que c’est la croix qui est la gloire et l’honneur. Jésus lui-même ne l’appelle-t-il pas ainsi, quand il dit : Voici l’heure où le Fils de l’homme va être glorifié ? Si donc, à ses yeux, c’est une gloire de souffrir pour des esclaves,.combien doit-il être plus glorieux pour nous de souffrir pour notre maître ! Voyez-vous quels sont les fruits de la croix ? Ne la redoutez pas. Elle vous effraie, et pourtant elle produit de grands avantages. Il nous montre par là l’utilité de la tentation, puis il ajoute ; « Afin que, par la grâce de Dieu, il goûtât la mort, pour le salut de tous les hommes ». – « Afin que, par la grâce de Dieu », dit-i1. Oui, s’il a tant souffert, c’est en vertu d’une grâce que Dieu a faite à tous les hommes. « Dieu », dit saint Paul, « n’a pas épargné son propre Fils, et l’a sacrifié pour nous tous ». (Rom 8,32) Ce sacrifice, il ne nous le devait pas ; c’est une grâce qu’il nous a faite. Et dans un autre passage de l’épître aux Romains, il nous dit : « La miséricorde et le don de Dieu se sont répandus avec bien plus d’abondance sur plusieurs, par la grâce d’un seul ; homme qui est Jésus-Christ ». (Rom 5,15) « Pour que, par la grâce de Dieu, il goûtât la mort, pour le salut de tous ». Oui, pour tous les hommes, et non pas seulement pour, lés fidèles, car c’est pour tous qu’il est mort. Mais, si tous n’ont pas cru ? N’importe : il a rempli sa mission.: Cette expression il a « goûté » la mort, est, pleine de justesse. Il n’a pas dit : « Afin qu’il mourût » ; car il n’a fait que séjourner dans la mort, il n’a « fait que la goûter », et sa résurrection a été prompte. Mais ces mots « à cause de la mort qu’il à soufferte », expriment bien la mort véritable. Quant à ces mots « supérieur aux anges », ils font une allusion évidente à la résurrection. Le médecin n’a pas besoin de goûter les remèdes présentés au malade, et cependant, il commence par les goûter, dans sa sollicitude pour ce client qu’il veut déterminer à boire hardiment un breuvage salutaire. Eh bien ! ainsi fait le Christ à l’égard de tous les hommes. Ils craignaient la mort et, pour les enhardir contre elle, il la goûte, sans nécessité pour lui. Car, dit-il, « voici venir le prince de ce monde, quoiqu’il n’y ait rien en moi qui lui appartienne ». (Jn 14,30) Ainsi l’explication de ces mots « par une grâce de Dieu » et de ceux-ci « il goûtera la mort pour le salut de tous », se trouve dans ce verset : « Car il était bien digne de Celui pour lequel et par lequel toutes choses ont été faites, que voulant conduire à la gloire plusieurs de ses enfants, il perfectionnât par la souffrance l’auteur de leur salut ». 3. C’est du Père qu’il parle ici. Voyez-vous comme ces mots « par lequel toutes choses ont été faites », s’appliquent bien à lai ? Tel n’aurait pas été son langage s’il avait voulu exprimer des idées moins relevées, et s’il n’était ici question que du Fils. Voici le sens de ses paroles : Dieu a fait un acte digne de sa bonté pour nous, en revêtant son premier-né d’un éclat dont rien n’approche, et en l’offrant pour exemple au monde comme un athlète généreux et supérieur à tous. Voyez la différence : Il est le Fils de Dieu et nous aussi, nous sommes les enfants de Dieu ; mais c’est lui qui nous sauve, et c’est nous qui sommes sauvés. Voyez comme tour à – tour il nous rassemble et nous sépare. « Voulant conduire à la gloire plusieurs, de ses enfants », dit-il, « il devait perfectionner » par la souffrance celui qui allait être l’auteur de notre salut. La souffrance est donc un moyen d’arriver à la perfection, et une source de salut. Voyez-vous quel n’est pas le partagé de ceux que Dieu a abandonnés ? Dieu a donc particulièrement honoré le Fils, en le faisant passer par la souffrance. Et en effet se revêtir de notre chair pour souffrir, est certes bien plus grand que de créer le monde et de le tirer du néant : ce dernier acte est un, bienfait ; mais l’autre en est un bien plus grand encore. Et c’est à la grandeur de ce bienfait que Paul fait allusion, par ces mots : « Pour faire éclater, dans les siècles à venir, les richesses surabondantes de sa grâce, il nous a ressuscités avec lui, et nous a fait asseoir dans le ciel, en Jésus-Christ. Il fallait bien que Celui par qui et pour qui toutes « choses ont été faites et qui avait conduit à la gloire de si nombreux enfants, perfectionnât par la souffrance celui qui devait être l’auteur de notre salut ». Il fallait que celui qui a tant de sollicitude pour nous, et qui a fait toutes choses, livrât son Fils pour le salut de tous, un seul pour plusieurs. Mais tel n’est pas le langage de Paul : il a employé les mots : « Perfectionner par la souffrance », pour montrer que, lorsqu’on souffre pour autrui, non seulement on lui est utile, mais on devient soi-même plus illustre et plus parfait. Il s’adresse à ses disciples pour les encourager. Oui, le Christ a été glorifié, lorsqu’il, a souffert, Mais quand je dis qu’il a été glorifié, n’allez pas croire qu’il y ait eu là un accroissement de gloire pour lui ; car la gloire était dans sa nature et rien ne pouvait l’augmenter. « Celui qui sanctifie et ceux qui sont sanctifiés, viennent tous d’un même Père. C’est pourquoi il ne rougit point de les appeler ses frères ». Ici l’apôtre honore et console tous ses auditeurs ; de tous ces hommes il fait les frères du Christ, puisqu’ils ont le même Père que lui. Puis établissant bien et montrant clairement qu’il parle selon la chair, il ajoute : « Celui qui sanctifie et ceux qui sont sanctifiés ». Voyez quelle distance il y a du Christ à nous, c’est lui qui sanctifie, c’est nous qui sommes sanctifiés. Et plus haut, saint Paul l’appelle l’auteur de notre salut. « Il n’y a qu’un Dieu en effet, de qui, procèdent toutes choses ; c’est pourquoi il ne rougit point de les appeler ses frères ». Voyez comme il fait ressortir ici la supériorité du Christ. Dire « il ne rougit point », cela signifie que ce n’est pas de sa part chose toute naturelle de nous donner un pareil nom, mais que c’est l’effet d’une bonté et d’une humilité extrême. Car, bien que nous ayons tous le même Père, toujours est-il que c’est lui qui sanctifie et Que c’est nous qui sommes sanctifiés. Quelle différence ! Et puis il procède du Père,'comme un Fils véritable et légitime qui participe à son essence ; tandis que nous, c’est en qualité de créatures tirées du néant que nous reconnaissons, Dieu pour Père. La distance entre le Christ et nous, est donc bien grande. Voilà pourquoi il dit : « Il ne rougit pas de les appeler ses frères », en disant : « J’annoncerai votre nom à mes frères ». Car en même temps que notre chair, il a revêtu cette fraternité, suite naturelle de l’incarnation ; c’est là une conséquence toute simple. Mais que veulent dire ces mots : « Je mettrai en lui ma confiance ? » car cette autre expression : « Me voici, et voici les enfants que Dieu m’a donnés », est remplie de justesse. Ici c’est comme Père des hommes qu’il s’offre à nous ; tout à l’heure c’était comme frère. « J’annoncerai », dit-il, « votre nom à mes frères ». Puis vient une nouvelle preuve de sa supériorité et de la différence qu’il y a entre lui et nous. « Comme donc ses enfants sont d’une nature composée de chair et de sang, il a pris aussi « cette même nature ». La ressemblance, vous le voyez, est tirée de l’incarnation. Que les hérétiques rougissent tous, qu’ils se cachent de honte, ceux qui prétendent que la venue du Christ est une apparence et non une vérité. L’apôtre ne s’est pas en effet borné à dire : « Il s’est fait participant de cette nature », ce qui aurait pourtant suffi ; il a été plus loin et il a dit : « De cette même nature », pour montrer que ce n’est pas là une apparence, une image, mais une fraternité véritable. Autrement, que signifierait le mot « même ? » Puis il nous dit le motif de cette métamorphose providentielle. C’était « afin de détruire par sa mort celui qui était le prince de la mort, c’est-à-dire le démon ». Voilà où est le miracle ! C’est par la mort que le démon a vaincu ; c’est par elle qu’il a été vaincu. Cette arme terrible dont il se servait contre la terre, la mort, a été entre les mains du Christ l’instrument de sa perte, preuve éclatante de la puissance du vainqueur ! Voyez-vous quel bien la mort a fait ? « Et afin de mettre en liberté ceux que la crainte de la mort tenait en servitude durant toute leur vie ». Pourquoi frémir, dit-il ? Pourquoi redouter cette ennemie détruite à jamais ? Elle n’est plus à craindre. La voilà foulée aux pieds ; ce n’est plus qu’un objet digne de mépris, une chose vile et abjecte, ce n’est plus rien. Mais que veulent dire ces mots : « Ceux que la crainte de la mort tenait en servitude durant toute leur vie ? » cela veut dire que redouter la mort, c’est être esclave et prêt à tout supporter pour ne pas mourir. Cela peut vouloir dire aussi que tous les hommes étaient esclaves de la mort et soumis à l’empire de ce monstre qui n’était pas encore détruit. Cela peut signifier aussi que les hommes vivaient dans des transes continuelles, s’attendant toujours à mourir et redoutant toujours la mort, ne pouvant goûter aucun plaisir, à cause de la terreur qui les assiégeait continuellement. Voilà, en effet, à quoi semblent faire allusion ces mots : « Durant leur vie entière ». Il fait voir ici que les affligés, les bannis, les hommes privés de leur patrie, de leur fortune, et de tous les biens, sont plus heureux et plus libres que ceux qui jadis vivaient dans les délices, que ceux qui n’avaient jamais souffert ; que ceux à qui tout réussissait. Ces hommes d’autrefois, durant leur vie entière, étaient sujets à la crainte de la mort, ils étaient esclaves ; les hommes d’aujourd’hui au contraire sont délivrés de ces terreurs et rient de ce fantôme qui faisait frémir leurs aïeux. Autrefois nous étions des prisonniers qui devaient être conduits à la mort et qui, en attendant le, moment fatal, s’engraissaient dans les délices : voilà ce que la mort faisait de nous., Aujourd’hui la mort n’est plus à craindre. Nous sommes des athlètes ; nous avons à lutter contre les délices, et ce n’est plus à la mort, c’est à la royauté que nous marchons. Quel sort est préférable à vos yeux ? Voulez-vous être le prisonnier qui s’en, graisse dans son cachot en attendant chaque jour sa sentence, ou l’athlète qui brave la fatigue et la souffrance, pour ceindre enfin le diadème royal ? Voyez-vous comme il les ranime, comme il relève leur courage ? Il leur montre non seulement la mort dont le règne est passé, mais notre ennemi implacable, et déclare le démon terrassé par la mort ; car l’homme qui ne craint pas la mort est affranchi de la tyrannie du démon. Oui : l’homme qui pour conserver sa vie, donnerait les lambeaux de sa chair et tout au monde, une fois qu’il sera parvenu à mépriser la mort, que craindra-t-il désormais ? Le voilà désormais exempt de crainte, au-dessus de tout, le plus libre de tous les êtres ! Quand on méprise la vie, en effet, on méprise à plus forte raison tout le reste. Une âme de cette trempe est assurée contre toutes les attaques du démon. A quoi bon, je vous le demande, menacer un pareil homme de la ruine, de l’infamie, de l’exil ? Qu’est-ce que tout cela, dit saint Paul, pour celui qui ne tient pas même à la vie ? Voyez-vous comme en nous affranchissant de la crainte de la mort, il a brisé la puissance du démon ? Car l’homme qui pense sérieusement à la résurrection, comment craindrait-il la mort ? Quel danger pourrait le faire frémir ? Ne vous abandonnez donc pas à la tristesse ! Ne dites pas : Pourquoi tous ces maux que nous souffrons ? Notre victoire n’en sera que plus brillante, et quel éclat aurait-elle, si la mort n’avait été vaincue par la mort ? Le miracle, d’est d’avoir vaincu le démon avec les armes qui faisaient sa force, et voilà ce qui fait ressortir le génie fécond en ressources de son vainqueur ! « Car », dit-il, « ce n’est pas un esprit de faiblesse, c’est un esprit de force, de charité et de sagesse que nous avons reçu ». (Rom. 8, coll.; 2Ti 1,7) Résistons donc généreusement et moquons-nous de la mort. 5. Mais il me prend envie de gémir, dans toute l’amertume de mon cœur, quand je compare le degré d’élévation auquel le Christ nous a fait parvenir, au degré d’abaissement auquel nous sommes descendus par notre faute. A l’aspect de cette foule qui se frappe la poitrine sur la place publique, qui gémit sur ceux qui sortent de la vie, à l’aspect de tous ces gens qui hurlent de douleur et se livrent à toutes ces lâches démonstrations, croyez-moi, je rougis devant ces Grecs, ces Juifs, ces hérétiques qui nous regardent, et dont toutes ces manifestations nous rendent la fable. Désormais toutes les méditations philosophiques que je puis faire sur la résurrection, sont en pure perte. Pourquoi ? C’est que ce n’est pas à mes paroles que les Grecs font attention, c’est à vos actes. Car ils disent aussitôt : Comment trouver un seul homme capable de mépriser la mort, parmi tous ces hommes qui ne sauraient envisager un cadavre ? Elles sont bien belles les paroles de saint Paul : oui, elles sont bien belles, elles sont dignes du ciel et de la bonté divine. Que dit-il, en effet ? « Et il affranchira tous ceux que la crainte, de la mort tenait, durant toute leur vie, dans l’esclavage ». Mais vous empêchez les païens de croire à ces paroles par votre conduite qui est en contradiction avec elles. Et, pourtant Dieu nous a, prémunis contre cette faiblesse et contre ces mauvaises habitudes. Car, je vous le demande, que veulent dire ces lampes qui brillent ? Ces morts ; ne les accompagnons-nous pas, comme s’ils étaient des athlètes victorieux ? Que signifient ces hymnes ? N’est-ce pas Dieu que nous glorifions, que nous remercions d’avoir enfin couronné le lutteur sorti de la lice ; de l’avoir affranchi de ses fatigues, de l’avoir reçu dans son sein, en bannissant toutes ses inquiétudes ? N’est-ce pas là le sens de ces hymnes, de ces psaumes ? Ce sont là autant de manifestations joyeuses. « Quelqu’un est-il dans la joie, qu’il chante ». (Jac 5,13) Mais les grecs ne pensent pas à tout cela. Ne nous parlez pas, disent-ils, de ces hommes qui font les sages, quand ils n’ont rien à souffrir ; car il n’y a rien là de bien grand ni de bien merveilleux ; montrez-nous un homme qui raisonne en philosophe, au sein même de la souffrance, et nous croirons alors à la résurrection. Que les femmes mondaines se conduisent ainsi, il n’y a rien là d’étonnant, bien qu’il y ait aussi du mal à cela. Car on leur demande aussi à elles, cette philosophie du chrétien, témoin cette parole de Paul : « Quant à ceux qui dorment dans le sein du Seigneur, je ne veux pas vous le laisser ignorer, mes frères, vous ne devez pas vous affliger, comme toutes ces personnes qui n’ont point d’espérance ». (1Th 4,12) Cela n’est pas écrit pour les religieuses, pour celles qui ont fait vœu de virginité, mais pour les femmes mondaines, pour les femmes mariées, pour les femmes du siècle. Jusqu’ici pourtant, il n’y a pas grand mal. Mais quand on voit une femme ou un homme soi-disant mort pour le monde, s’arracher les cheveux, pousser de grands gémissements, qu’y a-t-il de plus honteux ? Croyez-moi : il faudrait, pour bien faire, interdire pour longtemps à ces gens-là le seuil de l’église. Ceux qui méritent d’être pleurés en effet, ce sont ceux qui craignent la mort, ceux qu’elle fait frémir et qui ne croient pas à la résurrection. Je crois à la résurrection, me direz-vous, mais je veux suivre la coutume. Pourquoi donc, dites-moi, quand vous partez pour un long voyage, n’en faites-vous pas autant ? – Alors aussi, dites-vous, je pleure, je me lamente et j’exprime mes regrets. Mais les larmes, des funérailles sont celles de l’habitude, les larmes du départ sont celles du désespoir. Réfléchissez donc aux paroles que vous chantez quand vous pleurez ainsi. « Tourne-toi, mon âme, vers ce port tranquille ; car Dieu a répandu sur toi ses bienfaits », et ailleurs : « Je braverai le malheur, car tu es avec moi », et ailleurs encore : « Tu es mon refuge au milieu des tribulations qui m’environnent ». (Psa 116,7 ; 22, 4 et 31, 9) Réfléchissez au sens de ces paroles que vous chantez. Mais vous n’y faites pas attention ; vous êtes ivre de douleur. Réfléchissez pourtant, réfléchissez avec soin, durant ces funérailles, afin d’être sauvé quand l’heure de vos funérailles à vous, viendra à sonner. « Tourne-toi, mon âme, vers le lieu du repos ; car le Seigneur a répandu ses bienfaits sur toi ». Quoi donc ! Voilà ce que vous dites et vous pleurez ! N’est-ce pas là une scène de théâtre, n’est-ce pas là un rôle que vous jouez ? Car enfin, si, vous êtes bien convaincu de ce que vous dites, votre douleur est gratuite. Si d’un autre côté, tout cela n’est qu’un jeu : d’enfant, un rôle que vous jouez, une fable, pourquoi chanter ? pourquoi permettre à vos voisins de chanter ? pourquoi ne pas les chasser ? Mais, direz-vous, ce serait de la folie. Ah ! votre conduite en est une bien plus grande encore… Pour le moment, je me borne à vous avertir. Avec le temps, j’insisterai sur ce point, car j’ai bien peur que cette coutume ne devienne la plaie de. l’Église, Plus tard, je tâcherai de la déraciner. Pour aujourd’hui je me contente de la dénoncer, et je vous conjure, vous tous, riches et pauvres, femmes et enfants, de vous en défaire. Puissiez-vous tous sortir de la vie, sans être entourés de tout cet appareil de deuil ! que, d’après la loi de la nature, les pères arrivés à la vieillesse soient conduits à leur dernière demeure par leurs fils ; que parvenues à une vieillesse avancée et tranquille, les mères soient conduites par leurs filles, par leurs petits-fils et par leurs arrière-petits-fils, et que votre mort ne soit jamais prématurée. Puissiez-vous avoir ce bonheur ! Je vous le souhaite et je le demande à Dieu pour vous. Je vous en prie, je vous y exhorte : priez Dieu les uns pour les autres, et que mes vœux soient les vôtres à tous ! Si, ce qu’à Dieu ne plaise, votre mort était cruelle (je dis cruelle, non que la mort soit cruelle en elle-même, puisque c’est un sommeil, mais enfin je dis cruelle, pour me mettre à votre point de vue), s’il en était ainsi, et si quelqu’un d’entre vous louait des pleureuses à gages, croyez-moi, car je parle sérieusement et j’y suis bien décidé, croyez-moi, et fâchez-vous, si vous voulez, j’interdirai pour longtemps l’église au coupable. Car si Paul traite les avares d’idolâtres, ils sont bien plus idolâtres encore ceux qui introduisent dans le séjour des fidèles les pratiques de l’idolâtrie. Pourquoi en effet, je vous le demande, appeler des prêtres et des chantres ? N’est-ce pas pour vous consoler vous-même, n’est-ce pas pour honorer celui qui est sorti de ce monde ? Pourquoi donc l’insulter ? Pourquoi le donner en spectacle ? Pourquoi ces pratiques théâtrales ? Nous venons à vous pour méditer sur la résurrection, pour vous instruire tous, pour apprendre, par honneur pour l’apôtre, à ceux qui ne sont point encore frappés, le moyen de supporter avec courage les coups du sort, et vous nous amenez des personnes qui s’efforcent pour leur part, de détruire notre ouvrage ? 6. Quoi de plus odieux qu’une dérision aussi amère ? Quoi de plus grave qu’une conduite aussi irrégulière ? Rougissez et soyez couverts de confusion. Si vous ne voulez pas changer de conduite, nous ne pouvons souffrir, nous, que ces pernicieuses : habitudes s’introduisent dans l’Église. « Accusez », est-il dit, « les pécheurs devant tout le monde ». (1Ti 5,28) Oui, nous défendons à ces malheureuses que vous amenez ici, d’assister aux funérailles des fidèles, sous peine do, se voir forcées à pleurer, avec des larmes véritables, non pas le malheur des autres, mais leurs propres infortunes. Un père qui aime son fils, quand ce fils se dérange, ne se borne, pas à lui interdire la société des méchants, il effraie les méchants. Je vous engage donc à ne pas appeler ces femmes, et je les engage à ne pas se présenter. Et fasse le ciel que nos paroles soient écoutées et que nos menaces ne soient pas vaines ! Si, ce qu’à Dieu ne plaise, on méprisait nos avis, nous serions forcés de joindre l’effet à la menace, en vous traitant d’après les lois ecclésiastiques, et en traitant ces femmes, comme elles le méritent. Si quelqu’un accueillait nos paroles avec un mépris insolent, nous lui dirions d’écouter du moins ces paroles du. Christ : « Si votre frère a péché contre vous, allez lui représenter sa fauté en particulier entre vous et lui, s’il ne vous écoute point, prenez encore avec vous une ou deux personnes ; s’il ne les écoute pas non plus, dites-le à l’église ; et s’il n’écoute pas l’église même, qu’il soit à votre égard comme un païen et un publicain ». (Mat 18,15-17) Si je dois haïr ainsi celui qui se rend coupable de désobéissance envers moi, je vous laisse à penser la conduite que je dois tenir à l’égard de celui qui est coupable envers Dieu et envers lui-même, puisque vous condamnez la mollesse et l’indulgence dont nous usons envers vous. Si, vous méprisez nos liens, que le Christ vous instruise en ces termes : « Tout ce que vous aurez lié sur la terre, sera lié dans le ciel, et tout ce que vous aurez délié sur la terre, sera délié dans le ciel ». (Mat 18,18) Malgré notre néant, et tout malheureux, tout digne de mépris que nous sommes, nous ne nous vengeons pas, nous ne vous rendons pas outrage pour outrage, mais noua veillons à votre salut. Rougissez donc, je vous en supplie, et que votre visage se couvre de confusion ; car si l’on souffre la véhémence d’un ami qui s’emporte contre nous, par égard pour le but qu’il se propose, et pour la bienveillance dénuée de hauteur qui lui dicte ses paroles, à combien plus forte raison ne devez-vous pas supporter les reproches d’un maître, surtout quand ce maître ne vous parle point en son nom, surtout quand il vous parle non comme un chef, mais comme un tuteur ! Ici en effet nous n’avons pas pour but de faire acte d’autorité, puisque notre désir est que vous ne nous réduisiez pas à vous faire sentir notre pouvoir. Mais nous vous plaignons et nous pleurons sur vous. Pardonnez-nous et ne méprisez pas les liens de l’église ; car ce n’est pas l’homme qui lie, c’est le Christ qui nous a donné le pouvoir de lier et qui a voulu, que les hommes fussent honorés, de ce pouvoir : nous voudrions n’en faire usage que pour délier, que dis-je ? nous voudrions que ce dernier acte, même ne fit pas nécessaire. Car nous ne voudrions pas qu’il y eût des prisonniers parmi vous ; nous ne sommes point assez infortunés et assez, misérable pour former, un pareil vœu, malgré notre néant. Mais si : vous nous imposez un triste devoir, pardonnez-nous. Ce n’est pas de bon cœur, ce n’est pas de plein gré, c’est en gémissant plus que ceux qui sont dans nos liens, que nous vous chargeons de chaînes. Et si vous méprisez nos liens, le jour du jugement viendra vous instruire. Je ne veux pas, vous en dire davantage, pour ne pas frapper vos âmes de terreur. Car avant tout, nous vous prions de ne pas nous réduire à une dure nécessité ; mais, si vous nous y forcez, nous ferons notre devoir, nous vous chargerons des liens. Si vous les brisez, j’aurai fait, ce qui dépend de moi et je ne serai pas en faute. Mais il vous faudra compter avec celui qui m’a donné l’ordre de lier. Que sur l’ordre du roi, un de ses gardes reçoive l’ordre de lier un des assistants et, de le charger de chaînes, si le condamné repousse le garde, et non content de cela, brise ses fers, ce ne sera pas le satellite qui sera outragé, ce sera bien plutôt le roi de qui l’ordre émane. Si donc, selon Dieu même ; ce que l’on fait à ses fidèles, on le fait à Dieu, les outrages que vous adressez, à ceux qui ont reçu mission de vous instruire, remontent jusqu’à lui : n’est comme si vous l’outragiez lui-même. Mais à Dieu ne plaise que l’un de ceux qui sont dans cette assemblée en vienne à nette extrémité et nous réduise à le lier ! Car s’il est bon de ne pas pécher, il est utile de savoir supporter les réprimandes ; sachons donc les supporter, étudions-nous à ne pas pécher ; mais si nous péchons, sachons supporter la réprimande. Il est bon d’éviter les blessures ; mais ; en cas de blessure, il faut panser la plaie. Agissons de même ici. Ah ! fasse le ciel que personne ici n’ait besoin des secours de la médecine ! « Car nous avons une meilleure opinion de vous et de votre salut, quoique nous parlions de la sorte ». (Heb 6,9) Si nous vous avons parlé avec quelque vivacité, avec quelque véhémence, c’est pour plus de sûreté. J’aime mieux en effet passera vos yeux pour un homme audacieux, cruel et fier, que de vous voir faire quelque chose qui pourrait déplaire à Dieu.. Nous avons confiance en lui, et nous croyons que cette réprimande ne vous sera pas inutile ; nous croyons que vous vous corrigerez et que, grâce à ces observations, vous finirez par mériter nos éloges. Puissions-nous vivre de manière à nous rendre agréables à Dieu, de manière à obtenir tous tant que nous sommes, les biens qu’il a promis à ceux qui l’aiment, par la grâce de Jésus-Christ, Notre-Seigneur… Voir le début du chap. 3.