‏ Genesis 35:6-7

4. Mais considérez ensuite, je vous prie, l’ineffable providence de Dieu envers ce juste. Voyant qu’il craignait, à cause de ce qu’avaient fait ses fils, de demeurer dans cette contrée, Dieu lui dit, continue le texte : Lève-toi et monte à Béthel pour y habiter. (Gen 35,1) Puisque tu crains les habitants de cette contrée, retire-toi et va habiter Béthel. Élevé là un autel au Seigneur, que tu as vu, quand tu fuyais de devant la face d’Esaü, ton frère. Et Jacob dit à sa famille et à tous ceux qui étaient avec lui : faites disparaître les dieux étrangers du milieu de vous, et purifiez-vous et changea vos vêtements ; levons-nous, montons à Béthel, élevons-y un autel au Seigneur, qui m’a écouté au jour de la tribulation ; il était avec moi et m’a sauvé dans mon voyage. (Id 1-3) Considérez encore ici l’obéissance et la piété de ce juste. Quand il a entendu cet ordre : monte à Béthel, élève là un autel, il appelle tous ses enfants et leur dit : faites disparaître les dieux. Quels dieux, me dira-t-on ? car on ne voit nulle part qu’il ait eu des dieux : dès les premiers jours de sa vie ce juste fut un pieux serviteur du vrai Dieu. Peut-être il entendait par ces paroles les dieux de Laban que Rachel avait dérobés ; aussi dit-il : Puisque nous allons rendre des actions de grâces au vrai Dieu, qui m’a toujours accordé sa protection, faites disparaître les idoles que vous pourriez avoir. Purifiez-vous et changez vos vêtements ; allons ainsi à cette ville et trouvons-nous-y tous ensemble, purifiés au-dehors et au dedans. Ne vous montrez pas seulement purs par l’éclat de vos vêtements, mais purifiez les pensées de votre esprit en faisant disparaître vos idoles, et montons ainsi à Béthel. Et ils donnèrent à Jacob, dit le texte, les dieux étrangers, car ce n’étaient pas leurs dieux, et les pendants d’oreilles qu’ils portaient. (Id. 4) C’étaient peut-être des symboles idolâtriques se rapportant à ces dieux ; aussi les apportent-ils à leur père avec les idoles. Et Jacob les cacha sous le térébinthe de Sichem, et il les fit disparaître jusqu’à ce jour. Il les cacha, dit le texte (Id), et il les fit disparaître, en sorte que les esclaves de l’égarement eux-mêmes fussent soustraits à cet égarement et que personne désormais n’en reçût de dommage.

Après que ce juste eût accompli tous ces soins, il partit du pays de Sichem et se mit en route pour Béthel. Mais voyez encore le soin que Dieu prend de lui, et comment l’Écriture nous en instruit clairement. Ce juste étant parti, la crainte de Dieu se répandit dans les villes d’alentour, et ils ne poursuivirent point les enfants d’Israël. (Id. 5) Vous avez vu combien est grande cette providence et combien manifeste est son secours ? La crainte saisit les habitants et ils ne les poursuivirent point. Parce que ce juste l’avait redouté et avait dit : Nous sommes en bien petit nombre et nous serons écrasés, l’Écriture nous apprend que la crainte qui saisit les habitants empêcha cette poursuite. Dieu en effet, lorsqu’il veut prêter son assistance, rend les faibles plus forts que les puissants, le petit nombre plus puissant que le grand nombre, et rien ne saurait être plus heureux que celui qui a obtenu l’assistance d’en haut.

Et Jacob, dit l’Écriture, arriva à Luzon, qui est dans la terre de Chanaan et est nommé Béthel, et toute la tribu avec lui. Il y éleva un autel et appela ce lieu Béthel, car c’est là que Dieu lui était apparu, tandis qu’il fuyait de devant la face d’Esaü, son frère. (Id 6-7) Arrivé là, il accomplit l’ordre du Seigneur en élevant un autel, et donne à ce lieu le nom de Béthel. Déborra, nourrice de Rébecca, mourut et fut ensevelie au-dessous de Béthel, sous le chêne ; et Jacob le nomma le chêne du deuil. (Id. 8) Vous le voyez, il donnait aux lieux des noms tirés des événements afin d’en conserver la mémoire. Et comment, me direz-vous, la nourrice de Rébecca était-elle avec lui, nouvellement arrivé de Mésopotamie, et n’ayant point encore revu son père ? Il n’est pas difficile de répondre qu’elle avait voulu accompagner lorsqu’il revint de chez Laban, pour revoir Rébecca, après une si longue séparation, et qu’avant de l’avoir rencontrée elle mourut à Béthel.

5. Arrêtons-nous aussi là, s’il vous plaît ; terminons ce discours en exhortant votre charité au zèle pour la vertu et à prendre soin de la chasteté des jeunes gens. Car c’est de là, pour ainsi dire, que proviennent tous les maux. L’habitude de la dépravation, gagnant avec le temps, produit un tel ravage que nul avis ne peut désormais gagner ceux qui y sont une fois abandonnés ; ils sont conduits comme des captifs là où le veut le démon. C’est lui qui désormais est leur maître et qui leur donne ces ordres funestes que les jeunes gens exécutent avec joie, ne considérant que le plaisir du moment et ne réfléchissant pas à la douleur qui suivra. Je vous exhorte donc à tendre la main à nos jeunes gens, de peur que nous n’ayons à rendre compte de leur conduite. Ne savez-vous pas ce qui arriva au vieil Héli, qui n’avait pas convenablement redressé les défauts de ses enfants ? En effet, quand un mal a besoin qu’on emploie le fer, si un médecin veut le traiter par un liniment, il le rend bientôt incurable, parce qu’il n’y a pas appliqué le remède qui convenait ; de même ce vieillard, qui devait traiter ses enfants avec une sévérité proportionnée à leurs fautes, s’étant montré mou à leur égard, eut part à leur châtiment. Redoutez donc cet exemple, je vous en prie, vous qui avez des enfants, et veillez à leur éducation ; que chacun des gens de la maison partage sincèrement vos soins et comprenne que le gain le plus grand, c’est le service dit prochain ; en sorte que chacun, instruit à la vertu, puisse échapper à la tentation du vice, et que, choisissant la vertu, il obtienne l’assistance d’en haut. Que chacun de vous en soit favorisé, par la grâce et la bonté de Notre-Seigneur Jésus-Christ, auquel soient, avec le Père et le Saint-Esprit, gloire, puissance, honneur, maintenant, et toujours, et aux siècles des siècles. Ainsi soit il.

SOIXANTIÈME HOMÉLIE.

« Et il y établit un autel, et il donna à ce lieu le nom de Béthèl ; car c’est là que Dieu lui était apparu, lorsqu’il fuyait de devant son frère Esaü. » (Gen 35,7)

ANALYSE.

  • 1. Explication des versets 7-13 du chapitre XXXV. —2. Explication des versets 14-27. —3. Exhortation morale à la mortification de la chair, au sacrifice spirituel de soi-même ; à la vigilance et à l’examen de conscience.

1. Aujourd’hui, s’il vous plaît, nous allons reprendre la suite de notre dernier discours, et faire l’instruction en continuant d’expliquer le même texte. Car aujourd’hui encore l’histoire de Jacob peut nous enseigner combien était grande la bienveillance de Dieu envers lui, et comment il l’affermit de nouveau par ses promesses, pour le récompenser de sa vertu. L’Écriture après nous avoir raconté dans les versets précédents, comment sur l’ordre de Dieu, quitta Sécime à cause des crimes que ses fils y avaient commis et se rendit à Luzan, ajoute : Et il y bâtit un autel, et il donna à ce lieu le nom de Béthel ; car c’est là que Dieu lui était apparu, lorsqu’il fuyait de devant son frère Esaü. Après avoir donné un tel ordre à ce juste, et l’avoir délivré de la crainte, dont il avait été saisi à cause du massacre des Sécimites, Dieu, dit l’Écriture, frappa de terreur les habitants de ces villes, et les empêcha de le poursuivre. Voyez quelle est la providence de Dieu, avec quelle sollicitude il veille sur Jacob. Il remplit de terreur, dit l’Écriture, les esprits de ceux qui habitaient les villes voisines, et les empêcha de le poursuivre : car ils voulaient sans doute venger les Sécimites. Mais comme le sang avait été répandu malgré la volonté de ce juste, et que Siméon et Lévi avaient commis ce crime pour venger l’outrage fait à leur sœur, non seulement il le délivre lui et ses fils de la crainte qui les agitait, mais il arrête encore l’impétuosité des peuples voisins en semant la terreur parmi eux. Sentez-vous combien il importe de jouir de l’assistance divine ? Lorsque Dieu a de la bienveillance pour nous, il éloigne de notre âme toute affliction. Car s’il a rendu le courage à ce juste, il a glacé d’effroi ses ennemis. Comme il est le souverain Maître, il dirige les événements à son gré, et il fait éclater dans toute chose sa sagesse et sa toute-puissance. Il n’est rien de plus fort que l’homme qui a su obtenir l’aide de Dieu, comme aussi il n’est rien de plus faible que celui qui en est privé. Voyez ce juste, ses auxiliaires sont faciles à compter et très-peu nombreux, mais il est protégé par la main de Dieu, et il a repris confiance et il a échappé au complot tramé contre lui ; ceux-là au contraire, bien qu’ils se fussent réunis en foule considérable, et qu’ils eussent été, d’accord dans leur entreprise, n’ont pas même pu mettre leurs projets à exécution. Car, dit l’Écriture, Dieu frappa de terreur les villes qui étaient autour d’eux. Après que ce juste fut délivré de toute crainte et de la poursuite des habitants de ce pays, voyez combien est grande l’affection que Dieu lui témoigne de nouveau ; Dieu, dit l’Écriture, lui apparut une seconde fois à Luza. Pourquoi l’Écriture ajoute-t-elle ce mot : une seconde fois ? Ce n’est pas sans motif : c’est pour nous apprendre que Dieu lui est déjà apparu autrefois dans ce même lieu, lorsqu’il fuyait son frère et qu’il se dirigeait vers la Mésopotamie. Voici ce que veut faire entendre l’Écriture : De même qu’autrefois Dieu lui est apparu au moment de sa fuite, de même aujourd’hui il se montre à lui dans le même lieu, au moment de son retour ; il lui renouvelle les promesses qu’il lui a faites lorsqu’il s’en allait, et par là il veut que ce juste ait confiance dans sa parole, et qu’il n’en doute pas à cause du long espace de temps qui s’est écoulé dans l’intervalle. Et il le bénit, et lui dit : Tu ne t’appelleras plus Jacob : désormais ton nom sera Israël. Bien qu’il l’eût déjà appelé de ce nom, lorsque Jacob traversait Jaboch, il veut aujourd’hui mettre dans son cœur une plus grande assurance, et il lui donna la même bénédiction, et il lui dit : Ton nom sera Israël ; augmente et multiplie. Des nations et des multitudes de nations naîtront de toi, des rois même sortiront de ta race. Voyez la grandeur de cette bénédiction. Il lui prédit non seulement que sa race se multipliera, mais encore qu’elle sera illustre. Des rois naîtront de ta race ; il lui révèle ainsi dès ce jour la gloire de ses descendants. Je te donne le pays que j’ai donné à Abraham et à Isaac, et je le donnerai à ta postérité après toi.

Après que Siméon et Lévi eurent massacré les Sécimites, Jacob disait : Nous sommes en petit nombre ; ils s’assembleront donc contre moi, et ils me frapperont, et ils me détruiront, moi et ma maison ; et dans toutes ses paroles, il montrait sa pusillanimité, et la violente crainte qui le possédait : aujourd’hui donc le Seigneur plein de bienveillance pour ce juste, lui dit Puisque tu t’es écrié : nous sommes en petit nombre, apprends que ta race croîtra et se multipliera, et qu’elle sera tellement illustre, que d’elle sortiront une multitude de nations, et même des rois ; non seulement tu ne seras pas détruit, mais toi et ta race vous recevrez en héritage ce pays tout entier. Et après lui avoir fait ces promesses, Dieu, dit l’Écriture, remonta d’avec lui du lieu où il lui avait parlé. Voyez comment la sainte Écriture, dans son langage, s’abaisse au niveau de là nature humaine. Dieu, dit-elle, remonta d’avec lui : elle ne nous donne pas à entendre que Dieu puisse être limité dans l’espace, mais elle veut nous montrer l’étendue de sa bonté : car l’Esprit-Saint s’abaisse au niveau de la faiblesse humaine pour nous raconter toutes choses. Ces mots, descendre et monter, ne peuvent convenir à Dieu ; mais comme c’est là la plus grande preuve qu’il puisse nous donner de son ineffable bonté, que de se servir de pareils termes pour notre instruction, il a recours au langage humain ; aussi bien il serait impossible aux oreilles de l’homme de comprendre la sublimité de son langage, s’il était en rapport avec la dignité du Seigneur.
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