John 9
HOMÉLIE LVI.
COMME JÉSUS PASSAIT, IL VIT UN HOMME QUI ÉTAIT AVEUGLE DÈS SA NAISSANCE. – ET SES DISCIPLES LUI FIRENT CETTE DEMANDE : MAÎTRE, EST-CE LE PÉCHÉ DE CET HOMME, OU LE PÉCHÉ DE CEUX QUI L’ONT MIS AU MONDE, QUI EST CAUSE QU’IL EST NÉ AVEUGLE ? (CHAP. 9, VERS. 1, 2, JUSQU’AU VERS. 6)
ANALYSE.
- 1. Guérison de l’aveugle-né. – Nul n’est puni pour le péché de ses parents.
- 2. Jésus-Christ, en rendant la vue à l’aveugle-né, prouvait aux Juifs qu’il est le Créateur.
- 3. Contradiction apparente ; expliquée. – Saint Paul appelle nuit ce que Jésus-Christ appelle jour, et jour ce qu’il appelle nuit. Félicité de la céleste patrie. – Ce qu’il faut faire pour y parvenir. – Les pauvres nous bâtissent des maisons dans le ciel. Répandre ses biens sur eux.
1. « Comme Jésus passait, il vit un homme qui était aveugle dès sa naissance (1) ». Jésus-Christ, dans son humanité, son zèle pour notre salut, et sa volonté de fermer la bouche aux méchants, ne négligeait rien de ce qu’il lui appartenait de faire, même quand il ne rencontrait qu’indifférence autour de lui. C’est parce que le prophète savait cela qu’il a dit : « Afin que vous soyez reconnu juste et véritable dans vos paroles ; et que vous demeuriez victorieux, lorsqu’on jugera de votre conduite ». (Psa 51,5) Voilà pourquoi maintenant les Juifs ne pouvaient atteindre à la sublimité de ses paroles, que dis-je ? lorsqu’ils l’appelaient démoniaque, et qu’ils cherchaient à le faire mourir ; étant sorti du temple, il guérit un aveugle, afin d’apaiser leur fureur même par son absence, afin d’amollir la dureté de leur cœur, et d’adoucir leur inhumanité par un miracle, et aussi de persuader sa doctrine, de lui donner plus de foi et de créance : et le miracle qu’il fait n’est ni commun ni ordinaire, mais tel que jusqu’alors on n’en avait point vu de pareil. « Depuis que le monde est », dit l’aveugle, « on n’a jamais ouï-dire que personne ait ouvert les yeux à un aveugle-né ». Car peut-être quelqu’un a ouvert les yeux, d’un aveugle, mais non pas d’un aveugle-né. Or, que Jésus, étant sorti du temple, soit venu exprès et dans l’intention d’opérer le miracle, ce qui le prouve manifestement, le voici : Il est allé chercher l’aveugle, et l’aveugle ne l’est point venu chercher. Et encore : Il l’a regardé avec tant d’attention, que ses disciples l’ayant aperçu, se portèrent à lui faire cette demande : « Maître, est-ce le péché de cet homme, ou le péché de ceux qui l’ont « mis au monde, qui est cause qu’il est né aveugle ? » Question fondée sur une fausse supposition : car, avant de naître, comment cet homme aurait-il pu commettre quelque péché ? Pourquoi aurait-il été puni pour le péché de ses pères ? Sur quoi donc les disciples se sont-ils portés à faire cette question ? Jésus-Christ, ayant auparavant guéri le paralytique, lui dit : « Vous voyez que vous êtes guéri, ne péchez plus à l’avenir ». (Jn 5,14) De là les disciples connurent que cet homme était devenu paralytique en punition de son péché, et ils raisonnèrent entre eux de la sorte. Que cet homme soit tombé dans la paralysie à cause de ses péchés, soit, cela peut être ; mais que direz-vous de celui-ci ? est-ce pour ses péchés qu’il est ainsi frappé d’aveuglement ? C’est ce qu’on ne peut dire, car il est né aveugle. Peut-être ce sont les, péchés de ses parents qui lui ont attiré cette disgrâce ? Mais c’est encore là ce qu’on ne peut dire : car le fils n’est point puni pour les fautes de son père. Si nous voyons maltraiter un enfant, nous disons : Qu’est-ce que cela signifie ? Qu’a donc fait cet enfant ? Ce n’est pas là interroger, mais seulement manifester de l’étonnement et du doute. De même les disciples parlaient, de la sorte, non tant pour interroger que pour exposer leur doute. Que répondit donc Jésus-Christ ? « Ce n’est point qu’il ait péché, ni ceux qui l’ont mis au monde (33) ». Et il ne dit pas cela pour marquer qu’ils soient tout à fait exempts de péché ; car il n’a pas seulement dit : « Ce n’est point qu’il ait péché, ni ceux qui l’ont mis au monde », mais il a ajouté. « Ce qui est cause qu’il est né aveugle, c’est afin que le Fils de Dieu soit glorifié ». Cet homme-ci a péché, et ses parents ont péché aussi, mais ce n’est point là ce qui est cause de son aveuglement. Enfin Jésus-Christ, parlant en ces termes, n’a pas voulu nous faire entendre que véritablement celui-ci n’était point aveugle pour cette cause, mais que d’autres l’étaient, à savoir, pour le péché de leurs parents ; car il n’est pas permis de punir l’un pour le péché de l’autre. En effet, si nous l’accordions, il faudrait convenir aussi que cet homme avait péché avant de naître. De même donc que le Sauveur disant : « Ce n’est point qu’il ait péché », n’entend pas qu’il y ait des hommes qui pèchent dès leur naissance, et qui soient punis pour cela ; ainsi lorsqu’il dit : « Ni ceux qui l’ont mis au monde », il ne veut pas dire qu’il y ait quelqu’un de puni pour les péchés de ses pères. Il ôte ce soupçon par la bouche d’Ézéchiel : « Je jure par moi-même, dit le Seigneur, qu’on n’entendra point dire cette parabole : Les pères ont mangé des raisins verts, et les dents des enfants en sont agacées ». (Eze 18,34) Moïse dit aussi « On ne fera point mourir le père pour l’enfant ». (Deu 24,16) De plus, l’Écriture Ait d’un certain roi, qu’il ne fit point mourir les enfants pour les pères, afin de se conformer à la loi de Moïse. Que si quelqu’un me fait cette objection pourquoi donc l’Écriture dit-elle : « Dieu punit les crimes des pères sur les enfants, jusqu’à la troisième et quatrième génération ? » (Exo 20,5 ; Deu 5,9) ; nous répondrons que cette sentence n’est point générale, et qu’elle est prononcée contre quelques-uns des Juifs qui étaient sortis de l’Égypte, et en voici le sens : Comme ceux que j’ai tirés de la captivité de l’Égypte sont devenus, même après avoir vu tant de miracles et de prodiges, plus méchants encore que leurs pères, qui toutefois n’avaient rien vu de si grand ni de si admirable, ils seront punis de même qu’eux, dit le Seigneur, parce qu’ils ont commis les mêmes crimes. Et si l’on examine ce passage avec soin et avec attention, on connaîtra fort bien que c’est ainsi qu’il le faut entendre. Pourquoi cet homme est-il donc né aveugle ? « Afin », dit l’Écriture, « que la gloire de Dieu éclatât ». – D’où naît encore une autre question, savoir : si la gloire de Dieu ne pouvait se manifester que par l’aveuglement de cet homme ? Certes, l’Écriture ne dit point que la puissance de Dieu n’a pu autrement se montrer, car sûrement elle le pouvait ; mais c’est afin qu’elle se manifestât encore dans ce miracle. Quoi ! direz-vous, cet homme a donc reçu cette disgrâce pour faire éclater la gloire de Dieu ? Mais quel mal, je vous prie, lui en est-il arrivé ? Et si le Seigneur n’avait point voulu qu’il vint au monde, qu’auriez-vous à répliquer ? Mais moi, je dis que de cet aveuglement même, est résulté pour lui un bien : car il a vu des yeux de l’âme. De quoi a-t-il servi aux Juifs d’avoir des yeux ? En voyant ils ont été comme des aveugles qui ne voient point, et ils se sont attiré un plus grand supplice. Mais la cécité, quel tort a-t-elle fait à celui-ci ? pour avoir été aveugle, il a reçu la vue. Comme donc les maux de cette vie ne sont point de vrais maux, de même les biens ne sont pas de vrais biens. Mais le péché seul est un mal, la cécité, au contraire, n’est point un mal. Or, celui qui tire toutes choses du néant, « est le maître », il a pu laisser cet aveugle en cet état. Toutefois quelques-uns disent que ce mot « afin que b, n’est point ici une particule causale, et qu’il marque seulement l’événement qui suivit : comme lorsque Jésus-Christ dit : « Je suis venu dans ce monde pour exercer un jugement, afin que ceux qui ne voient point, voient, et que ceux qui voient deviennent aveugles ». (Jn 9,39) Car le Sauveur n’est pas venu, afin que ceux qui voyaient devinssent aveugles. Et encore : « Car ils ont connu », dit saint Paul, « ce qui se peut découvrir de Dieu ; et ainsi ces personnes sont inexcusables ». (Rom 1,19, 20) Néanmoins, Dieu ne leur a pas découvert ses perfections, pour les rendre inexcusables, mais pour leur donner un moyen de se justifier. Et derechef, en un autre endroit : « Or, la loi est survenue, afin que le péché abondât ». (Rom 5,20) Et cependant la loi n’est pas survenue pour porter l’homme au péché, mais, au contraire, pour le retenir et l’empêcher d’y tomber. 2. Vous voyez, mes frères, que partout la particule : « Afin que », n’est que pour marquer l’événement, ou ce qui est arrivé en conséquence. Tel qu’un habile architecte, Dieu a d’abord achevé une partie de la maison qu’il a voulu construire, il a laissé l’autre imparfaite, afin qu’en la finissant ensuite, il fermât la bouche aux incrédules relativement à l’origine de tout l’ouvrage. Ainsi il joint ensemble les différentes parties de notre corps, il achève ce qui y manquait, et il y travaille comme à une maison qui serait prête à tomber, lorsqu’il rend saine la main qui est desséchée, lorsqu’il affermit les membres du paralytique, qu’il fait marcher les boiteux, qu’il guérit les lépreux, qu’il rend la santé aux malades, qu’il fortifie les jambes faibles, qu’il ressuscite les morts, qu’il ouvre les yeux qui étaient fermés, qu’il en donne à ceux qui n’en avaient point. Il répare donc tous les défauts de notre faible nature, et c’est par où il découvre, il manifeste sa puissance. Au reste, quand Jésus dit : Afin que la puissance de. Dieu éclate, c’est de lui qu’il parle, et non du Père. Car la puissance du Père était parfaitement connue. Or, comme les Juifs avaient ouï dire que Dieu, pour former l’homme, avait pris du limon de la terre ; pour cette même raison, Jésus-Christ se servit aussi de boue. S’il eût dit : C’est moi qui ai pris de la boue, et qui en ai formé l’homme, cette parole aurait choqué ses auditeurs. Mais en le faisant voir par l’œuvre même qu’il opère, il a réfuté toutes les objections. Le Sauveur, donc, ayant pris de la poussière, la délaya avec sa salive, et par là il découvrit sa puissance, qui était cachée, et la fit éclater. En effet, il n’y avait pas peu de gloire à se faire connaître pour le Créateur. Car de là s’ensuivait tout le reste, une partie faisant croire le tout. La créance ne faisait ainsi que descendre du plus au moins. En effet, de toutes les choses créées, l’homme est ce qu’il y a de plus éminent, et l’œil est le plus précieux de tous ses organes : voilà pour quoi, dans la miraculeuse guérison dont nous parlons, le Sauveur ne créa pas simplement l’œil, mais le créa de la manière que nous venons de rapporter. Car, quoique l’œil soit un fort petit organe, néanmoins il est nécessaire au corps. Saint Paul le déclare par ces paroles : « Et si l’oreille disait : Puisque je ne suis pas œil, je ne suis pas du corps ; ne serait-elle point pour cela du corps ? » (1Co 3,16) Tout ce qui est en nous manifeste la divine puissance de celui qui l’a formé ; mais l’œil la fait beaucoup plus éclater, puisque c’est lui qui gouverne tout le corps, qui en fait la beauté, qui est le bel ornement du visage, et la lampe qui éclaire tous les membres. L’œil est au corps ce qu’est le soleil au monde. Si vous éteignez la lumière du soleil, vous mettez tout dans le trouble et la confusion, vous perdez tout. Si vous éteignez les yeux, les pieds et les mains sont inutiles, l’âme l’est aussi. La perte des yeux entraîne avec soi la ruine de la raison. En effet, c’est par eux que nous sommes parvenus à la connaissance de Dieu. « Car les perfections invisibles de Dieu sont devenues visibles depuis la création du monde, par la connaissance que ses créatures nous en donnent ». (Rom 1,20) L’œil n’est donc pas seulement la lampe du corps (Mat 6,22 et suiv) mais il l’est plus encore de l’âme gaie du corps. C’est pourquoi il est placé en haut comme sur un trône royal, et il est élevé au-dessus des autres sens. Jésus-Christ forme donc l’œil. Ensuite, afin que vous ne croyiez point qu’il ait eu besoin de la matière pour faire l’œuvre qu’il voulait opérer, et que vous appreniez qu’au commencement, quand il a créé toutes choses, la boue dont il s’est servi ne lui était point nécessaire : car celui qui de rien a produit les substances les plus grandes et les plus excellentes pouvait, à plus forte raison, former celle-ci sans faire usage d’aucune matière, s’il l’avait voulu. Pour vous apprendre, dis-je, qu’il n’en a nullement eu, besoin, et vous montrer que c’est lui qui, au commencement, a créé toutes choses, ayant appliqué la boue sur la place de l’œil, il dit : Allez, « lavez-vous (7) », afin que vous sachiez que, pour former des yeux, il ne m’est pas nécessaire d’avoir en main de la boue, et que je ne m’en sers que pour faire éclater ma gloire et ma puissance. Le Sauveur donc, pour montrer qu’il parle de sa propre personne, lorsqu’il dit : « Afin que la gloire de Dieu éclate », a ajouté : « Il faut que je fasse les œuvres de celui qui m’a envoyé (4) » ; c’est-à-dire, il faut que je me fasse connaître moi-même, et que je produise tout ce qui est capable de prouver que je fais les mêmes œuvres que mon Père fait : non de semblables, mais les mêmes ; ce qui marque une plus grande égalité, et ne se peut dire que de ceux qui n’ont pas même entre eux la moindre inégalité. Qui donc osera maintenant combattre cette égalité du Fils, voyant qu’il est capable des mêmes œuvres que le Père a le pouvoir de faire ? En effet, non seulement il a formé des yeux, non seulement il en a ouvert, mais il a donné la faculté de voir, ce qui prouve manifestement qu’il a aussi inspiré l’âme. Car si l’âme n’agit, quelque sain, quelque entier que l’œil soit, jamais il ne verra rien. C’est pourquoi il a aussi communiqué à l’âme la faculté d’agir, et il a donné à cet homme un œil composé d’artères, de nerfs, de veines, de sang, et de toutes les autres choses dont notre corps est construit. « Il faut que je fasse des œuvres pendant qu’il est jour ». Que signifient ces paroles ? Quelle suite ont-elles ? Elles en ont une véritable. Car Jésus-Christ veut dire ceci : Pendant qu’il est jour, pendant que les hommes peuvent croire en moi, et que je vis, il faut que je fasse des œuvres. « La nuit vient », c’est-à-dire le temps approche « où l’on ne pourra rien faire ». Le Seigneur n’a point dit : Dans lequel je ne pourrai point agir, mais : « Où l’on ne pourra rien faire », c’est-à-dire dans lequel il n’y aura plus ni foi, ni œuvre, ni pénitence. Et comme Jésus appelle la foi une œuvre, ils lui disent : « Que ferons-nous pour faire des œuvres de Dieu ? » (Jn 6,28) Il répond : « L’œuvre de Dieu est que vous croyiez en celui qu’il a envoyé ». (Id 29) Pourquoi donc personne alors ne pourra-t-il faire cette œuvre ? Parce qu’alors la foi ne subsistera plus, et que tous écouteront, soit qu’ils le veuillent ou qu’ils ne le veuillent pas. Et afin que les Juifs ne pussent pas dire que Jésus-Christ agissait par un mouvement d’ambition et de vanité, il leur montre que tout ce qu’il fait c’est pour eux, c’est pour leur salut qu’il le fait ; puisque c’est seulement en ce monde qu’on peut croire et opérer des œuvres, et qu’en l’autre la foi ne leur servira de rien, qu’ils ne pourront plus ni travailler ni mériter. Voilà pourquoi le divin Sauveur guérit l’aveugle, sans même que celui-ci vînt le chercher ni l’en prier. Mais toutefois ce qui a suivi sa guérison, je veux dire sa foi et sa fermeté, prouvent manifestement qu’il était digne de cette grâce ; que s’il avait vu, il serait venu trouver Jésus et aurait cru en lui ; et que s’il avait ouï dire à quelqu’un qu’il était présent, il n’eût pas manqué d’accourir. Il pouvait, en effet, penser et dire en lui-même : Qu’est-ce que cela signifie ? Jésus a fait de la boue, il en a oint mes yeux et m’a dit : « Allez, lavez-vous ? » Est-ce qu’il ne pouvait pas me guérir en m’envoyant alors à la piscine de Siloé ? Souvent je m’y suis lavé avec les autres et cela ne m’a servi de rien. Si véritablement il avait le pouvoir de me rendre la vue, il m’aurait guéri sur-le-champ, sans m’envoyer courir. C’est ce que Naaman disait aussi à Élisée (2Ro 5,11) : le prophète lui ayant ordonné de se laver dans le Jourdain, il n’y avait point de foi. Et cependant Élisée jouissait d’une très-grande réputation. Mais cet aveugle ne fut pas incrédule, il ne disputa point, il ne dit point en lui-même : Que veut dire cela ? Fallait-il qu’il mît de la boue sur mes yeux ? C’est plutôt là de quoi m’aveugler. Qui a jamais recouvré la vue de cette manière ? Mais il n’eut aucune de ces pensées. Maintenant, mes frères, remarquez-vous cette foi et cette fermeté d’âme ? « La nuit vient » : Par là Jésus-Christ fait connaître qu’après même qu’il aura été élevé sur une croix, qu’après sa mort il aura soin encore des pécheurs, et qu’il en attirera plusieurs. « Il est encore jour », mais après que le jour sera passé, il retranchera, il rejettera absolument les méchants ; c’est ce qu’il déclare formellement en ces termes : « Tant que je suis dans le monde, je suis la lumière du monde (5) ». Et il le dit aussi ailleurs : « Croyez, pendant que vous avez la lumière ». 3. Pourquoi saint Paul a-t-il donc appelé nuit la vie présente, et jour celle qui la suivra ? Néanmoins il n’avance rien de contraire aux paroles de Jésus-Christ ; loin de là, il dit les mêmes choses, non selon la terre, mais selon le sens, savoir : « La nuit est passée, il fait jour ». (Rom 13,12) Car le temps présent il l’appelle nuit, à cause de ceux qui sont assis dans les ténèbres, ou par comparaison de cette vie pleine de ténèbres à la vie lumineuse, dont on jouira dans le ciel ; mais Jésus-Christ appelle le temps futur une nuit, parce qu’alors ▼▼Alors,
c à d dans ce temps futur.
on ne péchera plus. L’apôtre appelle au contraire une nuit la vie présente, parce que ceux qui vivent dans l’iniquité et l’incrédulité sont dans les ténèbres. Adressant donc la parole aux fidèles ; il dit : « La nuit est passée, il fait jour ». Parce qu’ils sont destinés à jouir un jour de cette lumière : mais leur première vie, il l’appelle une nuit ; c’est pourquoi il leur dit : « Quittons donc les œuvres de ténèbres ». (Id) Remarquez qu’il leur déclare qu’ils étaient dans la nuit ; pour cette raison il ajoute « Marchons avec bienséance et avec honnêteté, comme on marche durant le jour », afin que nous puissions jouir de la lumière « qui nous est annoncée ». Car si la lumière, « que nous présente maintenant la prédication de l’Évangile », est si lumineuse et si éclatante, songez à ce que sera celle dont vous jouirez dans le ciel ? Soyez-en persuadés : autant les rayons du soleil éclipsent la lumière des lampes, autant, ou plutôt beaucoup plus, la lumière céleste que nous vous annonçons surpassera celle-ci. Et c’est là ce que voulait dire le Sauveur par ces paroles : « le soleil s’obscurcira » (Mat 24,29) : c’est-à-dire, il sera éclipsé par la splendeur de la lumière nouvelle. Que si maintenant, pour avoir des maisons bien éclairées, bien aérées, nous dépensons notre argent et nos peines à bâtir ; ne pensez-vous pas que nous devions épuiser jusqu’à nos dernières forces, pour nous édifier dans le ciel de splendides demeures, là où habite l’ineffable lumière ? En bâtissant ici-bas, nous nous exposons à des querelles et à des procès pour des bornes et des cloisons, au lieu que là-haut il ne nous peut rien arriver de semblable : l’envie et la jalousie n’y étant point à craindre, personne ne nous fera de procès pour les limites. Mais, de plus, cette maison que nous construisons ici-bas, nécessairement il faudra la quitter ; et l’autre, nous l’habiterons éternellement : l’une dépérit et le temps la dévore, elle est sujette à bien des accidents ; l’autre est stable et demeure toujours dans son premier état : le pauvre ne peut bâtir celle-ci ; l’autre, pour deux oboles même on la construit, comme fit la veuve que vous connaissez tous. (Mrc 12,12) C’est pourquoi je sèche, je meurs de tristesse et de douleur, de voir qu’ayant à espérer de grands biens, nous soyons si lâches et si négligents à nous les procurer, et que nous n’omettions rien pour nous établir ici dans de belles maisons, tandis que nous ne nous soucions point de nous préparer dans le ciel le moindre logement. Dites-moi, je vous prie : dans ce monde, où voudriez-vous avoir votre maison ? Est-ce au désert, ou en quelque petit bourg ? Non, mais, je pense, dans une grande capitale, là où se fait un plus grand commerce, où éclate une plus grande splendeur. Et moi, je vous mène dans une ville dont Dieu est l’architecte et l’ouvrier. Je vous en conjure, mes chers frères, bâtissons-y ; bâtissons où il en coûte et moins de dépense et moins de travail. Ce sont les mains des pauvres qui construisent ces maisons, et voilà la vraie manière de bâtir : ce qui se fait en ce monde n’est bon qu’à attester notre extrême folie. Si quelqu’un vous engageait à faire un voyage en Perse, pour voir le pays et vous en revenir aussitôt après ; et s’il vous conseillait en même temps d’y bâtir des maisons, ne le jugeriez-vous pas bien fou de vous porter à une vaine et inutile dépense ? Pourquoi bâtissez-vous donc sur cette terre, d’où vous devez sortir sous peu de jours ? Mais, direz-vous, ces maisons que je fais bâtir, je les laisserai à mes enfants. Eh ! vos enfants doivent bientôt vous suivre, s’ils ne vous devancent pas : et il en sera de même de leur postérité, et en ce monde même, c’est un sujet de chagrin et d’affliction que de se trouver sans héritier. Mais dans le royaume céleste vous n’avez rien de pareil à craindre : l’héritage que vous y posséderez ne sera sujet à aucun changement, il vous demeurera entier à vous, à vos enfants et à vos petits-fils, s’ils imitent votre vertu. C’est Jésus-Christ qui construit l’édifice ; avec un si habile architecte, on n’a nullement besoin d’inspecteurs ; on est exempt de toute inquiétude. Dieu se charge lui-même de tout ; de quoi auriez-vous à vous mettre en peine ? C’est lui qui assemble les matériaux, qui élève la maison. Et ce n’est point là seulement ce qui est admirable, mais c’est qu’il la construit selon vos désirs, ou plutôt, beaucoup mieux encore que vous ne le pourriez désirer. Car il est excellent architecte, et il s’attache à vous procurer toutes sortes de commodités et d’avantages. Si, étant pauvre, vous voulez bâtir cette maison, ne craignez point, elle ne vous suscitera ni envie, ni jalousie ; l’envieux ne 1a voit point, mais seulement les anges qui se réjouissent de vos félicités. Personne ne pourra anticiper sur les bornes de votre héritage, parce gaie vous n’aurez point de voisin qui soit attaqué de cette maladie. Là, vos voisins, ce seront les saints, Pierre, Paul, tous les patriarches, les martyrs, la compagnie des anges et des archanges. C’est pourquoi, mes très-chers frères, répandons nos biens et nos richesses sur les pauvres, afin d’acquérir ces demeures. Plaise à Dieu que nous les obtenions tous, par la grâce et la bonté de Notre-Seigneur Jésus-Christ, par lequel et avec lequel gloire soit au Père et au Saint-Esprit, dans tous les siècles des siècles ! Ainsi soit-il. HOMÉLIE LVII.
JÉSUS, APRÈS LEUR AVOIR DIT CELA, CRACHA A TERRE, ET AYANT FAIT DE LA BOUE AVEC SA SALIVE, IL OIGNIT DE CETTE BOUE LES YEUX DE L’AVEUGLE ; ET IL LUI DIT : ALLEZ VOUS LAVER DANS LA PISCINE DE SILOÉ. (VERS. 6, 7, JUSQU’AU VERS. 16) ANALYSE.
- 1. Comment, à propos de l’aveugle-né, les Juifs, en combattant la vérité, la font briller davantage.
- 2. Interrogé par les Pharisiens, l’aveugle-né leur répond avec courage et rend gloire à Dieu.
- 3. Désappointement des Pharisiens, ils injurient l’aveugle.
- 4 et 5. Ce qui est écrit dans les Écritures nous doit servir d’exemple et de modèle. – L’aveugle-né guéri est un grand modèle des vertus chrétiennes. – Fermeté que doivent avoir les fidèles à soutenir la religion et la vérité. – Courage avec quoi ils doivent défendre et soutenir leurs frères. – C’est dans la lecture et la méditation des livres saints que nous trouverons des armes pour combattre nos adversaires. – Avec quelle attention il faut écouter la parole de Dieu. – Contre les spectacles : on y court plus volontiers et avec plus d’empressement qu’à l’Église, où l’on apprend les vérités du salut. – On est savant dans ce qui regarde le théâtre, et ce qui est nécessaire à savoir on l’ignore. – On ignore sa religion, on ne connaît point les livres de l’Écriture sainte et le nom de leurs auteurs, mais on sait faire de grands discours sur ce qui concerne les spectacles : maux, pertes qu’ils causent. – Dieu nous a donné le temps pour le servir : l’employer à des inutilités, c’est faire une grande perte. – Ce que c’est que la perte du temps : c’est de quoi on doit être le plus avare.
1. Il ne faut pas se borner à lire les Écritures en courant : vous devez les méditer avec beaucoup de soin et d’attention, de peur que vous ne vous trouviez tout à coup arrêtés. Par exemple, on peut ici justement soulever cette question : comment les Juifs, après avoir dit : « Cet homme n’est point » envoyé « de Dieu, puisqu’il ne garde pas le sabbat », disent-ils maintenant : « Et toi, que dis-tu de cet homme qui t’a ouvert les yeux ? » Ils ne dirent pas : et toi, que dis-tu de cet homme qui viole le sabbat, mais ils mettent maintenant la justification à la place de l’accusation. Que faut-il donc répondre ? Ce ne sont pas ici les mêmes qui disaient : cet homme n’est point envoyé de Dieu, mais ce sont ceux qui, étant d’un sentiment contraire, avaient dit : un méchant homme ne peut pas faire de tels prodiges. Ceux-ci voulant fermer la bouche aux autres, sans paraître néanmoins prendre la défense de Jésus-Christ, font amener l’homme qui portait sur son visage les marques de la vertu et de la puissance de son médecin, et l’interrogent. Remarquez donc, mon cher auditeur, la sagesse de ce pauvre mendiant, qui parla avec plus de prudence qu’eux tous. Tout d’abord, il dit : « C’est un prophète », sans s’effrayer du mauvais jugement que portaient de lui les Juifs, qui, s’opposant de toutes leurs forces et au miracle et à sa réputation, disaient : « Comment cet homme peut-il être » envoyé « de Dieu, puisqu’il ne garde pas le sabbat ? » Mais il a dit : « C’est un prophète. Mais les Juifs ne crurent point que cet homme eût été aveugle et eût recouvré la vue, jusqu’à ce qu’ils eussent fait venir son père et sa mère ». Faites attention à tous les artifices dont ils usent pour couvrir et faire disparaître le miracle. Mais la vérité est de telle nature qu’elle se fortifie et s’affermit par les mêmes armes avec lesquelles ses adversaires la combattent ; et que les vains efforts qu’ils font pour l’obscurcir, ne servent qu’à la faire briller davantage. Si les Juifs n’avaient pas fait toutes ces choses, beaucoup auraient pu douter du miracle : mais, voici qu’ils agissent comme s’ils n’avaient d’autre but que de dévoiler la vérité : ils ne s’y seraient pas pris autrement, s’ils avaient effectivement travaillé pour Jésus-Christ. En effet, dans l’intention de le perdre, ils demandent : « Comment t’a-t-il ouvert les yeux ? » C’est-à-dire, sans doute, c’est par des prestiges et des enchantements ? En effet, dans une autre occasion où ils n’ont rien à objecter, ils s’efforcent de calomnier dans leur principe les guérisons et les miracles, en disant : « Cet homme ne chasse les démons que par la vertu de Belzébuth ». (Mat 12,24) Ici, de même, n’ayant rien à objecter, ils se retranchent sur le temps et sur la violation du sabbat ; ils disent encore : Cet homme est un pécheur. Mais cet homme, que votre envie ne peut souffrir et dont vous déchirez la réputation, cet homme vous a défiés de la manière la plus nette, en vous disant : « Qui de vous me peut convaincre d’aucun péché ? » (Jn 8,46) Et personne n’a répondu, personne n’a dit : Vous vous dites impeccable, vous blasphémez : or, s’ils avaient eu de quoi lui faire le moindre reproche, sûrement ils n’auraient point gardé le silence. En effet, des gens qui furent capables de jeter des pierres sur lui, lorsqu’il dit qu’il était avant qu’Abraham fût au monde (Id 58), qui niaient qu’il était le Fils de Dieu, lorsqu’eux-mêmes se vantaient d’être enfants de Dieu, quoiqu’ils fussent des homicides, et qui disaient que celui qui faisait de si grands miracles, n’était pas envoyé de Dieu, parce qu’il ne gardait pas le sabbat, et cela à la suite d’une guérison : ces gens-là, s’il y avait eu le moindre reproche à lui faire, certainement n’y auraient pas manqué. Au reste, s’ils l’appelaient pécheur, parce qu’il semblait ne pas garder le sabbat, leur accusation était ridicule et frivole au jugement même de leurs compagnons qui l’imputaient eux-mêmes à la malignité. Les Juifs, se voyant donc pressés de toutes parts, tentent quelque chose de plus impudent et de plus insolent encore que tout ce qu’ils avaient fait jusqu’alors. Et quoi ? « Les Juifs ne crurent point », dit l’évangéliste, « que cet homme eût été aveugle, et eût recouvré la vue ». S’ils ne l’ont pas cru, pourquoi donc ont-ils accusé Jésus-Christ de n’avoir pas gardé le sabbat ? Pourquoi n’ajoutez-vous pas foi à ce que dit un si grand peuple, à ce que disent les voisins de cet homme, qui le connaissent ? Mais, comme je l’ai dit, le mensonge se contredit en tout, et par les mêmes armes par lesquelles il combat la vérité, il périt et se détruit : et la vérité même n’en devient que plus brillante et plus lumineuse. C’est ce qui advint alors. Il fallait qu’on ne pût pas dire que les voisins et les témoins n’avaient rien rapporté d’exact, et qu’ils avaient seulement parlé d’un homme qui ressemblait à cet aveugle : les Juifs font venir son père et sa mère, et par là ils font éclater la vérité malgré eux : car le père et la mère connaissaient mieux leur propre fils que tous les autres. Comme ils n’avaient pu intimider le fils, qui publiait hardiment la gloire de son bienfaiteur, ils se flattaient d’affaiblir le miracle par les réponses qu’ils tireraient de ses parents. Remarquez la malignité avec laquelle ils les interrogent, car que font-ils ? Les ayant fait entrer au milieu de l’assemblée pour les effrayer, ils les interrogent, en disant d’un ton furieux et emporté : « Est-ce là votre fils (19) ? » Et ils n’ajoutent pas : Qui était auparavant aveugle ; mais que disent-ils ? « Que vous nous dites être né aveugle ? » Comme s’ils l’avaient habilement feint, pour confirmer l’œuvre de Jésus-Christ. O hommes exécrables, et plus qu’exécrables Quel est le père capable de feindre que son fils est né aveugle ? C’est comme s’ils disaient : Vous l’avez dit né aveugle, et non seulement contents de cela, vous l’avez dit, mais vous l’avez même répandu partout. « Comment est-ce donc qu’il voit « maintenant ? » O folie ! c’est vous, disent-ils, qui avez forgé ce mensonge ; c’est vous qui avez fabriqué cette imposture. Ils les portent de deux manières à nier le fait, et par ces paroles : « Que vous dites », et par celles-ci : « Comment est-ce donc qu’il voit maintenant ? » 2. Les Juifs font trois questions au père et à la mère de l’aveugle : si c’était là leur fils, s’il avait été aveugle, et comment il avait recouvré la vue ? Le père et la mère ne répondent qu’aux deux premières, la troisième ils la laissent sans réponse. Et ce qui contribue merveilleusement à confirmer la vérité du miracle, c’est que nul autre que l’aveugle même qui avait recouvré la vue, et qui était digne de foi, ne l’atteste et ne publie la manière dont Jésus l’a guéri. Comment le père et la mère auraient-ils parlé par faveur et par complaisance, eux qui, par la crainte des Juifs, celèrent quelque chose même de ce qu’ils savaient bien ? Car que répondent-ils ? « Nous savons que c’est là notre fils, et qu’il est né aveugle. (20). Mais comment il voit maintenant, et qui lui a ouvert les yeux, nous ne le savons pas ; il a de l’âge, qu’il réponde pour lui-même (21) ». Ils donnent leur fils pour digne de foi, et par là ils s’excusent de répondre sur la troisième question. Il n’est ni jeune, ni enfant, disent-ils, il peut rendre témoignage de lui-même. « La crainte que son père et sa mère avaient des Juifs, les firent parler de la sorte (22) ». Voyez, mes frères, avec quel soin et quelle exactitude l’évangéliste découvre leur sentiment et leur intention. Je vous fais cette remarque à cause de ce que j’ai dit il y a déjà quelque temps, dans un de mes discours, sur cette parole : « Il se fait égal à Dieu ». Je soutins que si ce n’eût été là qu’une simple opinion des Juifs, et non pas le sentiment et la doctrine de Jésus-Christ, l’évangéliste y aurait sans doute ajouté quelque correction, et n’aurait pas manqué de dire que c’était l’opinion des Juifs. Le père et la mère ayant donc renvoyé les Juifs au témoignage de l’aveugle qui avait recouvré la vue, les Juifs appellent cet homme une seconde fois. Ils ne lui disent pourtant pas ouvertement et impudemment : Nie que Jésus t’a guéri ; mais sous apparence de piété ils veulent le séduire par adresse, s’ils le peuvent. « Rends gloire à Dieu (24) », lui disent-ils. S’ils avaient dit au père et à la mère : Niez que ce soit là votre fils et qu’il soit né aveugle, ils auraient fait une proposition tout à fait ridicule ; et d’autre part le dire au fils, ç’eût été d’une impudence manifeste : voilà pourquoi ils se gardent de parler de la sorte ; mais ils prennent une autre voie, et lui tendent des pièges d’une autre manière. « Rends gloire à Dieu », c’est-à-dire, avoue que Jésus ne t’a point guéri. « Nous savons que cet homme est un pécheur ». Pourquoi ne le lui avez-vous donc pas reproché, lorsqu’il vous disait : « Qui de vous me peut convaincre d’aucun péché ? » (Jn 8,46) D’où le savez-vous, qu’il est un pécheur ? Les Juifs dirent donc à cet homme : « Rends gloire à Dieu », et il ne leur répondit rien. Jésus l’ayant rencontré, le loua, et ne le reprit pas de n’avoir point rendu gloire à Dieu : mais que lui dit-il ? « Croyez-vous au Fils de Dieu ? » Par où il nous apprend que c’est là rendre gloire à Dieu. Que si le Fils n’était point égal au Père, « croire au Fils », ce ne serait point là rendre gloire à Dieu. Mais comme celui qui honore le Fils honore aussi le Père, c’est avec raison que Jésus ne reprend pas l’aveugle. Tant que les Juifs s’attendirent que le père et la mère se rendraient à leur volonté, et qu’ils nieraient ce qu’ils désiraient, ils ne dirent rien à leur fils. Mais lorsqu’ils virent qu’ils n’avaient rien avancé de ce côté-là, ils se tournèrent de l’autre, et ils dirent à l’aveugle : Cet homme est un pécheur. « Il leur répondit : « Si c’est un pécheur, je n’en sais rien. Tout ce que je sais, c’est que j’étais aveugle, et que je vois maintenant (25) ». Est-ce que l’aveugle a craint ? Non. Et pourquoi celui qui avait dit : C’est un prophète, dit-il maintenant : « Si c’est un pécheur, je n’en sais rien ». Il ne le pensait pas, non, il ne le croyait pas ; mais il répond de la sorte parce qu’il voulait le justifier de tout péché par le témoignage de l’œuvre même qu’il venait de faire, et non par ses paroles ; et leur présenter une justification digne de foi dans le bienfait de sa guérison, qui les condamnait, eux et tous leurs procédés. Car, si après bien des discours, pour avoir dit : Si cet homme n’honorait point Dieu, il ne pourrait pas faire de si grands miracles ; il excita si fort leur colère, qu’ils lui répondirent : « Tu n’es que péché dès le ventre de ta mère, et tu veux nous enseigner ? » que n’auraient-ils pas fait, que n’auraient-ils pas dit si dès le commencement il eût parlé en ces termes ? « Si c’est un pécheur, je n’en sais rien », c’est-à-dire, maintenant je ne réponds rien là-dessus, et je n’explique pas mon sentiment ; ce que je sais fort bien, ce que je puis affirmer, c’est que si c’était un pécheur, il ne ferait pas de tels prodiges. Par ces paroles il écarte tout soupçon et de sa personne et de son témoignage, faisant clairement voir qu’il a purement raconté le fait comme il s’est passé, sans altération, sans y rien ajouter par flatterie ou par complaisance. Comme ils ne pouvaient donc pas empêcher ni anéantir une chose accomplie, ils reviennent encore à l’examen de la manière dont cette guérison s’est faite ; et ils se conduisent comme des limiers qui, cherchant la piste d’un gibier bien retranché dans son fort, tournent tantôt d’un côté, tantôt de l’autre. Ils reprennent donc les premières réponses, et, tâchant de les ruiner par de fréquentes interrogations, ils disent à l’aveugle « Que t’a-t-il fait ? Et comment t’a-t-il ouvert les yeux (26) ? ». Que répond-il ? Les ayant vaincus et terrassés ; il ne leur parle plus avec douceur. Car tant que cette affaire a eu besoin d’examens et d’informations, il a raconté ta chose avec beaucoup de retenue et de modération : mais après qu’il s’est rendu maître, et qu’il a remporté sur eux une brillante victoire, il les attaque à son tour hardiment et courageusement, et leur répond : « Je vous l’ai déjà dit, et vous ne l’avez point écouté. « Pourquoi voulez-vous l’entendre encore une fois (27) ? » L’avez-vous remarquée, cette hardiesse avec laquelle un pauvre mendiant parle aux scribes et aux pharisiens ? tant la vérité est forte, le mensonge faible et impuissant. La vérité, d’un homme de la lie du peuple, fait un grand et illustre personnage ; le mensonge, au contraire, avilit, et d’un grand fait un homme de rien. Au reste, voici ce que veut dire l’aveugle : Vous ne faites point d’attention à ce que je dis, c’est pourquoi je ne parlerai pas davantage, et je ne répondrai point à vos fréquentes et vaines interrogations, puisque vous ne m’écoutez pas pour apprendre la vérité, mais pour me surprendre dans mes paroles. « Est-ce que vous voulez devenir aussi ses disciples ? » Déjà l’aveugle s’associe aux disciples ; car ce mot : « Aussi », marque qu’il est disciple de Jésus-Christ. Il les attaque ensuite, et les malmène vigoureusement. 3. En effet, sachant que rien n’était plus capable de les piquer au vif que cette demande : « Est-ce que vous voulez », il la leur adresse exprès pour les braver : en quoi cet aveugle montre une âme élevée, ferme et courageuse, qui méprise leur menaçante fureur ; il fait éclater par sa confiance la gloire de Jésus-Christ ; il fait voir que celui qu’ils accablent ainsi d’outrages est un homme admirable, dont leurs injures ne peuvent ternir la réputation ; et que ces outrages mêmes ne servent qu’à relever sa gloire. Ils lui dirent : Sois toi-même son disciple ; « mais pour nous, nous sommes les disciples « de Moïse (28) ». Mais en quoi ? Vous parlez sans fondement. Vous n’êtes pas plus les disciples de Moïse que les disciples de Jésus : si vous étiez les disciples de Moïse, vous seriez aussi les disciples de Jésus-Christ. Voilà pourquoi le Sauveur leur dit auparavant : « Si vous croyiez à Moïse, vous me croiriez aussi, parce que c’est de moi qu’il a parlé » (Jn 5,46) ; c’est qu’ils avaient toujours ces paroles à la bouche : « Nous savons que Dieu a parlé à Moïse (29) ». Mais qui vous l’a dit ? qui vous l’a appris ? Nos pères, répondent-Ils, nous l’ont appris. Mais celui qui ayant dit qu’il est envoyé de Dieu, et qu’il parle des choses du ciel, le confirme par des miracles, n’est-il pas plus digne de foi que vos pères ? Et ils ne disaient point : Nous avons ouï Dieu parler à Moïse, mais « nous savons ». Ce que vous savez pour l’avoir ouï dire, ô Juifs, vous le croyez, vous l’assurez, et ce que vous voyez de vos yeux, vous ne le croyez pas si considérable, ni si digne de foi ! Ce que vous dites de Moïse, vous ne l’avez point vu, seulement vous l’avez ouï dire : mais « les œuvres de Jésus-Christ », vous ne les connaissez pas pour en avoir entendu parler, mais pour les avoir vues de vos propres yeux. Que répondit l’aveugle ? « C’est ce qui est étonnant, que vous ne sachiez d’où il est (30) », celui qui fait de tels prodiges : il est étonnant qu’un homme qui ne jouit d’aucune dignité parmi vous, qui n’est ni illustre, ni célèbre, puisse faire de si grandes choses : de sorte qu’il est tout à fait visible que c’est un Dieu qui n’a même pas besoin du moindre secours humain. « Or, nous savons que Dieu n’exauce point les pécheurs (31) ». Les Juifs ayant dit auparavant : « Comment un méchant homme pourrait-il faire de tels prodiges (16) ? » L’aveugle s’appuie sur le jugement qu’ils ont porté eux-mêmes, et leur rappelle leurs propres paroles. Cette créance, dit-il, nous est commune et à vous et à moi : elle est juste, demeurez-y. Remarquez bien sa prudence ; il a toujours le miracle à la bouche, parce qu’ils ne pouvaient pas le nier ; et c’est sur quoi il établit son raisonnement. Observez-vous, mon cher auditeur, qu’au commencement, quand il a dit : « Si c’est un pécheur, je n’en sais rien », il ne l’a point dit pour marquer un doute réel ? Loin de nous cette pensée ; car il savait fort bien que Jésus n’était pas un pécheur. Maintenant que le temps est propice et qu’il peut parler librement, voyez de quelle manière il répond : « Or, nous savons que Dieu n’exauce point les pécheurs ; mais si quelqu’un l’honore, et qu’il fasse sa volonté, c’est celui-là qu’il exauce ». Par ces paroles, non seulement il justifie Jésus, et le fait voir exempt de tout péché, mais il prouve encore qu’il est agréable à Dieu, et qu’il fait les œuvres de Dieu. Comme les Juifs disaient qu’ils honoraient Dieu, c’est pour cela même qu’il ajoute : « Et fait sa volonté ». Ce n’est pas assez, dit-il, de connaître Dieu, mais il faut faire ce qu’il commande. Ensuite il relève le miracle en disant : « Depuis que le monde est, on n’a jamais ouï-dire que personne ait ouvert les yeux à un aveugle-né (32) ». Si donc vous avouez que Dieu n’exauce point les pécheurs, Jésus ayant fait un miracle et un tel miracle, que jamais personne n’en a fait de pareil ; de votre propre aveu il s’ensuit qu’il est évident et manifeste que Jésus a tout surpassé en vertu, et que sa puissance est plus qu’humaine. Que lui répondirent-ils donc ? « Tu n’es que péché dès le ventre de ta mère, et tu veux nous enseigner (34) ? » Tant qu’ils avaient pu se flatter que l’aveugle nierait, ils l’avaient regardé comme un homme digne de foi, au point de le faire venir devant eux à deux reprises. Que si, dirai-je, vous ne le croyiez pas digne de foi, pourquoi ce double interrogatoire ? Mais cet homme disant hardiment la vérité et sans crainte, au lieu de l’admirer davantage, c’est alors qu’ils le condamnent. Mais que signifient ces paroles : « Tu n’es que péché dès ta naissance ? » Qu’ils lui reprochent son ancienne disgrâce, comme s’ils lui disaient : « Tu es tout en péchés dès tes premières années » ; et ils lui font ce reproche comme si c’était pour cela qu’il fût né aveugle : jugement contraire à la raison et tout à fait injuste. Sur quoi, Jésus-Christ voulant le consoler, dit : « Je suis venu dans ce monde pour exercer un jugement, afin que ceux qui ne voient point, voient, et que ceux qui voient, deviennent aveugles (39) ». « Tu es tout en péchés dès ta naissance ». Et qu’avait-il répondu ? Avait-il avancé une opinion qui lui fût propre et particulière ? Ou plutôt n’est-ce pas le sentiment commun qu’il avait produit, en disant : « Nous savons que Dieu n’exauce point les pécheurs ». N’a-t-il pas simplement exposé ce que vous avez dit vous-mêmes ? « Et ils le chassèrent dehors ». L’avez-vous bien entendu, ce prédicateur de la vérité, et n’avez-vous pas reconnu que sa pauvreté n’a point ébranlé sa philosophie ? Remarquez-vous tout ce qu’il a souffert d’injures et d’outrages dès le commencement ? Remarquez-vous aussi de quelle manière et avec quelle force il a rendu témoignage à la vérité par ses paroles et par ses actions ? 4. Au reste, mes frères, ces choses sont écrites, afin que nous les imitions. Si ce pauvre, si cet aveugle, qui n’avait pas même vu Jésus-Christ, a montré tant de courage et de fermeté aussitôt après sa guérison, et même avant d’avoir ouï la doctrine et les instructions du Sauveur, s’il a résisté à tout un peuple qui ne respirait que le carnage, qui était possédé du démon, à un peuple furieux, et qui ne cherchait qu’à trouver dans ses paroles de quoi condamner Jésus-Christ ; s’il ne leur a point cédé et ne s’est point caché, mais au contraire, s’il les a hardiment réfutés et s’il a mieux aimé être chassé hors de la synagogue que de trahir la vérité, à combien plus forte raison, nous qui avons vécu déjà tant d’années dans la foi, nous à qui la foi a fait voir des milliers de miracles et de prodiges, qui avons reçu de plus grands biens que lui, qui avons contemplé des yeux intérieurs de l’âme de profonds mystères, et qui sommes appelés à de si grands honneurs, à combien plus forte raison, dis-je, devons-nous faire paraître toute notre fermeté et tout notre courage contre ceux qui accusent et qui attaquent les chrétiens, et les combattre sans merci. Nous pourrons, mon cher auditeur, nous pourrons repousser nos adversaires, si nous prenons des fortes et des armes dans les saintes Écritures, si nous relevons notre confiance en donnant toute notre attention à cette lecture et ne l’écoutant point légèrement et en passant. Si quelqu’un vient assidûment à nos discours et est attentif à ce que nous y enseignons, quand même il ne lirait pas l’Écriture dans sa maison, néanmoins, dans le seul espace d’un an, il pourra apprendre beaucoup de choses ; car nous ne lisons pas aujourd’hui un livre de l’Écriture et demain un autre, mais nous lisons toujours le même. Cependant, plusieurs sont dans de si malheureuses dispositions, qu’après une si longue lecture, ils ne savent pas même encore le nom des saints livres. Et ce qui est affreux, c’est que ces personnes puissent sans effroi venir écouter la parole de Dieu avec tant de négligence. Mais si un joueur de luth, si un baladin, ou quelqu’autre histrion convoque la ville à ses représentations, tous accourent vite, tous lui savent gré de les avoir avertis et passent la moitié du jour à cette sorte de spectacle ; ici Dieu nous parle par les prophètes et par les apôtres, et nous bâillons, nous nous ennuyons. L’été et dans le fort des chaleurs, nous allons sur la place ; l’hiver, la pluie et la boue nous retiennent dans nos maisons. Mais à l’hippodrome, où l’on ne peut se mettre à couvert de la pluie, beaucoup, lors même qu’il pleut à seaux et que le vent pousse la pluie au visage, beaucoup, dis-je, poussent la folie jusqu’à s’y tenir patiemment sur leurs pieds ; pour cela ils bravent le froid, la pluie, la boue, la longueur du chemin ; rien n’est capable de les retenir chez eux, ni de les empêcher de courir aux spectacles. Mais ici, où il y a un bon toit, où la chaleur est admirablement tempérée, ils refusent d’y venir ; ici, où il s’agit de la grande affaire du salut. Dites-le, je vous prie, cette conduite est-elle supportable ? Voilà pourquoi, dans ce qui concerne les spectacles, nous sommes si savants et de si grands maîtres ; mais dans les choses nécessaires, nous sommes plus ignorants qu’un enfant. Que si quelqu’un vous appelle cocher ou danseur, vous prenez cela pour une injure, et vous faites cependant tout ce qu’il faut pour vous attirer ce reproche ; qu’un homme de cette sorte vous appelle au spectacle, vous ne reculez pas et vous vous adonnez presque à toutes les parties de cet art, dont vous fuyez le nom. Mais la profession et le nom qui vous conviennent, je veux dire la profession et le nom de chrétien, vous ne savez même pas ce que c’est. Est-il une plus grande folie ? Je voudrais vous répéter souvent ces vérités, mais je crains de me rendre importun, et cela en pure perte. En effet, je vois non seulement les jeunes gens, mais encore des vieillards, se livrer à ces folies : spectacle qui me fait rougir, que de voir un homme vénérable par sa vieillesse, aller au théâtre déshonorer ses cheveux blancs et y mener son fils avec lui. Quoi de plus ridicule ? Quoi de plus infâme ? Le père enseigne à son fils à braver la bienséance. 5. Mon discours vous pique ? C’est ce que je veux : je veux que mes paroles vous affligent, afin que vous renonciez à ces infâmes pratiques. Mais il est des gens, autrement insensibles et froids, que mes paroles ne sont point capables de faire rougir :.mais qu’il soit question de spectacles, ces mêmes gens sont tout de feu, et ils ne finissent point de parler. Demandez-leur qui est Amo. qui est Abdiras, combien il y a de prophètes, combien d’apôtres ? ils ne peuvent même pas ouvrir la bouche ; mais si vous les écoutez sur les chevaux, sur les cochers, ils parlent avec plus de gravité qu’un sophiste et un rhéteur ; et après tout cela ils osent demander : Eh bien ! quel mal, quel tort cela fait-il ? C’est justement cette ignorance qui me fait gémir. Dieu vous a donné le temps de cette vie pour le servir, et vous l’employez à des choses vaines et inutiles, et encore vous demandez quelle perte vous faites ? Employez-vous inutilement la moindre somme d’argent, vous dites que vous avez fait une perte ; passez-vous des journées entières aux spectacles, qui sont les pompes de Satan, vous ne croyez rien faire de déraisonnable, et vous comptez cela pour rien ? Vous qui devriez employer toute votre vie à la prière et à l’oraison, vous la passez tout entière dans les clameurs, dans le tumulte, à entendre des paroles déshonnêtes, à voir des combats, à des plaisirs qui ne vous conviennent point, à des illusions, à des occupations inutiles et pernicieuses ; et ensuite vous dites à tout le monde : Quelle est la perte que j’ai faite ? Et vous ne comprenez pas qu’il n’est rien dont on doive être plus avare que du temps. Votre argent, si vous l’avez dépensé, vous pourrez en regagner. Mais le temps que vous avez perdu, difficilement vous le recouvrerez. Car le temps qui nous est donné en cette vie est bien court : si nous n’en faisons pas un bon usage, que dirons-nous à notre Juge lorsqu’il viendra ? Répondez-moi, je vous prie : Si vous ordonniez à un de vos enfants d’apprendre un certain art, et qu’il perdît son temps ou à la maison ou ailleurs, le maître ne vous avertirait-il pas ? ne vous dirait-il pas : Vous avez fait avec moi un marché par écrit, et vous avez fixé un temps ; mais si votre fils ne veut pas travailler avec moi et m’écouter, s’il veut au contraire aller perdre le temps de côté et d’autre, comment pourrai-je vous le présenter comme mon disciple ? Nous aussi, nous sommes dans l’obligation de vous dire la même chose ; Dieu nous dira : Je vous ai assigné un temps pour apprendre l’art de la piété, pourquoi avez-vous vainement et inutilement consumé ce temps ? pourquoi n’avez-vous pas été assidûment écouter votre maître ? pourquoi n’avez-vous pas été attentifs à ses instructions ? Que la piété soit un art, n’en doutez point, un prophète vous le déclare : « Venez, mes enfants », vous dit-il, « écoutez-moi : je vous enseignerai la crainte du Seigneur ». (Psa 34,11) Et encore : « Heureux est l’homme que vous avez vous-même instruit, Seigneur, et à qui vous c avez enseigné votre loi ! » (Psa 94,12) Lors donc que vous aurez inutilement employé le temps, quelle, excuse aurez-vous ? Et pourquoi, direz-vous, Dieu a-t-il fixé un temps si court ? O folie ! ô cœur ingrat ! Quoi ! Dieu a abrégé le temps de votre travail et de vos sueurs, il vous a préparé un repos éternel et immortel, et vous lui en faites un reproche, et vous en êtes fâché ! Mais je ne sais comment nous nous arrêtons si longtemps sur cette matière. Finissons donc ce long discours : car c’est encore une de nos misères qu’un long discours nous ennuie et nous dégoûte, et que la longueur du spectacle, qui commence à midi et ne finit qu’aux flambeaux, ne fatigue personne. Enfin, pour n’être pas toujours à vous faire des reproches, nous vous prions et vous conjurons, mes chers frères, de nous accorder une grâce et à vous et à moi ; c’est de laisser là toutes ces choses, pour vous appliquer uniquement aux vérités que nous vous enseignons. Si vous le faites, si vous nous l’accordez, cette grâce que nous vous demandons avec tant d’instance, ce sera pour moi une source de joie, de plaisir, de gloire. Mais ce sera vous qui, sans parler du gré que vous me saurez, recueillerez toute la récompense si, ayant été attachés au théâtre jusqu’à la fureur, vous vous délivrez de cette maladie, grâce à la crainte de Dieu et à nos instructions ; si, ayant brisé vos liens, vous courez à Dieu de toutes vos forcés. Et non seulement vous en recevrez là-haut ta récompense ; mais ici encore vous en sentirez une véritable joie. Car la vertu, a cet avantage, qu’outre ces couronnes immortelles, elle nous procure aussi en ce monde une vie douce et agréable. Obéissons donc à la parole de Dieu, afin d’obtenir ces biens et ceux de la vie future, par la grâce et la bonté de Notre-Seigneur Jésus-Christ, avec lequel gloire soit agi Père et au Saint-Esprit, dans tous les siècles des siècles. Ainsi soit-il.