John 14:13
ANALYSE.
- 1. Jésus-Christ proclame sa consubstantialité avec le Père.
- 2. Autorité et puissance de Jésus-Christ.
- 3. Suivre Jésus-Christ et porter sa croix. – Le sacrifice de la nouvelle loi beaucoup plus excellent que celui de l’ancienne. – Sacrifice du chrétien ; en quoi il consiste. – Les passions et les mauvais désirs étouffent la divine parole. – Ce n’est pas l’amour des richesses qui est notre tyran, c’est notre Acheté. – On a été longtemps sans connaître l’or et l’argent, d’où naît en nous l’amour des richesses. – Différents désirs : naturels, nécessaires, superflus. – Omettre de faire ce qui est facile, c’est s’ôter toute excuse. – Ne faire pas au moins quelques légères aumônes, c’est se rendre inexcusable.
▼Le Père n’agit pas séparément de moi, il ne fait pas une autre ouvre que celle que je fais : ce qu’il fait, je le fais ; ce que je fais, il le fait : Car Nous sommes une même chose.
. Car il est écrit ailleurs que le Père agit également : « Mon Père ne cesse a point d’agir jusqu’à présent, et j’agis aussi a incessamment ». (Jn 5,17) Là, Jésus-Christ fait voir qu’entre les œuvres du Père et les œuvres du Fils, il n’y a nulle différence ; ici il déclare que le Père et le Fils sont une même chose. Que si ces paroles présentent d’abord quelque chose de bas, ne vous en étonnez point. Le Sauveur ayant dit auparavant : « Vous ne croyez pas », il a parlé ensuite dans ces termes, pour vous faire connaître qu’il n’a tempéré ses paroles de cette manière, qu’afin d’amener ses disciples à la foi. Jésus-Christ était dans leur cœur, il voyait tout ce qui s’y passait. « Ne croyez-vous pas que je suis dans mon Père, et que mon Père est dans moi (11) ? » Sûrement il fallait, dit le Sauveur, qu’ayant entendu nommer le Père et le Fils, vous n’allassiez rien chercher de plus : il fallait aussitôt reconnaître que la substance est égale et la même. Que si cela n’est pas pour vous une suffisante démonstration de l’égalité de rang et de la consubstantialité, apprenez-le encore par les œuvres, que la substance et la dignité sont égales. Et si Jésus-Christ, en disant « Celui qui me voit, voit » mon « Père », avait voulu parler des œuvres, il n’aurait pas ensuite ajouté : « Croyez-le au moins à cause des œuvres » que je fais. Après quoi, voulant montrer que, non seulement il pouvait faire ces choses, mais aussi de beaucoup plus grandes, il s’élève et parle hyperboliquement. Car il ne dit pas : Je puis faire de plus grandes œuvres, mais, ce qui est beaucoup plus admirable : Je puis, dit-il, je puis donner aux autres le pouvoir d’en faire de plus grandes. « En vérité, en vérité, je vous le dis : Celui « qui croit en moi, fera lui-même les œuvres que je fais, et en fera encore de plus grandes, parce que je m’en vais à mon Père (12) ». C’est-à-dire, ce sera à vous désormais à faire les miracles, car je m’en vais. Ensuite, ayant fini d’expliquer ce que demandait la suite de son discours, le Sauveur dit : « Quoi que ce soit que vous demandiez en mon nom, vous l’obtiendrez, et je le ferai, afin que mon Père soit glorifié en moi (13) ». Ne le remarquez-vous pas, mes frères, que c’est encore le Fils qui fait les œuvres ? Je le ferai, dit-il ; et il n’a point dit : « Je prierai mon Père » ; mais : « Afin que le Père soit glorifié en moi ». Et cependant il avait dit ailleurs : « Dieu glorifiera son Fils en lui-même » (Jn 8,54) ; mais ici il dit : Le Fils glorifiera le Père. Comme on verra que le Fils a le pouvoir de faire de grandes œuvres, son Père en sera glorifié. Que veut dire cette parole : « En mon nom ? » Ce que disaient les apôtres : « Au nom de Jésus-Christ, levez-vous et marchez ». (Act 3,6) Car tous les miracles que faisaient les apôtres, c’était lui-même qui les opérait. Et « La main du Seigneur était avec eux ». (Act 11,21) « Je le ferai », dit-il. Ne voyez-vous pas son autorité ? Ce que font les autres, c’est lui-même qui le fait ; et ce qu’il voudra faire par lui-même, il ne le pourra pas, si le Père ne lui en donne la vertu et le pouvoir ? Qui oserait proférer une pareille absurdité ? « Je le ferai » : pourquoi ne le dit-il qu’après ? C’est afin de confirmer ce qu’il a dit d’abord, et de faire connaître qu’il a parlé d’abord le langage de la condescendance. « Je m’en vais à mon père ». Par ces paroles, Jésus-Christ veut faire entendre ceci à ses disciples : Je ne mourrai point, mais je demeure dans toute ma dignité, et je suis dans le ciel. Au reste, le Sauveur disait toutes tels choses à ses apôtres pour leur consolation. Comme il était vraisemblable que, n’ayant pas encore une pleine connaissance de la résurrection, il leur venait dans l’esprit bien des idées tristes et affligeantes, leur Maître leur promet qu’ils auront le pouvoir de faire à d’autres les mêmes choses qu’il a faites lui-même, qu’il aura toujours soin d’eux ; il leur fait connaître qu’il demeure toujours, et que non seulement il demeure, mais encore qu’il leur donnera des marques sensibles d’une plus grande vertu et d’un plus grand pouvoir. 3. Suivons donc Jésus-Christ et portons sa croix. Encore qu’aujourd’hui il n’y ait point de persécution, nous avons en perspective un autre genre de mort. « Faites mourir », dit l’apôtre, « les membres de l’homme terrestre qui est en vous ». (Col 3,5) Faisons donc mourir la concupiscence, la colère, l’envie. C’est là le vivant sacrifice : et un sacrifice qui ne se réduit point en cendres, qui ne se dissipe point en fumée, qui n’a besoin ni de bois, ni de feu, ni d’épée : le feu et l’épée, il les a en soi ; et c’est le Saint-Esprit. Servez-vous de cette épée pour couper, pour retrancher tout ce qu’il y a d’étranger et de superflu dans votre cœur, et pour ouvrir vos oreilles qui sont bouchées. Les maladies de l’âme, les passions et les mauvais désirs ferment l’entrée à la divine parole. Le désir des, richesses ne nous permet pas d’entendre la parole qui nous excite à faire l’aumône, l’envie étouffe la parole qui nous exhorte à la charité : d’autres maladies encore rendent notre âme lâche et paresseuse en tout. Arrachons donc de nos cœurs les mauvais désirs : il suffit de vouloir, et tout s’éteint. En effet, ne considérons pas, je vous prie, que l’amour des richesses est un tyran : n’imputons cette tyrannie qu’à notre lâcheté. Bien des gens disent qu’ils ne savent pas ce que c’est que l’argent. Ce désir ne nous est pas naturel : les désirs naturels sont nés avec nous dès le commencement, et on a longtemps ignoré ce que sont l’or et l’argent. D’où s’est-il donc produit en nous ce désir des richesses ? De la vaine gloire et de notre extrême paresse. Parmi les désirs qui se trouvent dans l’homme, les uns sont nécessaires, d’autres sont naturels : et il y en a qui ne sont ni l’un ni l’autre. Par exemple : il y a des désirs qui, s’ils ne sont remplis, font mourir l’animal, et ceux-là sont naturels et nécessaires, comme le désir de manger, de boire, de dormir. La concupiscence de la chair est naturelle, mais n’est point nécessaire : plusieurs l’ont maîtrisée et domptée et n’en sont point morts. L’amour des richesses n’est ni naturel, ni nécessaire, mais superflu. Si nous le voulons, nous secouerons le joug de sa tyrannie. Et certes, Jésus-Christ, parlant de la virginité, dit : « Qui peut comprendre ceci, le comprenne ». (Mat 19,12) Mais sur les richesses, il ne parle pas de même ; et que dit-il ? « Quiconque d’entre vous ne renonce pas à tout ce qu’il a, ne peut être mon disciple ». (Luc 14,33) À l’égard de ce qui est facile, le Sauveur use d’exhortation tout en laissant à la volonté ce qui surpasse les forces de plusieurs. Pourquoi nous rendons-nous donc inexcusables ? Celui qui est attaqué d’une forte et violente maladie, ne sera pas rigoureusement puni ; mais celui qui n’est atteint que d’une faible et légère infirmité, reste sans excuse. Qu’aurons-nous à répondre à Jésus-Christ, quand il nous dira : « Vous m’avez vu avoir faim, et vous ne m’avez pas donné à manger ? » (Mat 25,42) Quelle excuse aurons-nous ? Prétexterons-nous notre pauvreté ? Mais nous ne sommes pas plus pauvres que cette veuve de l’Évangile, qui, pour avoir donné deux oboles (Mrc 12,42), surpassa tout le monde. Dieu n’exige pas de nous de grandes offrandes ni de grandes aumônes ; il ne mesure que notre bonne volonté. Et en cela même éclate sa providence. Admirons donc cette infinie bonté du Seigneur, et offrons-lui ce que nous pouvons, afin que dans cette vie et dans l’autre, nous puissions attirer sur nous sa grande miséricorde, et obtenir les biens qu’il nous a promis, par la grâce et la bonté de Notre-Seigneur Jésus-Christ, à qui appartient la gloire, dans tous les siècles des siècles ! Ainsi soit-il. HOMÉLIE LXXV.
SI VOUS M’AIMEZ, GARDEZ MES COMMANDEMENTS. – ET JE PRIERAI MON PÈRE, ET IL DONNERA UN AUTRE CONSOLATEUR, AFIN QU’IL DEMEURE ÉTERNELLEMENT AVEC VOUS, L’ESPRIT DE VÉRITÉ. – QUE LE MONDE NE PEUT RECEVOIR, PARCE QU’IL NE LE VOIT POINT. (VERS. 15, 16, 17, JUSQU’AU VERSET 30)
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