Romans 13
HOMÉLIE XXIII.
QUE TOUTE PERSONNE SOIT SOUMISE AUX PUISSANCES SUPÉRIEURES. (XIII, 1, JUSQU’À 11)
Analyse.
- 1. De la soumission aux puissances. – 2. Raisons et avantages de cette soumission.
- 3. Les princes ne sont à craindre que pour les méchants ; ils sont favorables aux bons. – Services rendus par les puissances. Il faut les honorer, les craindre.
- 4 et 5. De la charité. – Comment Dieu nous aime ; comment nous devons aimer Dieu.
1. C’est un sujet qu’il développe encore dans d’autres lettres ; comme il veut que les serviteurs soient soumis à leurs maîtres, de même il veut que les sujets obéissent aux princes. Or son but est de montrer que le Christ n’est pas venu renverser les gouvernements établis au milieu des hommes, que ses lois ne vont qu’à les améliorer, qu’à enseigner à ne pas entreprendre des guerres inutiles et sans aucun avantage. Il doit suffire des hostilités qui se font contre nous à cause de la vérité, et nous ne devons pas y ajouter des épreuves inutiles et sans aucun avantage. Or voyez comme la suite des idées l’amène naturellement à ce sujet. Après avoir demandé aux fidèles cette grande sagesse par laquelle ou s’accommode à ses amis, à ses ennemis, par laquelle on entre en communion de sentiments avec ceux qui sont dans la prospérité, avec ceux qui souffrent, par laquelle on est utile aux indigents et à tous les hommes, après avoir planté les germes d’une société angélique, purgé les cœurs en y exterminant la colère et rabattant l’orgueil, ce n’est qu’après avoir, par toutes ces réflexions, adouci les âmes, qu’il commence les exhortations nouvelles sur le sujet d’aujourd’hui. En effet, s’il convient de répondre aux injures par un traitement contraire, à bien plus forte raison convient-il d’obtempérer à nos bienfaiteurs. Mais, pour cette réflexion, l’apôtre ne la place qu’à la fin de son exhortation ; jusque-là il ne propose pas cette vérité, ce qu’il montre c’est le devoir de l’obéissance. Pour montrer que ce devoir s’impose à tous, aux prêtres mêmes et aux moines, et non aux séculiers seulement, il commence par déclarer : « Que toute personne soit soumise aux puissances supérieures » ; apôtre, évangéliste, prophète, qui que ce soit encore, n’importe : en effet, cette soumission n’est en rien opposée à la piété. Et l’apôtre ne se borne pas à dire : obéisse, mais « soit soumise ». La première raison de cette loi, est appropriée à la foi des chrétiens c’est Dieu qui l’a voulu. « Car il n’y a point de puissance », dit l’apôtre, « qui ne vienne de Dieu ». Que dites-vous ? Tout prince a été ordonné prince par Dieu ? Ce n’est pas là ce que je dis, répond l’apôtre ; car je ne parle pas des princes individuellement, je ne m’occupe que de l’institution en elle-même. Qu’il y ait des principautés, que les uns commandent, que les autres soient commandés, que toutes choses ne soient pas livrées au hasard, à la débandade, que les peuples ne soient pas comme les flots, emportés de côté et d’autre, c’est là ce que j’appelle une œuvre de la sagesse de Dieu. Aussi l’apôtre ne dit pas : car il n’y a pas de prince qui ne vienne de Dieu, mais c’est de l’institution elle-même qu’il parle, et il dit : « Qu’il n’y a point de puissance qui ne vienne de Dieu, et les puissances qui existent ont été ordonnées par Dieu ». De même quand le Sage dit : « C’est par le Seigneur que la femme est appropriée à l’homme » (Proverbes, 19,14), il affirme que le mariage est institué par Dieu, et non pas que c’est Dieu lui-même qui marie tel homme à telle femme ; car nous voyons souvent de mauvais mariages, qui ne sont pas conformes à la loi du mariage, et nous ne devons pas les attribuer à Dieu. Il ne dit pas autre chose que ce que le Christ a dit lui-même : « Celui qui créa les hommes, dès le commencement, les créa mâle et femelle ; et il dit : Pour cette raison, l’homme quittera son père et sa mère, et s’attachera à sa femme ». (Mat 19,4-5 ; Gen 2,24) Comme l’égalité est souvent une cause de guerre, Dieu a établi un grand nombre de suprématies et de positions subordonnées, comme les rapports de l’homme et de la femme, du fils et du père, du vieillard et du jeune homme, de l’esclave et de l’homme libre, du prince et du sujet, du maître et du disciple. Et qu’y a-t-il d’étonnant qu’il en soit ainsi parmi les hommes, puisque dans le corps même, Dieu a établi le même ordre ? En effet, il n’en a pas fait toutes les parties également considérables, il a voulu que telle fût moindre, telle, plus importante que telle eût le commandement des autres membres, que telle autre n’eût qu’à obéir. Même loi chez les animaux, tels que les abeilles, les grues, les troupeaux de brebis sauvages. Et la mer, à son tour, n’est pas privée de ce bienfait de l’ordre ; là aussi grand nombre de familles de poissons se rangent, combattent sous un commandement qui les unit, et peuvent ainsi accomplir de longues pérégrinations. Car où il n’y a pas de commande ment, il n’y a que malheurs et confusion. Aussi, après avoir dit d’où vient l’autorité, l’apôtre ajoute : « Celui donc qui résiste à la puissance, résiste à l’ordre de Dieu (2) ». Voyez jusqu’où l’apôtre fait monter la question, par quel moyen il inspire la crainte, comment il établit que l’obéissance est une dette. En effet, les fidèles auraient pu dire vous nous avilissez, vous nous rendez méprisables, ceux qui doivent posséder le royaume des cieux, vous les soumettez à des princes ; l’apôtre montre que ce n’est pas à des princes mais à Dieu qu’il les soumet, car c’est à Dieu qu’obéit celui qui se soumet aux puissances. Mais il ne présente pas sa pensée de cette manière il ne dit pas que c’est à Dieu qu’obéit celui qui reçoit les ordres des princes ; il prend l’exemple du contraire ; afin d’inspirer la crainte, afin de rendre l’obéissance plus stricte, il dit que celui qui rejette les ordres du prince, fait la guerre à Dieu qui a institué l’autorité. Et c’est une vérité que l’apôtre prend soin d’enseigner partout, à savoir que notre obéissance n’est pas une faveur que nous faisons aux princes, mais une dette que nous leur payons. Car en agissant ainsi, l’apôtre attirait à la religion les princes infidèles, et il attachait les fidèles à l’obéissance. On répétait alors partout que les apôtres étaient des séditieux, des instruments de révolutions, n’agissant, ne parlant que pour arriver au renversement de toutes les lois. Montrez le précepte que notre commun Seigneur impose à tous ceux qui le servent, vous fermerez la bouche de ceux qui accusaient les apôtres d’être des fauteurs de nouveautés, et vous aurez plus de liberté pour prêcher la vérité et ses dogmes. 2. Donc ne rougissez pas, dit l’apôtre, de cette soumission. Car c’est Dieu qui a institué les puissances, et sa vengeance est terrible contre ceux qui les méprisent. Ce n’est pas une réparation telle quelle qu’il exigera de celui qui aura désobéi, ce sera la plus redoutable des expiations, et quoique vous puissiez dire, rien ne vous en affranchira ; vous subirez, de la part des hommes, les supplices les plus rigoureux, nul ne vous couvrira de sa protection, et vous ne ferez qu’allumer contre vous la colère de Dieu. Toutes ces vérités, l’apôtre les fait entendre, par ces paroles : « Et ceux qui y résistent, s’attireront eux-mêmes leur condamnation ». Il continue, et une fois la crainte inspirée, il raisonne pour montrer l’utilité des puissances : « Car les princes ne sont point à craindre, lorsqu’on ne fait que de bonnes actions, mais lorsqu’on en fait de mauvaises (3) ». Après un rude coup, après avoir fortement frappé les esprits, il se relâche de sa sévérité, comme un médecin adroit qui emploie de doux remèdes, il console, il dit : De quoi avez-vous peur ? Pourquoi frissonner ? Est-ce que l’autorité a des rigueurs pour celui qui fait le bien ? Celui qui pratique la vertu a-t-il lieu de la craindre ? Voilà pourquoi l’apôtre ajoute : « Voulez-vous ne point craindre les puissances ? Faites bien, et elles vous en loueront ». Voyez-vous comme l’apôtre, pour attacher l’homme à celui qui commande, lui montre le prince même prêt à le louer ? Voyez-vous comme il fait sortir la colère du cœur ? « Car le prince est le ministre de Dieu, pour vous favoriser dans le bien (4) ». Il est si loin d’être à craindre, dit l’apôtre, qu’au contraire il vous loue ; il est si loin de vous faire obstacle, qu’au contraire il vous favorise. Donc, puisque vous trouvez en lui la louange et le secours, pourquoi ne pas vous soumettre ? Il vous rend la vertu plus facile, il châtie les méchants, il fait du bien aux bons et les honore, il coopère à la volonté de Dieu ; de là vient que l’apôtre l’a nommé le ministre de Dieu. Voyez : je vous conseille la sagesse, et lui vous donne les mêmes avis par le moyen des lois ; mes exhortations vous disent qu’il est défendu de s’enrichir par la rapine, par la violence, et lui siège pour juger ces fautes. Il travaille avec nous, il vient à notre secours, c’est Dieu qui lui a confié cette mission. Il est donc, à double titre, digne de nos respects, et parce qu’il a été envoyé par Dieu, et envoyé pour une telle mission. « Si vous faites mal, vous avez raison de craindre » ; ce n’est pas la puissance qui est à craindre, mais notre perversité. « Car ce n’est pas en vain qu’il porte l’épée ». Voyez-vous l’apôtre armant le prince, comme on équipe un soldat, et le rendant redoutable aux pécheurs ? « Car il est le ministre de Dieu, pour exécuter sa vengeance, en punissant celui qui fait de mauvaises actions ». L’apôtre ne veut pas que le châtiment, la vengeance, l’épée vous fassent reculer d’épouvante, et il répète que le prince remplit la loi de Dieu. – Mais si le prince lui-même l’ignore ? Le prince n’en est pas moins institué par Dieu. Si donc, soit qu’il châtie, soit qu’il honore, il est le ministre de Dieu, défendant la vertu, exterminant le crime, c’est-à-dire, exécutant la volonté de Dieu, pourquoi disputer contre celui qui vous procure de si grands biens, et vous aplanit les voies ? Un grand nombre ont commencé par pratiquer la vertu par la crainte des princes ; ensuite, c’est la crainte de Dieu qui les y a attachés. Car les esprits épais ne sont pas aussi sensibles aux biens à venir qu’aux biens présents. Celui donc qui gouverne tant d’âmes par la crainte, et par les récompenses, et qui les prédispose à recevoir la doctrine, celui-là, on a raison de l’appeler ministre de Dieu. « Il est donc nécessaire de nous y soumettre, non seulement par la crainte du châtiment, mais aussi par un devoir de conscience (5) ». Que veut dire : «, non seulement par la crainte du châtiment ? » non seulement, dit l’apôtre, vous vous élevez contre Dieu en refusant de vous soumettre ; non seulement vous vous attirez de grands maux, et de la part de Dieu et de la part des hommes, mis encore vous oubliez que le prince est pour vous la source des plus grands biens, puisqu’il vous assure la paix et fait régner l’ordre dans l’État. Ces puissances sont pour les États des sources inépuisables de bienfaits, et, si vous les supprimez, tout s’en ira ; plus de villes, plus de bourgs, plus de maisons, plus dé place publique ; il ne subsistera plus rien, ce sera un bouleversement universel, les plus forts dévorant les plus faibles. De telle sorte que, dans le cas même où aucun châtiment ne frapperait la désobéissance, vous devriez encore votre soumission, par conscience, pour ne pas paraître ingrat envers votre bienfaiteur. « C’est pour cette raison », dit-il, « que vous payez le tribut aux princes, parce qu’ils sont les ministres de Dieu, toujours appliqués aux fonctions de leur ministère (6) ». L’apôtre n’entre pas dans le détail des bienfaits dont les États sont redevables aux puissances, tels que le bon ordre, la paix, les autres services, tout ce qui concerne l’armée, les diverses fonctions publiques, il résume tout dans un mot. Que vous recevez des bienfaits du prince, dit l’apôtre, vous le témoignez vous-même en lui payant un tribut. Voyez la sagesse, l’intelligence du bienheureux Paul ! Il montre dans ce qui paraissait un pesant fardeau, des exactions mêmes, un témoignage rendu à l’autorité qui pourvoit au bien de tous. Car enfin, dit l’apôtre, pourquoi lui payons-nous des tributs ? N’est-ce pas parce qu’il pourvoit à nos besoins ? N’est-ce pas pour récompenser le chef de toute sa sollicitude ? Évidemment nous ne paierions aucun tribut, si nous ne savions pas tout d’abord que nous profitons d’un tel gouvernement ; ce qui fait que, dès l’origine, il a été décrété par tous que ceux qui nous commandent, seraient nourris par nous, c’est que négligeant leurs propres affaires, ils ne s’occupent que des affaires publiques, et qu’ils consacrent tous leurs loisirs à conserver nos intérêts. 3. Après les considérations extérieures, il reprend ses premières réflexions : en effet, c’est de cette manière qu’il lui était plus facile de persuader le fidèle : il montre de nouveau que c’est là ce qui plaît à Dieu, et il conclut en disant : « Parce qu’ils sont les ministres de Dieu ». Il montre ensuite le travail qu’ils entreprennent, la peine qu’ils se donnent : « Toujours appliqués aux fonctions de leur ministère ». Voilà leur vie, voilà leur passion, faire en sorte que vous jouissiez de la paix. Par cette raison, dans une autre épître encore, il ne se contente pas d’ordonner qu’on leur soit soumis, il prescrit encore de prier pour eux, et ; à ce propos, il montre l’utilité qui en résulte pour tous : « Afin que nous menions une vie paisible et tranquille ». (1Ti 2,1-2) En effet, nous ne retirons pas un mince avantage, pour la vie présente, de ces princes qui mettent des armées en branle, repoussent les ennemis du dehors, répriment dans les villes les séditieux et tranchent tous les différends. Ne me dites donc pas que souvent tel prince abuse de ce pouvoir, ne considérez que le bien de l’institution, et vous y trouverez une preuve de la parfaite sagesse de Celui qui l’a établie dès le principe. « Rendez donc à chacun ce qui lui est dû ; le tribut, à qui vous devez le tribut ; les impôts, à qui vous devez les impôts ; la crainte, à qui vous devez de la crainte ; l’honneur, à qui vous devez de l’honneur. Acquittez-vous envers tous de tout ce que vous leur devez, ne demeurant redevables que de l’amour qu’on se doit toujours les uns pour les autres (7, 8) ». Il insiste encore et toujours sur les mêmes devoirs ; ce n’est pas de l’argent seulement que l’apôtre réclame pour les princes, mais de l’honneur et de la crainte. Et, comment, lorsqu’il dit plus haut : « Voulez-vous ne point « craindre les puissances ? Faites bien v, dit-il ici : « Rendez ce que vous devez, la crainte ? » C’est qu’il veut parler de la crainte respectueuse et non de l’effroi qui vient d’une mauvaise conscience, et qu’il a indiqué plus haut. Et il ne dit pas : Donnez, mais, « Rendez » et il ajoute : « Ce que vous devez » : en effet, ce n’est pas là une faveur de votre part, c’est une dette, et si vous ne la payez pas, vous serez puni de votre ingratitude. Et gardez-vous de croire que ce devoir vous rabaisse, que votre dignité particulière subisse une atteinte d’avoir à vous lever, à vous découvrir devant le prince. Si ce précepte a été donné quand les princes étaient païens, à bien plus forte raison doit-il être pratiqué aujourd’hui qu’ils sont fidèles. Que si vous me répondez que des grâces plus relevées vous ont été accordées, sachez que votre heure n’est pas encore venue ; vous êtes encore étranger et voyageur. Viendra le temps où votre splendeur éclipsera tout ; en ce moment, votre vie est cachée avec le Christ dans le sein de Dieu. Quand le Christ apparaîtra, vous aussi alors vous apparaîtrez avec lui dans sa gloire. Ne cherchez donc pas, dès cette vie qui s’écoule, votre rétribution, et, s’il faut vous tenir avec crainte en la présence du prince, ne voyez rien dans ce devoir qui soit indigne de votre noblesse. Car c’est la volonté de Dieu, afin que le prince institué par lui, possède la force qui convient au prince. Car lorsque celui à qui sa conscience ne reproche rien de mal, se tiendra avec crainte devant le souverain juge, à bien plus forte raison tremblera celui qui commet des actions mauvaises. Quant à vous, vous y gagnerez un éclat plus brillant ; ce n’est pas l’honneur par vous rendu qui peut vous avilir, mais l’honneur par vous refusé ; et le prince ne fera que vous admirer davantage, et fût-il infidèle, il en prendra occasion de glorifier le Seigneur. « Acquittez-vous envers tous de tout ce que vous leur devez, ne demeurant redevables que de l’amour qu’on se doit toujours les uns aux autres ». Nouveau retour de l’apôtre à la mer de tous les biens, à la maîtresse qui inspire toutes ses paroles, à la cause de toutes les vertus, et la charité, elle aussi, est une dette, non temporaire comme un tribut, comme un impôt, mais à payer continuellement. Cette dette, l’apôtre ne veut pas qu’elle soit jamais payée ; ou plutôt il veut qu’on la paye toujours, sans qu’on soit jamais quitte, sans qu’on cesse de la devoir. Telle est la nature de cette dette, on donne toujours, on doit toujours. Après avoir dit comment il faut aimer, il montre l’avantage de la charité par ces paroles : « Car celui qui aime le prochain accomplit la loi ». Ne regardez donc pas comme une faveur ce qui est une dette ; vous devez l’amour à votre frère, à cause de la parenté spirituelle, et ce n’est pas là la seule cause ; considérez de plus, que nous sommes membrés les uns des autres ; si cet amour nous manque, tout est déchiré. Donc, aimez votre frère. Si vous retirez de cet amour l’immense avantage d’accomplir la loi tout entière, vous devez l’amour à votre frère, en retour du bienfait que vous recevez de lui. « Parce que ces commandements de Dieu. Vous ne commettrez point d’adultère ; vous ne tuerez point ; vous ne déroberez point ; vous ne porterez point de faux témoignage, et s’il y a quelque autre commandement semblable, tous sont compris en abrégé dans cette parole : Vous aimerez le prochain comme vous-même (9) ». – (Mat 22,39) L’apôtre ne dit pas : Sont accomplis, mais : « Sont compris en abrégé », c’est-à-dire que cette parole renferme dans une brièveté concise l’ensemble complet des commandements. Car le principe et la fin de la vertu, c’est l’amour ; voilà la racine, voilà le fondement, voilà le faîte. Si donc c’est le principe et le parfait accomplissement, où rien trouver qui l’égale ? 4. Mais ce n’est pas simplement l’amour que le précepte demande, c’est l’intensité de l’amour. Il n’est pas dit seulement : Aimez votre prochain, mais « comme vous-même ». Aussi le Christ disait-il que ce précepte contient la loi et les prophètes. Et voyez, après avoir établi deux sortes d’amour, jusqu’où il élève l’amour du prochain. Après avoir dit : « Voici le premier commandement : Tu aimeras le Seigneur ton Dieu », il continue : « Voici le second », et il n’oublie pas d’ajouter : « Semblable au premier, et ton prochain comme toi-même ». Où rien trouver qui égale cette bonté du Sauveur ? Malgré l’immense distance qui nous sépare de lui, il range l’amour que les hommes doivent aux hommes tout près de l’amour qui lui est dû à lui-même, il déclare que ces deux amours sont semblables. Les mesures qu’il assigne des deux côtés sont presque égales ; pour le premier amour, il disait : « De tout ton cœur, et de toute ton âme » ; pour l’amour du prochain, « comme toi-même ». Maintenant Paul enseigne que, sans l’amour du prochain on ne recueille pas une grande utilité de l’amour de Dieu. De même que nous, quand nous avons de l’amour pour quelqu’un, nous disons : si vous l’aimez, c’est moi que vous aimerez, ainsi faisait le Christ, quand il disait : « Semblable au premier » ; quand il disait à Pierre : « Si vous m’aimez, paissez mes agneaux ». (Jn 21,16) « L’amour qu’on a pour le prochain, ne souffre point qu’on lui fasse du mal ; aussi l’amour est l’accomplissement de la loi (10) ». Voyez les deux mérites de l’amour : il empêche de faire le mal, (car, dit l’apôtre : « Il ne souffre point qu’on lui fasse du mal »), et il « opère le bien : « Aussi l’amour est l’accomplissement de la loi », dit-il ; non seulement c’est l’abrégé de la doctrine des bonnes œuvres, mais il en rend la pratique facile. L’amour ne nous apprend pas seulement ce que nous devons savoir, (ce qui est l’office de la loi), mais il nous donne pour l’exécution un puissant secours qui ne nous aide pas seulement à pratiquer une partie des préceptes, mais parfait en nous la vertu tout entière. Aimons-nous donc les uns les autres, puisque c’est là le moyen d’aimer ce Dieu qui nous a tant aimés. Chez les hommes, si vous aimez une personne qui est aimée d’une autre, cette autre personne s’en offense. Dieu, au contraire, veut que vous partagiez votre amour entre lui et vos frères, et Dieu déteste celui qui ne fait pas ce partage. C’est que l’amour humain est rempli de jalousie et de haines envieuses, tandis que l’amour divin est au-dessus de toutes ces passions. Voilà pourquoi Dieu demande que nous partagions son amour. Aimez, dit-il, avec moi, et je vous en aimerai davantage. Voyez-vous l’ardent amour que ces paroles respirent ? Si vous aimez ceux que j’aime, je croirai alors à la sincérité de votre amour pour moi. En effet, il désire vivement notre salut, et il y a longtemps qu’il nous l’a fait savoir. Quand il créa l’homme, que dit-il ? écoutez : « Faisons l’homme à notre image » (Gen 1,26) ; et encore : « Faisons-lui une aide, il n’est pas bon que l’homme soit seul ». (Gen 2,18) Et, lorsqu’après la prévarication il le réprimanda, voyez avec quelle mansuétude il lui parle ! Il ne lui dit pas : Misérable, infâme, après tant de bienfaits reçus, c’est au démon que tu t’es abandonné, tu as quitté ton bienfaiteur pour t’attacher au démon pervers. Que lui dit-il, au contraire ? « D’où avez-vous su que vous étiez nu, sinon de ce que vous avez mangé du fruit de l’arbre dont je vous avais défendu de manger ? » (Gen 3,11) On dirait un père qui a défendu à son fils de toucher un glaive ; le fils a désobéi, s’est blessé ; le père lui dit : D’où vient que tu es blessé ? Cela vient de ce que tu ne m’as pas écouté. Entendez-vous cette manière de parler, qui marque plutôt l’ami que le Seigneur ? je dis l’ami méprisé, qui pourtant ne cesse pas d’aimer. Sachons donc l’imiter ; et quand nous adressons des reproches, gardons aussi cette mansuétude. Les reproches qu’il fait à la femme sont empreints de la même douceur. Ou plutôt ce ne sont pas des reproches, c’est un avertissement, c’est une exhortation pour ramener au devoir, ce sont des précautions pour l’avenir. Voilà pourquoi il n’a rien à dire au serpent : c’était lui qui était l’artisan de ces malheurs, et le serpent ne pouvait rejeter la faute sur aucun autre. Aussi le Seigneur lui infligea-t-il un châtiment terrible.. Et il ne s’en tint pas là ; il enveloppa la terre dans la malédiction. S’il chassa l’homme du paradis, et le condamna au travail, c’est pour cette raison surtout qu’il convient d’adorer et d’admirer. Les délices du paradis avaient provoqué le relâchement ; le Seigneur retranche le plaisir, il élève la douleur comme un mur destiné à préserver de l’indolence, afin que l’homme retourne à son amour. Et maintenant comment a-t-il traité Caïn ? Ne lui a-t-il pas montré la même mansuétude ? Outragé par lui, Dieu ne l’outrage pas en retour, mais il l’exhorte, il lui dit : « Pourquoi cet abattement sur votre visage ? » (Gen 4,6) Son action pourtant n’admettait nulle excuse. Mais ce n’est pas une telle réprimande que Dieu lui adresse ; que lui dit-il ? « Vous avez péché ? Restez-en là, n’ajoutez pas un nouveau crime à celui que vous avez commis : il se tournera vers vous, et vous lui commanderez » ; il lui parle de son frère. Car, dit-il, si vous craignez qu’à cause de son sacrifice qui m’a plu, je ne vous enlève votre droit d’aînesse, rassurez-vous, je vous donne autorité sur lui ; amendez-vous, aimez celui qui ne vous a fait aucun tort ; car je prends un soin égal de vous deux. Mon plus grand plaisir, c’est qu’il n’y ait entre vous aucun dissentiment. Comme une mère qui aime ses enfants, Dieu fait et dispose tout pour prévenir leur division. 5. Mais je veux un exemple pour éclaircir mon discours. Représentez-vous Rebecca, troublée, cherchant de toutes parts un moyen de sauver son plus jeune fils des mauvais desseins de l’aîné. Elle aimait, mais elle n’avait pas d’aversion pour Esaü. D’où vient qu’elle disait : « Que je ne perde pas mes deux fils en un seul jour ». (Gen 27,45) C’est avec la même affection que Dieu disait alors : « Vous avez péché ? Restez-en là : il se tournera vers vous » (Gen 4,7) ; le Seigneur voulait ainsi prévenir le fratricide, établir la paix entre les deux frères. Maintenant, même après que Caïn eut commis le meurtre, même alors, Dieu ne cesse pas de le couvrir de sa providence, c’est encore avec douceur qu’il parle à celui qui vient de tuer son frère. « Où est Abel, votre frère ? » Question faite pour amener un aveu. L’autre continue la résistance avec un surcroît d’impudence effrontée. Même alors, Dieu ne s’éloigne pas de lui ; au contraire, les paroles du Seigneur sont celles d’un ami outragé, méprisé. « La voix du sang de votre frère crie vers moi ». Et c’est encore ici, avec l’homicide, la terre qui subit la colère de Dieu, c’est elle qu’il maudit : « Maudite soit la terre qui a ouvert sa bouche pour recevoir le sang de votre frère ». Dieu fait ce que font les hommes qui déplorent des malheurs, ce que faisait David, après la mort de Saül. Il maudissait les montagnes qui avaient bu son sang : « Montagnes de Gelboé, que la rosée et la pluie ne tombent jamais sur vous, parce que c’est là qu’ont été jetés et les boucliers des vaillants ». (2Sa 1,21) On dirait que Dieu aussi fait entendre un chant funèbre. La voix du sang de votre frère crie vers moi : « Vous serez donc maintenant maudit sur la terre, qui a ouvert sa bouche, pour recevoir le sang de votre frère répandu par votre main ». Il parlait ainsi pour apaiser les bouillons de sa colère, pour le porter à aimer son frère au moins après sa mort. Tu as éteint sa vie, lui dit-il, et tu n’éteins pas encore ta haine ? Voyez ce que fait Dieu ? Il aimait ces deux frères, parce qu’il les avait créés. Eh quoi ? Laissera-t-il le meurtrier impuni ? Mais ce serait le rendre pire qu’il n’est. Il le punira donc ? Mais Dieu est le plus tendre des pères. Voyez donc comment il s’y prend, pour punir et montrer en même temps son amour ; ou plutôt il ne punit pas, il se borne à redresser. Le Seigneur, en effet, ne le tue pas, il l’assujettit à trembler, pour se purifier de son crime, pour revenir ainsi à l’amour de Dieu, pour se réconcilier avec son frère mort, car Dieu ne voulait pas que le meurtrier quittant la vie fût encore l’ennemi de celui qui était mort. Voilà comment font ceux qui aiment, quand on ne répond pas à leurs bienfaits par de l’amour ; ils deviennent alors malgré eux, violents, menaçants ; ils ne le sont pas de gaieté de cœur, mais (amour les y porte parce qu’ils veulent attirer à eux ceux qui les méprisent. Quelle que soit la contrainte qui se mêle à une telle affection, ceux qui aiment beaucoup y trouvent cependant une consolation ; c’est ainsi que le châtiment même vient de l’affection. Ceux qui se soucient peu d’être haïs, ne tiennent pas non plus à punir. Voyez Paul, de son côté, disant aux Corinthiens : « Quel est celui qui peut me réjouir, si ce n’est celui qui s’attriste à cause de moi ? » (2Co 2,2) Ainsi c’est quand il menace du châtiment qu’il montre son amour. De même c’est parce que l’Égyptienne avait pour Joseph un violent amour, qu’elle le livra à la peine. Mais celle-ci ne voulait que le mal, parce que son amour était impudique ; Dieu, au contraire, ne veut que le bien, car son amour est digne de lui. Voilà pourquoi il ne dédaigne pas de s’abaisser aux lourdes expressions de la parole humaine, et de se donner la qualification de jaloux : « Je suis », dit-il « un Dieu jaloux » ; c’est pour vous apprendre l’intensité de son amour. (Exo 20,5) Aimons-le donc comme il veut être aimé ; Dieu attache un grand prix à notre amour. Si nous nous détournons de lui, il reste, il nous provoque ; et si nous refusons de nous retourner vers lui, il nous punit, parce qu’il nous aime, et non parce qu’il veut se venger. Voyez donc ce qu’il dit dans Ézéchiel, à la ville qu’il aimait, et qui lui répondait par des mépris « Je susciterai contre vous ceux que vous aimiez, et je vous livrerai entre leurs mains, et ils vous lapideront, et ils vous égorgeront, et mon zèle pour vous vous sera retiré, et je me reposerai et je ne m’occuperai plus de « vous ». (Eze 23,22) Que dirait de plus un amant passionné, méprisé par celle qu’il aime, et ensuite embrasé de nouveau de son amour ? Il n’est rien que Dieu ne fasse pour être aimé de nous ; il n’a pas même épargné son Fils. Mais nous sommes intraitables et cruels. Devenons enfin sensibles, aimons Dieu comme il faut l’aimer, faisons-nous une volupté de la vertu. Avec une femme qu’on aime on ne sent rien des douleurs qui attristent la vie chaque jour ; avec cet amour divin, ce pur amour, songez quels sont les délices et les plaisirs. Voilà, oui, voilà le royaume des cieux, voilà les vraies jouissances, voilà la volupté, voilà la sérénité, la joie, la béatitude. Mais quoi que je dise, je ne dirai rien qui soit digne d’un tel sujet, l’expérience seule peut révéler ce qu’est en soi un tel bien. Aussi le prophète disait-il : « Mettez vos délices dans le Seigneur ; et goûtez et voyez combien le Seigneur est doux ». (Psa 37,4, et 33,9) Obéissons donc, et plongeons-nous dans les délices du divin amour. Car, par ce moyen, même d’ici-bas nous verrons peut – être le royaume des cieux, et nous commencerons à vivre de la vie des anges ; quoique séjournant sur la terre, nous n’aurons rien à envier aux habitants du ciel, et, après notre départ, nous nous tiendrons rayonnants de splendeur devant le tribunal du Christ, et nous jouirons d’une gloire ineffable ; puissions-nous tous l’obtenir par la grâce et par la bonté de Notre-Seigneur Jésus-Christ, à qui appartient, comme au Père, comme au Saint-Esprit, la gloire, l’empire, l’honneur, maintenant et toujours, et dans les siècles des siècles. Ainsi soit-il. HOMÉLIE XXIV.
SACHANT DE PLUS, QUE LE TEMPS PRESSE, ET QUE C’EST L’HEURE DE NOUS RÉVEILLER DE NOTRE ASSOUPISSEMENT. (XIII, JUSQU’À LA FIN DU CHAPITRE) Analyse.
- 1. De la nécessité de se réveiller, parce que le jour approche.
- 2. Sur les œuvres de ténèbres et sur les armes de lumière. – Se revêtir de Jésus-Christ. —. Contre les débauches, l’ivresse, l’impudicité.
- 3. Contre ceux qui se croient éveillés et qui dorment ; le démon, voleur de nuit, perçant les murs, égorgeant ceux qui sont couchés, dévastant toute la maison.
- 4. Des festins : contre les orgies, tableaux divers ; qu’est-ce que se revêtir de Jésus-Christ ?
1. Après leur avoir donné tous les préceptes convenables, il les excite à la pratique du bien par la considération de l’urgence. Le jugement, dit-il, est à nos portes ; c’est ainsi qu’il écrivait aux Corinthiens : « Le temps est court » (1Co 7,29), et aux Hébreux : « Encore un peu de temps, et celui qui doit venir, viendra et ne tardera pas ». (Heb 10,37) Mais, dans ces lettres, il ranimait les fidèles au milieu de leurs épreuves ; ses paroles avaient pour but de rafraîchir les combattants inondés de sueur, de les consoler des persécutions qu’ils subissaient coup sur coup ; ici, au contraire, l’apôtre réveille des endormis ; car voilà la double utilité que nous pouvons retirer de ses réflexions. Mais que signifie ce qu’il dit : « Que c’est l’heure de nous réveiller de notre assoupissement ? » Cela veut dire, la résurrection approche ; le jugement redoutable approche ; le jour approche qui sera comme un four embrasé, il faut enfin secouer notre engourdissement. « Puisque nous sommes plus proches de notre salut que lorsque nous avons reçu la foi ». Voyez-vous comme il leur montre déjà la résurrection ? Le temps marche, dit-il, la vie présente se consume, la vie à venir se rapproche de nous. Si donc vous êtes prêt, si vous avez accompli toutes les prescriptions, voici le jour du salut ; si vous n’en avez rien fait, il n’en est pas de même. Mais, jusqu’à ce moment, ce ne sont pas les pensées tristes, mais les pensées riantes qui lui fournissent ses exhortations ; et, par ce moyen, il les affranchit de tout regret des choses présentes. Ensuite, comme il était à croire qu’ils avaient été plus ardents au commencement, quand leur ferveur était dans toute sa force ; qu’à la longue leur zèle s’était refroidi, l’apôtre leur dit que c’est une disposition toute contraire qu’ils doivent faire paraître ; qu’ils ne doivent pas se relâcher au fur et à mesure que le temps avance, mais bien plutôt montrer plus d’ardeur que jamais. C’est en effet quand le roi est sur le point d’arriver qu’il convient de faire de plus grands préparatifs ; c’est quand l’heure des prix approche, qu’il convient de s’animer le plus aux combats ; ainsi font les coureurs ; c’est vers la fin de la course, au moment de recevoir les prix, qu’ils s’animent le plus. Voilà pourquoi l’apôtre dit : « Puisque nous sommes plus proches de notre salut que lorsque nous avons reçu la foi. La nuit est déjà fort avancée, et le jour s’approche (12) ». Donc si la nuit s’en va, si le jour approche, faisons désormais les œuvres du jour, non celles de la nuit. C’est la conduite que nous tenons dans la vie ordinaire ; quand nous voyons venir le point du jour qui hâte le départ de la nuit, quand nous entendons chanter l’hirondelle, chacun de nous réveille son voisin, quoique la nuit n’ait pas encore disparu ; quand elle a tout à fait cédé la place au jour, alors nous nous excitons tous, les uns les autres, en répétant : Il est jour, et nous entreprenons toutes les œuvres qui se font le jour, nous passons nos vêtements, nous secouons nos songes, nous chassons le sommeil, pour que le jour nous trouve préparés, nous voulons avant que les rayons du soleil aient brillé, être sur pied et à l’ouvrage. Ce que nous faisons dans ces circonstances, faisons-le ici : rejetons nos visions, débarrassons-nous des songes de la vie présente, secouons l’assoupissement profond ; en guise de vêtements, revêtons-nous de vertu, c’est tout ce que veulent dire ces paroles : « Quittons donc les œuvres de ténèbres, et revêtons-nous des armes de lumière ». Car c’est à la mêlée, à la bataille que le jour nous appelle. Mais ne vous troublez pas à ces mots d’armes et de mêlée. Les armes matérielles sont pesantes et pénibles à porter, nos armes à nous sont désirables et dignes d’envie, ce sont des armes de lumière ; elles vous rendent plus éclatant que le soleil, elles vous font resplendir au loin d’une éblouissante clarté ; elles sont pour vous un solide rempart : car ce sont des armes, et elles vous font rayonner, parce que ce sont des armes de lumière. Quoi donc ? Ne faut-il pas combattre ? Sans doute il faut combattre, c’est une nécessité ; mais il n’y a ni fatigue ni peine à supporter ; car notre guerre à nous c’est une danse, c’est une fête. Telles sont nos armes, telle est la puissance de Celui qui commande nos légions. Beau comme l’époux qui sort de la chambre nuptiale, tel est celui qui se munit de ces armes ; car c’est tout ensemble un soldat, un époux. Maintenant, quand l’apôtre dit que « le jour approche », il n’entend pas dire seulement qu’il va venir, mais qu’il reluit déjà ; en effet, il ajoute : « Marchons avec honnêteté comme on marche pendant le jour (13) ». Car il fait jour déjà. Le motif qui ordinairement a le plus de puissance auprès du grand nombre, lui sert ici à entraîner les fidèles, la bienséance : attendu qu’ils sont fort jaloux de bonne renommée. L’apôtre ne dit pas : Marchez, mais : « Marchons », afin de mieux faire accepter d’exhortation et d’adoucir la réprimande. « Point de débauches, d’ivresses ». Il ne défend pas de boire, mais de dépasser la mesure ; il ne proscrit pas l’usage, mais l’abus du vin ; c’est avec la même modération de langage qu’il continue. « Point d’impudicités, de dissolutions ». Il ne supprime pas le commerce avec les femmes, mais la fornication. « Point de querelles, ni d’envie ». Il veut éteindre les foyers où s’allument les passions mauvaises, étouffer la concupiscence et la colère. Il ne suffit pas à l’apôtre de combattre ces passions en elles-mêmes, il en tarit les sources. 2. Rien n’embrase la concupiscence, rien n’enflamme la colère comme le vin et l’ivresse. Aussi, est-ce après « Point de débauches, d’ivresses », qu’il dit : « Point d’impudicités, de dissolutions, point de querelles ni d’envie ». Et il ne s’arrête pas là ; mais, quand il nous a débarrassés de nos mauvais vêtements, écoutez de quelle parure il nous embellit par ces paroles : « Mais revêtez-vous de Notre-Seigneur Jésus-Christ (14) ». II ne parle plus d’œuvres à faire, mais il s’exprime d’une manière plus propre à encourager. Quand il s’agissait du vice, il parlait d’œuvres ; mais maintenant qu’il s’agit de la vertu, il ne parle plus d’œuvres, mais d’armes, afin de montrer par cette expression que la vertu orne en même temps qu’elle protège celui qui la possède. Et l’apôtre ne s’arrête pas là ; il élève beaucoup plus haut son discours, il conçoit une image d’une redoutable grandeur ; c’est le Seigneur même qu’il nous donne pour vêtement, le Roi des rois. Celui qui en est revêtu possède la vertu parfaite dans son intégrité. Ces paroles : « Revêtez-vous », nous prescrivent de nous en envelopper complètement. C’est la même pensée que l’apôtre exprime ailleurs : « Si Jésus-Christ est en vous » (Rom 8,10) ; et encore : « Que dans l’homme intérieur habite le Christ ». (Eph 3,16-17) Ce qu’il veut en effet, c’est que notre âme soit son domicile, c’est que le Christ soit pour nous comme un vêtement, c’est qu’il soit tout pour nous, et au dedans, et au-dehors. Car le Christ est notre plénitude : « La plénitude de celui qui remplit tout en tous » (Eph 1,23) ; il est la voie, il est l’homme, il est l’époux : « Car je vous ai fiancés à cet unique époux, comme une vierge pure ». (2Co 11,2) Il est la racine, le breuvage, la nourriture, la vie : « Et je vis », dit Paul lui-même ailleurs, « ou plutôt, ce n’est plus moi qui vis, mais Jésus-Christ qui vit en moi ». (Gal 2,20) II est l’apôtre, le pontife suprême, le docteur, le père, le frère, le cohéritier, le compagnon du sépulcre et de la croix : « Car nous avons été ensevelis » nous-mêmes, dit encore l’apôtre, « et nous avons été entés en lui, par la ressemblance de sa mort ». (Rom 6,4-5) Il est aussi un suppléant : « Nous faisons donc la fonction d’ambassadeurs pour Jésus-Christ ». (2Co 5,20) Il est encore notre avocat auprès du Père, car « Il intercède pour nous ». (Rom 8,34) Il est et l’habitation et l’habitant. Celui-là « demeure en moi et moi en lui ». (Jn 6,57) C’est, en outre, un ami : « Car vous êtes mes amis ». (Jn 15,14) C’est le fondement, la pierre de l’angle ; quant à nous, nous sommes ses membres, le champ qu’il cultive, l’édifice qu’il construit, sa vigne, les ouvriers qui y travaillent avec lui. Que ne veut-il pas être pour nous ? quel moyen ne prend-il pas pour nous appliquer, nous attacher à lui ? ce qui est la preuve de son ardent amour. Cédez-lui donc, en secouant votre sommeil ; revêtez-vous de lui, et, vous en étant revêtu, donnez-lui votre chair à façonner à son gré. C’est ce que l’apôtre a fait entendre par ces paroles : « Et ne cherchez pas à contenter votre sensualité ». De même qu’il ne défend pas de boire, mais de s’enivrer ; ni de se marier, mais de s’adonner au libertinage ; de même il ne réprouve pas les soins qu’on prend du corps, mais seulement la concupiscence, il ne veut pas que nous franchissions les limites de la nécessité. La preuve qu’il ne proscrit pas les soins pour le corps, c’est ce qu’il écrit à Timothée : « Usez d’un peu de vin, à cause de votre estomac et de vos fréquentes maladies ». (1Ti 5,23) Oui, soignez votre corps, mais pour la santé, non pour la luxure. Il n’y aurait pas d’ailleurs prévoyance et soin pour le corps si vous ne faisiez qu’allumer en lui une flamme ardente ; que d’en faire une fournaise insupportable. Voulez-vous bien comprendre ce que c’est que soigner le corps ; pour la concupiscence ? Voulez-vous qu’on ne vous voie jamais préoccupés de tels soins ? Regardez ceux qui s’abandonnent à l’ivresse, à la gourmandise, qui recherchent le luxe des vêtements, la délicatesse, la mollesse, les dissolutions, et vous comprendrez les paroles de l’apôtre. Tous ces débauchés recherchent, non la santé, mais la luxure, ce qui attise le feu des passions. Mais vous, qui avez revêtu le Christ, qui avez rejeté toutes ces souillures, ne recherchez, pour le corps, que la santé ; prenez soin de votre corps uniquement dans cette vue ; rien au-delà ; employez toute votre ardeur pour les biens spirituels. C’est ainsi que vous pourrez secouer ce sommeil, toutes ces concupiscences ne pèseront pas sur vous. Qu’est-ce que la vie présente ? un sommeil, et les affaires qui s’y rapportent, ne diffèrent en rien des songes. Et, de même que ceux qui dorment, font entendre des paroles insensées, et la plupart du temps n’ont que des visions malsaines, de même, en est-il de nous, ou plutôt notre condition est bien pire. Car celui qui commet, en songe, des actions coupables, ou prononce des paroles honteuses, une fois délivré du sommeil, l’est aussi de la honte, et n’a pas d’expiation à subir ; ici, au contraire, et la honte, et le châtiment subsistent pour l’éternité. Autre différence encore : ceux qui sont riches en songe, une fois le jour arrivé ; comprennent le néant de leurs richesses ; ici, au contraire, c’est ce que l’on comprend même avant que le jour arrive ; avant notre départ d’ici-bas, ces songes sont déjà loin. Secouons donc ce sommeil funeste. Car si ce jour nous surprend dormant encore, ce qui nous saisira, c’est une mort immortelle ; et avant que ce jour arrive, nous serons la proie facile de tous nos ennemis, et des hommes et des démons ; s’ils veulent notre mort, nul ne les empêchera de nous frapper. Si le grand nombre était éveillé ; le danger ne serait pas si grand ; mais à peine un ou deux tiennent leur flambeau allumé, les autres dorment comme au sein de la nuit la plus profonde, voilà pourquoi nous ne pouvons trop veiller nous-mêmes, prendre trop de précautions, si nous voulons éviter d’insupportables malheurs. 3. Ne croirait-on pas que nous sommes à présent en pleine lumière ? Ne croyons-nous pas être tous bien éveillés et sur nos gardes ? Et pourtant (mes paroles vont provoquer peut-être votre rire, je parlerai toutefois) nous dormons tous, nous ronflons dans une nuit profonde tous tant que nous sommes. Si nos yeux pouvaient voir les substances incorporelles, je vous montrerais comment pendant que la plupart de nous ronflent, le démon perce les murs, égorge les malheureux couchés, dévalise l’intérieur de la maison, comme un malfaiteur que rien ne gêne dans l’obscurité épaisse. Mais si nos yeux ne peuvent saisir l’insensible, servons-nous de la parole pour le décrire, représentons-nous parla pensée combien sont appesantis par les passions coupables, combien sont tenus dans les chaînes d’un lourd assoupissement, combien éteignent la, lumière de l’esprit. Aussi voient-ils une chose pour une autre, entendent-ils une chose pour une autre, et aucune des paroles prononcées ici ne frappe leur attention. Si je mens, si vous êtes éveillé, alors dites-moi ce qui s’est passé ici aujourd’hui, si tout ce que vous avez entendu n’a pas été pour vous comme un songe. Oh ! je sais bien que quelques-uns réclameront ; ce que je dis ne s’adresse pas à tous ; mais vous, à qui mes paroles s’adressent, vous qui n’avez rien gagné à venir ici, répondez-moi, quel est le prophète, quel est l’apôtre qui s’est entretenu aujourd’hui avec nous, et de quoi ? Vous ne sauriez répondre : le plus grand nombre des paroles prononcées ici, l’ont été pour vous comme dans un songe, vous n’avez rien entendu réellement. Ce que je dis s’adresse aussi aux femmes ; elles dorment, elles aussi, d’un profond sommeil, et plût au ciel que ce fût un sommeil ! Car celui qui dort, ne dit rien, soit en mal, soit en bien ; mais celui qui veille comme vous veillez, lance beaucoup de paroles qui retomberont sur sa tête, supputant ses usures, roulant des pensées de gros intérêts, n’ayant dans sa tête qu’un négoce de scélératesse et d’effronterie, remplissant son âme des épines qu’il y plante, y étouffant la bonne semence jusque dans la racine. Relevez-vous ; toutes ces épines, extirpez-les ; secouez votre ivresse ; car de cette ivresse, vient votre sommeil. Quand je parle d’ivresse, je ne dis pas seulement l’ivresse du vin, mais celle qu’excitent en vous les soucis de la vie présente, et à cette ivresse j’ajoute celle que te vin provoque. Mon discours ne s’adresse pas aux riches seulement, mais aux pauvres, et surtout à ceux qui chargent les tables pour des repas d’amis. Il n’y a là ni plaisir, ni récréation, mais supplice et châtiment ; le plaisir ne consiste pas à dire des paroles honteuses, mais à faire entendre des discours honnêtes, le plaisir consiste à se rassasier, non pas à se crever les entrailles. Si vous prenez cela pour de la volupté, montrez-la-moi le soir, votre volupté. Je ne veux pas encore vous parler des conséquences funestes de ces débauches, je ne vous entretiens quant à présent que de la brièveté de cette volupté sitôt altérée ; à peine le repas terminé, la joie a déjà disparu. Si je rappelais les vomissements, les pesanteurs de tête, les maladies impossibles à compter, l’âme prisonnière, captive, que pourriez-vous me répondre ? Est-ce parce que nous sommes pauvres, que nous devons nous couvrir de honte ? Ce que j’en dis, ce n’est pas pour empêcher les réunions, les festins, mais pour prévenir une conduite honteuse ; et puis je voudrais que les plaisirs fussent vraiment des plaisirs, et non un supplice, un châtiment, de l’ivresse, des indigestions. Apprenons aux gentils que les Chrétiens savent goûter les plaisirs, mais les plaisirs honnêtes. Car c’est l’Écriture qui dit : « Réjouissez-vous dans le Seigneur avec tremblement ». (Psa 2,11) Comment se réjouir ? En récitant des hymnes, en priant, en faisant entendre des psaumes, au lieu de tous ces chants ignobles. Voulez-vous que le Christ prenne place à votre table, que sa bénédiction se répande sur tous vos convives ? Priez, faites entendre des chants spirituels, appelez les pauvres à partager le repas, faites y régner le bon ordre et la tempérance ; voulez-vous convertir en église la salle du festin ? Au lieu de vociférations indécentes et d’applaudissements, et de trépignements, faites entendre les hymnes en l’honneur du souverain maître de toutes choses. Ne me dites pas : Qu’une autre coutume a prévalu ; corrigez ce qui est mauvais. « Soit que vous mangiez », dit ailleurs l’apôtre, « soit que vous buviez, quoi que vous fassiez, faites tout pour la gloire de Dieu ». (1Co 10,31) De vos impurs festins viennent les mauvais désirs, les impuretés, le mépris pour les épouses, les courtisanes en honneur ; de là, la ruine des familles, des maux innombrables ; tout est bouleversé ; abandonnant la source pure, vous courez au cloaque immonde. Car que le corps de la courtisane ne soit qu’un cloaque immonde, je ne le demande à nul autre qu’à vous, qui vous vautrez dans ces immondices. Est-ce que vous ne rougissez pas, est-ce que vous ne vous regardez pas comme impur, quand vous avez péché ? Aussi, je vous en conjure, fuyez la fornication et la mère de la fornication, l’ivresse. Pourquoi jetez-vous la semence où il n’y a pas d’espoir de moisson ? Je me trompe, quand vous moissonneriez, le fruit vous couvrirait de honte. Quand il en naîtrait un enfant, ce serait une honte pour vous, et cet enfant vous doit son malheur à vous qui l’avez fait bâtard et déshonoré par sa naissance. Et quand vous lui laisseriez des monceaux d’or, méprisé dans la famille, méprisé dans la cité, méprisé devant les tribunaux, ce ne sera jamais que le fils de la courtisane, le fils de la femme esclave ; et vous êtes méprisé à votre tour, soit vivant, soit mort ; vous n’êtes plus de ce monde, mais ce monde garde le monument de votre déshonneur. Pourquoi donc jetez-vous ainsi la honte à pleines mains ? 4. Pourquoi jeter la semence dans une terre qui ne tient qu’à corrompre son fruit ? Où tant de germes sont voués à la stérilité ? Où le meurtre a lieu avant la naissance ? Car par vous la courtisane n’est pas seulement la courtisane, vous en faites de plus une homicide. Voyez-vous la filiation ? Après l’ivresse, la fornication ; après la fornication, l’adultère ; après l’adultère, le meurtre ? ou plutôt un 'crime, plus détestable encore que le meurtre ; je ne sais quel terme employer. En effet, on ne tue pas ce qui est né, on empêche de naître. Pourquoi outragez-vous le don de Dieu ? Pourquoi violez-vous les lois de la nature ? Pourquoi une œuvre maudite vous attire-t-elle, comme si c’était une bénédiction ? Pourquoi faites-vous que les hommes trouvent la mort là où ils devraient trouver la vie ? La femme qui vous a été accordée pour vous donner des enfants, vous en faites un instrument de meurtre ? Pour être toujours belle aux yeux de ses amants, toujours un objet de désir, pour extorquer plus d’argent, cette femme ne recule devant rien, et par là, c’est sur votre tête qu’elle amasse un ardent brasier, car si ces attentats sont commis par elle, c’est vous aussi qui en êtes cause. De là encore les idolâtries. Car que de femmes, pour se faire aimer de vous, ont recours aux enchantements, aux libations, aux breuvages, à mille autres machinations ! Eh bien ! en dépit de cet excès d’infamie, malgré ces meurtres, malgré ces idolâtries, le grand nombre regarde encore ces passions comme une chose indifférente, même ceux qui ont des épouses, et c’est de là que découlent les plus grands maux. Car tous ces poisons ne s’attaquent plus aux flancs de la courtisane, mais à l’épouse outragée, machinations sans nombre, appels aux démons, évocations des morts, guerres de chaque jour, combats sans trêve ni merci, querelles sans fin et sans relâche. Aussi Paul, après avoir dit : « Point d’impudicités, de dissolutions », ajoute-t-il : « Point de querelles, ni d’envies », parce qu’il sait bien que les désordres de ce genre enfantent les bouleversements des familles, les outrages faits aux enfants légitimes, des malheurs qu’on ne peut compter. Donc, pour éviter tous ces maux, revêtons-nous du Christ, ne le quittons jamais : se revêtir du Christ, c’est ne jamais en être séparé, c’est le manifester en nous de tous côtés par la sainteté, par la douceur de nos mœurs. Cette expression, nous l’employons en parlant des amis : Il ne le quitte non plus que son habit, disons-nous ▼, pour marquer un commerce inséparable. En effet, on parait selon ce qu’on a revêtu. Donc il faut que le Christ paraisse de tous côtés en nous. Et comment paraîtra-t-il ? Si vous faites les actions du Christ. « Le Fils de l’Homme », dit le Sauveur, « n’a pas où reposer sa tête ». (Luc 9,58) Imitez-le. Quand il lui fallait prendre sa nourriture, il mangeait du pain d’orge ; quand il voyageait, il n’avait ni chevaux ni attelages, mais il marchait à pied au point de souffrir de la fatigue ; le sommeil nécessaire, il le prenait sur la proue d’une barque qui lui servait d’oreiller ; le repos dont on avait besoin, il disait de le prendre sur l’herbe. Ses vêtements étaient grossiers, et souvent il était seul, ne menant personne à sa suite. Ce n’est pas tout ; l’exemple qu’il a donné sur la croix et au milieu des outrages, méditez-le, imitez-le ; vous vous serez revêtu du Christ, si vous prenez soin de votre chair, non pour la concupiscence ; car il n’y a là aucun vrai plaisir. Les désirs déréglés engendrent d’autres désirs plus tyranniques encore, et vous ne serez jamais rassasié, vous ne ferez que vous préparer une grande torture. De même que celui qui a toujours soif, eût-il à sa disposition mille sources, n’en retire aucun profit, parce qu’il lui est impossible d’éteindre en lui le mal qui le brûle, de même en est-il pour celui qui est toujours en proie à la concupiscence. Si, au contraire, vous savez vous contenir dans les limites du nécessaire, vous ne serez jamais saisi d’une telle fièvre, toutes ces impuretés s’enfuiront loin dé vous, les ivresses comme les passions lascives. Donc, mangez dans la mesure qui convient pour chasser la faim, habillez-vous comme il faut pour couvrir votre corps, ne cherchez pas dans vos vêtements une parure pour votre chair, de peur de perdre ce que vous voulez embellir ; vous ne faites ainsi que rendre la chair plus faible, que compromettre une santé que la mollesse énerve. Pour qu’elle soit l’heureux véhicule de votre âme, pour que le pilote tienne ferme le gouvernail, pour que le soldat manie facilement ses armes, sachez bien disposer toutes choses. Ce n’est pas la richesse, c’est le petit nombre des besoins, qui met l’homme hors d’atteinte. Le riche, même quand il n’éprouve aucune perte, a peur d’en éprouver ; le pauvre, même quand il subit l’injustice, est mieux disposé que ceux qu’on n’a pas lésés, et grâce à son esprit, il ressent mieux l’allégresse et la joie. Donc ne cherchons pas à nous préserver des outrages, mais à rendre impossibles les outrages que l’on voudrait nous faire. Or nous n’y réussirons qu’à la condition de nous contenir dans les limites du nécessaire, sans rien désirer par de là. C’est ainsi qu’il nous sera donné de goûter même ici-bas les plaisirs, et d’obtenir les biens futurs, par la grâce et par la bonté de Notre-Seigneur Jésus-Christ, à qui appartient, comme au Père, comme au Saint-Esprit, la gloire, la puissance, l’honneur, maintenant et toujours, et dans les siècles des siècles. Ainsi soit-il.